Pénal

Accès à un avocat sans frais : tout savoir sur la commission d’office

Jordan Alvarez
Editeur
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Vous ne pouvez pas payer un avocat ? Découvrez vos recours légaux

L’accès à la justice est un droit fondamental garanti par les textes internationaux, européens et nationaux. Pourtant, dans les faits, engager un avocat reste pour beaucoup de justiciables une démarche financièrement inaccessible. C’est pour pallier cette inégalité d’accès au droit qu’existe le mécanisme de la commission d’office, prévu par la loi et encadré par des garanties déontologiques strictes.

L’avocat commis d’office n’est pas un avocat au rabais. Il bénéficie des mêmes compétences professionnelles, des mêmes obligations déontologiques, et du même engagement que tout autre avocat inscrit au barreau. Il est désigné soit à la demande du justiciable, soit par initiative de la juridiction, pour assurer la représentation d’une personne dans une procédure pénale, civile ou administrative, lorsque celle-ci n’a pas ou ne peut pas choisir librement un avocat.

Contrairement à une idée répandue, le fait qu’un avocat soit commis d’office n’implique pas nécessairement la gratuité de sa prestation. C’est l’aide juridictionnelle, qui peut se cumuler à la commission d’office, qui permet la prise en charge totale ou partielle des honoraires par l’État.

Comprendre les conditions d’intervention, les démarches à accomplir et les droits attachés à la désignation d’un avocat commis d’office est donc essentiel pour toute personne convoquée en justice, mise en examen, placée en garde à vue ou impliquée dans une procédure contentieuse complexe. Ce guide, proposé par defendstesdroits.fr, vous livre une information juridique rigoureuse, étayée par les textes légaux et les pratiques des juridictions françaises.

Sommaire

  1. Introduction
  2. Qui peut bénéficier d’un avocat commis d’office ?
  3. Comment obtenir un avocat commis d’office ?
  4. Lien entre commission d’office et aide juridictionnelle
  5. L’avocat commis d’office peut-il refuser ?
  6. Peut-on changer d’avocat commis d’office ?
  7. Les obligations déontologiques de l’avocat désigné
  8. Où trouver un avocat commis d’office ?
  9. Conclusion

Qui peut bénéficier d’un avocat commis d’office ?

Le recours à un avocat commis d’office est prévu pour garantir l’accès au droit à toute personne, même sans ressources. Toutefois, il ne s’agit pas d’un droit automatique dans tous les contentieux.

Les contentieux pour lesquels l’assistance est obligatoire

L’assistance d’un avocat est obligatoire devant certaines juridictions, notamment :

  • devant la cour d’assises (article 317 du Code de procédure pénale) ;
  • devant la cour criminelle ;
  • en appel d’une décision pénale ;
  • devant le tribunal judiciaire en matière civile pour certaines procédures complexes (ex. : divorce contentieux – article 760 du Code de procédure civile) ;
  • devant le tribunal pour enfants, le juge des libertés et de la détention, ou dans le cadre de mesures de contrainte pénale (placement en détention, hospitalisation sans consentement).

Dans ces cas, si la personne concernée n’a pas d’avocat, le président de la juridiction ou le juge désigné saisit d’office le bâtonnier, qui procède à une désignation.

Les cas où l’avocat commis d’office est une demande du justiciable

En dehors des hypothèses d’assistance obligatoire, tout justiciable peut solliciter la désignation d’un avocat commis d’office, sous certaines conditions :

  • être convoqué devant une juridiction pénale (y compris le tribunal de police ou correctionnel) ;
  • être placé en garde à vue ou sous le coup d’une mesure restrictive de liberté ;
  • être mineur poursuivi ou victime de violences graves ;
  • être partie à une procédure où l’assistance d’un avocat est utile mais non obligatoire, et ne pas avoir les moyens de s’en offrir un.

Comment obtenir un avocat commis d’office ?

La procédure de désignation varie selon l’urgence et le type de contentieux.

Saisir le bâtonnier de l’Ordre des avocats

Dans la majorité des cas, il convient d’adresser une demande écrite au bâtonnier de l’Ordre des avocats près le tribunal compétent. Cette demande peut être :

  • déposée directement auprès du service de l’accueil du justiciable du tribunal ;
  • envoyée par courrier avec les pièces justificatives (convocation, avis d’audience, pièce d’identité).

Le bâtonnier désigne ensuite un avocat inscrit sur la liste de permanence. La liste des avocats volontaires pour les commissions d’office est tenue à jour par chaque Ordre, en application de l’article 83 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.

Cas d’urgence : la désignation directe par la juridiction

En cas de garde à vue ou d’audience imminente, la désignation peut être faite par :

  • le procureur de la République ;
  • le juge d’instruction ;
  • ou le président de la juridiction, qui contacte directement le bâtonnier.

