L’embauche d'un salarié étranger en France constitue aujourd'hui une réalité fréquente pour de nombreuses entreprises, notamment dans les secteurs en tension. Face à la pénurie de main-d'œuvre ou pour intégrer des compétences spécifiques, les employeurs français sont de plus en plus amenés à recruter hors des frontières nationales.
Toutefois, cette démarche est loin d’être anodine sur le plan juridique. En effet, l’emploi d’un ressortissant étranger est strictement encadré par le Code du travail et le Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et implique le respect de formalités complexes et d’obligations précises sous peine de lourdes sanctions administratives et pénales.
Le contrat de travail conclu avec un salarié étranger présente des spécificités qui doivent impérativement être maîtrisées par l'employeur : obtention préalable d'une autorisation de travail, vérification du titre de séjour, respect de l'égalité de traitement et des mentions obligatoires du contrat, sans oublier le paiement éventuel de la taxe DGFiP.
Ces formalités varient selon la nationalité du travailleur, la nature du contrat proposé (CDD, CDI, contrat d'apprentissage ou d'intérim), ainsi que la situation administrative du salarié au regard du droit au séjour.
Il est également fondamental pour l'employeur d’anticiper les conséquences du contrat sur le titre de séjour du salarié et d’en comprendre l'impact : une embauche en CDI ou en CDD n’ouvre pas les mêmes droits ni la même stabilité de séjour. La rupture du contrat pose également des questions spécifiques, notamment en cas de non-renouvellement du titre de séjour.
En outre, le risque lié à l’emploi de travailleurs sans-papiers doit être particulièrement appréhendé : sanctions financières importantes, engagement de la responsabilité pénale, voire interdiction temporaire d’exercice pour l'employeur contrevenant. La récente loi du 26 janvier 2024 ainsi que le décret du 9 juillet 2024 ont renforcé la politique de contrôle et alourdi les sanctions applicables.
Pourtant, dans certains cas, une régularisation par le travail reste envisageable via la procédure d'admission exceptionnelle au séjour, qui permet de faire émerger des solutions juridiques dans un contexte irrégulier.
Face à la complexité croissante des règles relatives à l'emploi de salariés étrangers en France, il apparaît indispensable pour les employeurs d’être parfaitement informés des différentes obligations juridiques à respecter avant toute embauche, afin de sécuriser leur pratique et éviter des conséquences dommageables tant sur le plan juridique que financier.
Cet article vous propose une analyse juridique approfondie et actualisée, appuyée sur les références légales, pour vous permettre d'embaucher sereinement un salarié étranger, dans le respect des règles françaises et européennes.
En France, l'embauche d'un salarié étranger est autorisée dans le cadre de plusieurs types de contrats, sous réserve du respect des règles relatives à l'autorisation de travail :
Des règles spécifiques encadrent toutefois l'emploi des étudiants étrangers et des ressortissants algériens, suivant des dispositions bilatérales particulières.
Conformément à l'article L5221-5 du Code du travail, lorsqu'un travailleur étranger n'est pas encore présent sur le territoire français, l'employeur doit initier une procédure d’introduction, équivalente à une demande d'autorisation de travail.
Seule la possession d'un titre de séjour portant la mention « autorisé à travailler » permet à l'étranger d'exercer une activité salariée (article L5221-6 du Code du travail).
Par principe, cette demande est obligatoire pour tout recrutement d'un ressortissant hors Union européenne (UE), Espace économique européen (EEE) ou Confédération suisse. L’autorisation accordée peut être restreinte à certains métiers ou à une zone géographique précise (article R5221-1 du Code du travail).
L’employeur peut toutefois être dispensé de solliciter cette autorisation, notamment lorsque le travailleur étranger est :
Selon l'article L1221-3 du Code du travail, le contrat de travail doit obligatoirement être rédigé en français. Si le poste implique l'utilisation de termes étrangers sans équivalent, ceux-ci doivent être expliqués dans le contrat.
En cas de demande expresse du salarié, une traduction intégrale dans sa langue peut être réalisée. En cas de contentieux, seul le texte dans la langue du salarié prévaut contre lui.
Une fois l'autorisation obtenue et le titre de séjour vérifié, l'employeur doit accomplir les formalités usuelles, dont la déclaration préalable à l'embauche (DPAE).
L’article L1132-1 du Code du travail prohibe toute discrimination en matière de rémunération, d'évolution de carrière, ou de conditions de travail, en raison de l'origine ou de la nationalité du salarié.
L'employeur peut être redevable d'une taxe perçue par la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP), succédant à l'ancienne taxe Ofii. Celle-ci est exigible selon le statut du salarié et les modalités de son recrutement.
