Le casier judiciaire est un instrument central de la politique pénale française. Il constitue la mémoire officielle des décisions judiciaires et administratives prononcées à l’encontre d’une personne, qu’il s’agisse de crimes, délits ou de certaines contraventions. Ce registre national, régi par les articles 768 et suivants du Code de procédure pénale, assure un rôle de contrôle et de prévention en permettant aux autorités judiciaires, administratives et parfois aux employeurs de vérifier la situation pénale d’un individu.
L’existence du casier judiciaire répond à un double objectif. D’une part, il permet à la justice d’individualiser les peines en tenant compte des antécédents d’une personne lors de nouvelles poursuites. D’autre part, il garantit la protection de l’ordre public, en offrant aux administrations et employeurs certaines informations indispensables pour évaluer la probité d’un candidat à un poste sensible, notamment lorsqu’il implique des mineurs.
Toutefois, l’accès au casier judiciaire n’est pas uniforme. Le législateur a prévu une distinction entre trois bulletins – le B1, le B2 et le B3 – chacun présentant un contenu plus ou moins restreint et des conditions de délivrance spécifiques. Cette hiérarchie répond à une exigence d’équilibre entre la nécessaire protection de la société et le respect du droit à la vie privée et à la réinsertion sociale des personnes condamnées.
Comprendre la portée et les différences entre ces trois bulletins est donc essentiel, tant pour les justiciables que pour les praticiens du droit.
Le bulletin n°1 est le relevé le plus complet. Il comprend toutes les condamnations pénales, ainsi que certaines sanctions administratives et disciplinaires. Y figurent notamment :
Sont également inscrites les mesures de libération conditionnelle (art. 729 CPP), les peines après ajournement, ainsi que les décisions d’ajournement avec dispense de peine.
La délivrance du B1 est strictement encadrée. Il n’est accessible qu’aux magistrats, au procureur de la République et à l’administration pénitentiaire (art. 776 CPP). L’intéressé ne peut en obtenir copie, mais peut en consulter le contenu en adressant une demande motivée au procureur de son lieu de résidence.
Le bulletin n°2 est un extrait plus restreint, qui exclut plusieurs catégories de condamnations. Par exemple, n’y figurent pas :
Le B2 peut être communiqué à certaines autorités administratives, notamment les préfectures, mairies ou services de la jeunesse et des sports, ainsi qu’aux tribunaux de commerce. Les employeurs d’activités impliquant un contact avec des mineurs (secteurs éducatifs, culturels ou sociaux) peuvent également le consulter, sous réserve d’une demande via l’autorité administrative compétente. En revanche, l’intéressé ne peut en demander directement copie, sauf consultation par le biais du procureur.
Le bulletin n°3 est le plus restreint des trois. Il ne contient que les condamnations les plus graves, à savoir :
Les décisions concernant les mineurs ne figurent jamais dans ce bulletin.
Seule la personne condamnée peut obtenir son bulletin n°3. La demande s’effectue en ligne ou par courrier auprès du Casier judiciaire national (art. 777 CPP). L’intéressé peut ensuite le présenter à un employeur, lequel ne peut en conserver copie mais uniquement en constater la consultation.
Chaque bulletin poursuit donc une finalité propre : contrôle judiciaire, encadrement administratif ou vérification professionnelle.
Le casier judiciaire illustre la complexité de l’articulation entre les impératifs de sécurité publique et le respect des droits fondamentaux. En organisant l’information pénale autour de trois bulletins distincts, le législateur a voulu instaurer une graduation dans l’accès aux données sensibles : un relevé exhaustif à destination des magistrats (B1), un extrait partiel réservé aux autorités administratives et à certains employeurs (B2), et enfin un bulletin minimal accessible uniquement à l’intéressé (B3).
Cette structuration vise à concilier plusieurs objectifs : assurer le suivi judiciaire des individus, prévenir certains risques liés à l’exercice d’activités professionnelles ou bénévoles sensibles, tout en permettant aux condamnés de bénéficier d’une seconde chance grâce à des mécanismes comme l’effacement ou la non-inscription de certaines décisions.