Lien entre avocat commis d’office et aide juridictionnelle

L’expression "commis d’office" ne signifie pas systématiquement "gratuité". L’avocat commis d’office n’intervient pas bénévolement, sauf si l’aide juridictionnelle est accordée.

L’aide juridictionnelle comme condition de gratuité

Pour que les honoraires soient pris en charge par l’État, le justiciable doit formuler une demande d’aide juridictionnelle (article 10 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991). Cette aide est attribuée selon les ressources du demandeur et peut être :

  • totale (prise en charge intégrale) ;
  • partielle (une partie des frais reste à la charge du justiciable).

À défaut d’aide juridictionnelle, l’avocat désigné d’office peut fixer librement ses honoraires, en lien avec le client. Un protocole d’honoraires peut alors être signé.

Formaliser la demande

La demande d’aide juridictionnelle doit être déposée au bureau d’aide juridictionnelle (BAJ) du tribunal saisi du litige. Elle comprend :

  • un formulaire CERFA n°16146*03 ;
  • les justificatifs de ressources ;
  • l’acte de procédure (convocation, plainte, etc.) ;
  • une lettre expliquant la nature de la procédure envisagée.

L'avocat commis d'office peut-il refuser d'intervenir ?

L’avocat désigné d’office ne peut pas refuser arbitrairement une mission qui lui a été confiée par le bâtonnier. En cas de conflit d’intérêts, d’empêchement grave ou de rupture manifeste de confiance avec le client, il peut solliciter son remplacement.

En revanche, si l’avocat n’est pas saisi officiellement ou ne relève pas d’une commission d’office, il n’est pas tenu d’accepter un dossier à la demande directe d’un justiciable.

Peut-on changer d’avocat commis d’office ?

Oui. Comme pour tout avocat, le client peut mettre fin au mandat confié à un avocat commis d’office, à condition de respecter certaines formes :

  • notifier la rupture par écrit ;
  • informer le bâtonnier de l’Ordre concerné ;
  • justifier d’une demande de remplacement ou de la désignation d’un nouvel avocat.

Toutefois, la gratuité de l’intervention ne s’applique pas automatiquement si l’aide juridictionnelle n’est pas accordée.

Quel encadrement déontologique pour les avocats commis d’office ?

L’avocat désigné d’office est soumis aux mêmes règles déontologiques que tout avocat inscrit au barreau. Il doit notamment respecter :

Il peut être saisi d’une plainte disciplinaire auprès du bâtonnier en cas de manquement.

Où trouver un avocat commis d’office ?

Les coordonnées du service compétent pour faire la demande sont disponibles :

  • auprès du tribunal judiciaire ou du tribunal correctionnel ;
  • sur le site de votre Ordre des avocats ;
  • via le formulaire d'aide juridictionnelle disponible sur defendstesdroits.fr ;
  • ou directement au guichet unique de greffe dans les juridictions concernées.

Conclusion

Le recours à un avocat commis d’office constitue une garantie d’accès effectif au procès équitable, en particulier pour les justiciables les plus précaires ou ceux confrontés à des situations d’urgence judiciaire. Loin d’être un dispositif marginal, il s’inscrit dans le cœur du fonctionnement de la justice française, en articulation étroite avec le régime de l’aide juridictionnelle (loi n°91-647 du 10 juillet 1991) et les obligations professionnelles des avocats (loi n°71-1130 du 31 décembre 1971).

Obtenir un avocat commis d’office ne relève pas de la chance ni d’un privilège : c’est un droit encadré, avec des conditions précises et des démarches formalisées. Pour les personnes qui ignorent ce droit ou hésitent à le mobiliser, il est essentiel d’être informé, orienté, et soutenu juridiquement. Des structures comme les bureaux d’aide juridictionnelle, les Maisons de justice et du droit, ou encore les informations publiées sur defendstesdroits.fr permettent d’y voir plus clair et de faire valoir ses droits à chaque étape de la procédure.

Qu’il s’agisse de se défendre face à des accusations pénales, d’être assisté dans une procédure familiale conflictuelle, ou de faire valoir ses intérêts dans un litige civil complexe, l’intervention d’un avocat — même désigné d’office — reste souvent déterminante pour l’issue du procès.

FAQ

1. Qui a le droit de demander un avocat commis d’office ?

Le droit de demander un avocat commis d’office appartient à toute personne confrontée à une procédure judiciaire, que ce soit dans un cadre pénal, civil ou administratif, et qui ne dispose pas d’un avocat par ses propres moyens.