Un travailleur étranger embauché en CDI obtient une carte de séjour temporaire mention « salarié » (article L421-1 du CESEDA), valable un an puis renouvelable sous forme pluriannuelle (4 ans) si l’emploi est maintenu.
L’autorisation de travail permet au salarié non résident de demander un visa d'entrée et de faire valider son séjour une fois arrivé.
L'embauche en CDD permet l’obtention d'un titre de séjour mention « travailleur temporaire » (article L421-3 du CESEDA). La durée de ce titre est liée à celle du contrat, dans la limite d'un an.
Un renouvellement nécessite une nouvelle demande d'autorisation de travail.
La rupture d'un contrat de travail conclu avec un salarié étranger suit les règles applicables à tout salarié :
Les obligations relatives au préavis, au respect des droits acquis et au paiement des indemnités doivent être strictement respectées.
Employer un travailleur sans titre expose l'employeur à des sanctions administratives et pénales, comme prévu par la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024 :
La solidarité financière du donneur d’ordre peut également être engagée.
En matière de régularisation, les travailleurs sans papiers occupant des emplois en tension peuvent bénéficier de l'admission exceptionnelle au séjour, prévue par les articles L435-1 et suivants du CESEDA.
Ce dispositif dispense du visa d’entrée mais est soumis à des conditions strictes, renforcées par la circulaire Retailleau du 23 janvier 2025.
L’embauche d’un salarié étranger en France ne peut se réduire à une simple signature de contrat. Elle implique pour l’employeur une vigilance accrue et une parfaite maîtrise des formalités imposées par le Code du travail et le CESEDA. Du choix du contrat à la procédure d’introduction, en passant par l’obtention de l’autorisation de travail, la vérification du titre de séjour, ou encore la rédaction du contrat conforme aux règles linguistiques et substantielles, chaque étape doit être minutieusement respectée.
Il est tout aussi fondamental pour l'employeur de connaître ses obligations au cours de la relation contractuelle : assurer l’égalité de traitement, effectuer la déclaration préalable à l'embauche, s’acquitter, lorsque nécessaire, de la taxe DGFiP, et anticiper les impacts du contrat sur la situation administrative du salarié. La rupture du contrat, qu’elle soit initiée par l’employeur ou par le salarié, doit également respecter le cadre juridique prévu par le droit du travail français.
Enfin, le travail dissimulé et l’emploi de salariés sans autorisation de travail restent sévèrement réprimés. L’employeur doit impérativement vérifier, avant toute embauche, la régularité de la situation administrative du salarié étranger pour éviter des sanctions lourdes. Toutefois, le droit français offre des possibilités de régularisation par le travail, notamment via la procédure d’admission exceptionnelle au séjour, qui, sous conditions strictes, peut permettre d'intégrer légalement un travailleur initialement en situation irrégulière.
Face à ces enjeux juridiques complexes, il est recommandé aux employeurs de se faire accompagner par des professionnels du droit, tels que les juristes de defendstesdroits.fr, afin de sécuriser chaque embauche et d’anticiper tout risque de contentieux.
Quelles sont les démarches indispensables pour recruter un salarié étranger hors Union européenne ?
L’employeur souhaitant recruter un travailleur étranger hors UE doit impérativement respecter plusieurs étapes successives :
Peut-on embaucher un travailleur étranger sans autorisation de travail ? Quelles sanctions encourt l'employeur ?
Non, l’embauche d’un étranger dépourvu d’une autorisation de travail constitue une infraction sanctionnée par :
L’employeur qui embauche un salarié sans autorisation de travail commet donc une infraction au Code du travail et au CESEDA, exposant sa responsabilité civile et pénale.
Quels types de contrat de travail un employeur français peut-il proposer à un salarié étranger ?
Le Code du travail autorise la conclusion de plusieurs formes de contrats avec un salarié étranger :
Dans tous les cas, le contrat de travail doit être rédigé en français (article L1221-3 du Code du travail) et respecter l'égalité de traitement avec les autres salariés, en matière de rémunération et de conditions de travail (article L1132-1).
Quels impacts le contrat de travail a-t-il sur le titre de séjour du salarié étranger ?
Le type de contrat signé a un impact direct sur la nature du titre de séjour délivré :
Comment régulariser un salarié étranger sans-papiers via la procédure d'admission exceptionnelle au séjour ?
En présence d'un travailleur sans-papiers, il est possible, dans certaines conditions, de solliciter une régularisation par le travail :
Cette procédure permet d'obtenir un titre de séjour temporaire mention « salarié » ou « travailleur temporaire », à condition de prouver une intégration économique réelle par l'activité professionnelle.