Ainsi, au-delà de son aspect purement technique, le casier judiciaire interroge sur la place que la société réserve à la réhabilitation et à la réinsertion. La logique de proportionnalité qui préside à son fonctionnement illustre un principe fondamental du droit pénal français : sanctionner, mais aussi offrir la possibilité de reconstruire une vie personnelle et professionnelle après une condamnation.
1. Comment obtenir le bulletin n°3 de son casier judiciaire ?
Le bulletin n°3 est le seul extrait du casier judiciaire accessible directement à la personne concernée. Il peut être demandé gratuitement en ligne sur le site du Casier judiciaire national, par courrier postal ou sur place au greffe du tribunal. La demande nécessite de fournir une pièce d’identité valide (carte nationale d’identité ou passeport). Selon l’article 777 du Code de procédure pénale, seule la personne condamnée peut en faire la demande ; aucun tiers, même un proche, n’a le droit d’obtenir ce document. Le bulletin est ensuite délivré sous forme électronique ou papier et comporte uniquement les condamnations les plus graves.
2. Qui a accès au bulletin n°1 du casier judiciaire ?
Le bulletin n°1 (B1) est le plus complet des trois bulletins, car il regroupe toutes les condamnations pénales, même celles concernant des faits commis durant la minorité. Il est cependant soumis à une confidentialité maximale. Conformément à l’article 776 du Code de procédure pénale, il n’est délivré qu’aux magistrats, au procureur de la République, ainsi qu’à l’administration pénitentiaire pour les besoins de l’exécution des peines. La personne concernée ne peut pas en obtenir de copie ; elle peut uniquement en consulter le contenu en adressant une demande au procureur de son lieu de résidence.
3. Quelle différence entre le bulletin n°2 et le bulletin n°3 du casier judiciaire ?
Le bulletin n°2 (B2) et le bulletin n°3 (B3) diffèrent par leur contenu et leurs destinataires. Le B2 est un document intermédiaire, plus restreint que le B1 mais plus large que le B3. Il est délivré aux autorités administratives et à certains employeurs dans des secteurs sensibles (éducation, culture, activités auprès des mineurs). En revanche, le B3 ne peut être demandé que par la personne condamnée elle-même. Autre différence majeure : le B2 peut contenir un certain nombre de condamnations mineures, alors que le B3 ne recense que les condamnations lourdes (peines privatives de liberté supérieures à 2 ans sans sursis, peines d’interdiction, suivi socio-judiciaire).
4. Une condamnation peut-elle être effacée du casier judiciaire ?
Oui, l’effacement est possible dans plusieurs hypothèses. Certaines mentions disparaissent automatiquement après un délai légal d’effacement fixé par les articles 769 et suivants du Code de procédure pénale. D’autres peuvent être supprimées à la suite d’une réhabilitation légale ou judiciaire (articles 133-12 à 133-20 du Code pénal). La réhabilitation a pour effet d’effacer certaines condamnations du casier judiciaire, facilitant ainsi la réinsertion de la personne. Enfin, certaines peines assorties de sursis peuvent être considérées comme non avenues si aucune nouvelle infraction n’est commise dans un délai déterminé.
5. L’employeur peut-il demander le bulletin n°2 du casier judiciaire ?
Un employeur ne peut pas solliciter directement la remise du bulletin n°2 d’un candidat ou d’un salarié. Le Code de procédure pénale (art. 775) impose que la demande passe obligatoirement par une autorité administrative compétente, comme les services départementaux de la jeunesse et des sports pour les professions en contact avec des mineurs. Même dans ce cadre, le bulletin n°2 n’est transmis à l’employeur que s’il est vierge de toute condamnation. En revanche, un employeur peut demander au candidat de produire son bulletin n°3, mais il ne peut pas en conserver de copie : il peut uniquement attester dans le dossier du personnel que la vérification a été effectuée.