Plusieurs situations ouvrent ce droit :

  • En matière pénale, toute personne placée en garde à vue, mise en examen, convoquée devant le tribunal correctionnel ou la cour d’assises peut solliciter un avocat commis d’office. Ce droit est reconnu notamment par les articles 63-3-1 et 706-88 du Code de procédure pénale.
  • En matière civile, un justiciable convoqué devant une juridiction où la représentation par avocat est obligatoire (ex. : divorce, assistance éducative, contentieux de tutelle) peut en faire la demande.
  • Les mineurs, qu’ils soient mis en cause ou victimes, doivent systématiquement être assistés d’un avocat, conformément à l’ordonnance du 2 février 1945 sur l’enfance délinquante.

Aucune condition de nationalité ni de régularité de séjour n’est exigée pour bénéficier de ce droit. Le critère principal reste l’impossibilité matérielle de recourir à un avocat choisi.

2. L’avocat commis d’office est-il toujours gratuit ?

Non. La désignation d’un avocat commis d’office n’implique pas automatiquement la gratuité de son intervention. Cette confusion fréquente mérite d’être levée : la commission d’office désigne uniquement le mode de désignation par le bâtonnier ou l’institution judiciaire, et non la prise en charge financière.

Pour bénéficier d’une prise en charge des frais, il faut déposer une demande d’aide juridictionnelle, conformément à la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique. Selon les ressources du demandeur :

  • l’aide est totale : l’État prend en charge 100 % des honoraires ;
  • l’aide est partielle : le client devra régler une partie des frais à l’avocat, selon un montant prévu d’un commun accord (par convention d’honoraires).

En l’absence d’aide juridictionnelle, l’avocat désigné d’office peut facturer librement ses honoraires, comme tout avocat, sauf accord spécifique. Il est donc important de discuter dès le début des modalités de rémunération pour éviter toute incompréhension.

3. Quelle est la procédure pour obtenir un avocat commis d’office ?

La procédure varie selon la situation du justiciable et l’urgence de l’affaire. Il existe deux voies principales :

1. Demande volontaire auprès du bâtonnier
Le justiciable doit rédiger une demande écrite au bâtonnier de l’Ordre des avocats du barreau local. Cette demande doit être accompagnée de :

  • la convocation à l’audience ou un document prouvant la procédure en cours ;
  • une copie d’un justificatif d’identité ;
  • une lettre expliquant les raisons de la demande (difficultés financières, urgence de la procédure).

2. Désignation d’office en cas d’urgence judiciaire
Dans les situations de garde à vue, comparution immédiate, hospitalisation sans consentement, l’avocat est désigné directement par le bâtonnier, à la demande :

  • du procureur de la République ;
  • du juge des libertés et de la détention ;
  • ou du président de la juridiction.

Dans les deux cas, la liste des avocats volontaires pour les commissions d’office est tenue à jour par chaque Ordre des avocats, et ces professionnels s’engagent à accepter les missions.

4. Peut-on refuser ou changer son avocat commis d’office ?

Oui. Le justiciable n’est jamais obligé de conserver un avocat commis d’office s’il estime que la relation de confiance est rompue, que la défense est insuffisante ou qu’un autre avocat correspondrait mieux à ses attentes.

La procédure à suivre est la suivante :

  • adresser une demande écrite au bâtonnier expliquant les motifs du refus ou de la rupture (absence de communication, désaccord sur la stratégie, conflit) ;
  • proposer éventuellement le nom d’un autre avocat à désigner à sa place (s’il est disponible) ;
  • ou déposer une nouvelle demande de commission d’office, avec justificatif de désaccord.

Attention : le simple fait de ne pas "aimer" l’avocat désigné ne suffit pas. Il est préférable de formuler des arguments objectifs.

À noter : l’avocat commis d’office peut lui-même demander à être dessaisi, mais uniquement en cas de motif légitime (conflit d’intérêts, impossibilité matérielle d’assurer la défense, ou comportement inapproprié du client).

5. Quelle est la différence entre un avocat commis d’office et un avocat désigné au titre de l’aide juridictionnelle ?

La distinction repose sur deux axes :

  • Le mode de désignation :
    • L’avocat commis d’office est désigné par le bâtonnier ou l’autorité judiciaire, souvent dans l’urgence, lorsque le justiciable n’a pas d’avocat au jour de l’audience ou de la procédure.
    • L’avocat désigné au titre de l’aide juridictionnelle est choisi par le justiciable lui-même, parmi les avocats acceptant l’AJ, puis validé par le bureau d’aide juridictionnelle.
  • La finalité de la prise en charge :
    • Dans les deux cas, le justiciable peut bénéficier de la gratuité totale ou partielle si l’aide juridictionnelle lui est accordée.
    • Mais sans aide juridictionnelle, l’avocat commis d’office facturera ses honoraires, tandis que l’avocat librement choisi fixera ses propres conditions tarifaires.

En résumé : la commission d’office est un mécanisme d’accès à la défense, tandis que l’aide juridictionnelle est un dispositif de financement de cette défense.

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