Travail

CDD : 5 cas où la prime de précarité n’est pas versée

Francois Hagege
Fondateur
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Prime de précarité CDD : quand peut-elle être refusée ?

À l’issue d’un contrat à durée déterminée (CDD), le salarié bénéficie, sauf exceptions légales, d’une indemnité spécifique destinée à compenser la précarité de son statut.

Souvent méconnue ou mal comprise, la prime de précarité soulève de nombreuses questions, notamment lorsqu’il s’agit de savoir dans quelles situations l’employeur peut s’en exonérer.

Pour bien défendre ses droits et éviter toute privation abusive de cette indemnité, il est indispensable de connaître les règles applicables, les textes de référence ainsi que la jurisprudence qui encadrent son versement.defendstesdroits.fr vous propose un décryptage complet des exceptions à ce principe d’indemnisation prévu par le Code du travail, afin de vous permettre d’agir en toute connaissance de cause.

Comprendre la prime de précarité

Le Code du travail, et notamment son article L1243-8, consacre le principe selon lequel tout salarié recruté sous contrat à durée déterminée (CDD) a droit, à l’expiration de celui-ci, à une indemnité compensatrice appelée prime de précarité.

Cette indemnité a pour but de compenser l’instabilité et le caractère temporaire du contrat, qui place le salarié dans une situation d’incertitude professionnelle une fois le contrat terminé.

En pratique, la prime de précarité correspond en principe à 10 % de la rémunération brute totale perçue par le salarié durant toute la durée de son CDD.

Elle peut toutefois être ramenée à 6 % si une convention collective ou un accord de branche applicable prévoit l’accès prioritaire du salarié à une formation professionnelle, conformément aux dispositions de l’article L1243-8 alinéa 2.

L’indemnité est donc un mécanisme de protection indispensable qui vise à garantir un minimum de sécurité financière pour les salariés dont le contrat n’a pas vocation à être prolongé ou transformé en CDI.

Toutefois, la loi encadre strictement les exceptions : dans certains cas limitativement énumérés par le Code du travail, l’employeur peut être dispensé de verser cette indemnité, notamment en cas de poursuite du contrat en CDI, de refus d’un CDI équivalent, de rupture anticipée imputable au salarié, ou encore lorsque le CDD relève d’une catégorie spécifique comme le travail saisonnier ou l’apprentissage.

La prime de précarité fait donc partie intégrante des droits du salarié sous CDD et constitue un levier de stabilisation de l’emploi, tout en incitant les employeurs à privilégier, lorsque cela est possible, l’embauche en contrat à durée indéterminée, considéré comme la forme normale et générale de la relation de travail (article L1221-2 du Code du travail).

Poursuite en CDI : une exception majeure

L’une des premières dérogations figure à l’article L1243-10 du Code du travail. Si, à l’échéance du CDD, l’employeur propose un contrat à durée indéterminée (CDI) pour le même poste ou un poste similaire et que le salarié accepte, aucune prime de précarité n’est due. La jurisprudence (Cass. Soc., 3 déc. 1997, n°95-45093) précise que le CDI doit être proposé avant le terme du CDD ou dans un délai raisonnable (Cass. Soc., 8 déc. 2004, n°01-46877).

En cas de refus injustifié du salarié pour un CDI répondant à ces conditions, l’employeur est également exonéré du versement de l’indemnité. Ce mécanisme encourage la pérennisation de l’emploi.

Refus de renouvellement du CDD par le salarié

Une autre exception notable au versement de la prime de précarité concerne le refus de renouvellement du CDD par le salarié. Lorsque le contrat initial comporte une clause de renouvellement automatique — ce qui est fréquent pour anticiper un besoin prolongé de main-d’œuvre — le salarié qui choisit de ne pas poursuivre la relation contractuelle perd le bénéfice de cette indemnité compensatrice.

En effet, selon l’article L1242-11 du Code du travail, le renouvellement d’un CDD est possible à condition qu’une clause de renouvellement soit prévue dans le contrat initial et qu’il intervienne avant le terme prévu.

Dans ce cadre, le refus du salarié de renouveler est interprété juridiquement comme une décision unilatérale de mettre fin à la collaboration, alors même que l’employeur souhaitait la poursuivre.

La logique légale est que la prime de précarité vise à compenser une incertitude subie, c’est-à‑dire la perte involontaire d’un emploi à durée déterminée.

Si le salarié refuse sciemment de prolonger son contrat alors qu’une continuité est proposée, il n’est plus considéré comme subissant une précarité imposée. Le législateur a ainsi posé le principe que l’employeur est libéré de son obligation de versement dans ce cas.

Il est donc essentiel pour un salarié de vérifier attentivement la présence d’une clause de renouvellement, ses modalités (durée, conditions de notification) et de mesurer les conséquences juridiques d’un refus. En cas de contestation, la charge de la preuve du refus incombe généralement à l’employeur, qui doit démontrer qu’une proposition claire et conforme aux dispositions légales a bien été faite.

Rupture anticipée : cas d’exonération particuliers

Certains motifs de rupture anticipée autorisent l’employeur à ne pas verser l’indemnité de fin de contrat. Il s’agit notamment :

  • de la rupture à l’initiative du salarié ;
  • de la faute grave ou lourde commise par le salarié (force majeure) (article L1243-1 du Code du travail) ;
  • de la rupture durant la période d’essai, qu’elle émane du salarié ou de l’employeur.

Il faut noter que la rupture amiable ne figure pas parmi ces exceptions : en cas d’accord mutuel, la prime demeure due.

Le cas particulier du CDD étudiant

Le CDD conclu avec un étudiant pendant ses vacances scolaires ou universitaires constitue également une dérogation au droit commun. Comme l’a confirmé le Conseil constitutionnel (décision n°2014-401 QPC du 13 juin 2014) et la CJUE (affaire C-432/14 du 1er octobre 2015), cette exception respecte les principes constitutionnels et européens. L’indemnité est donc exclue, sauf si l’étudiant termine sa scolarité à l’issue du contrat.

Certains contrats spécifiques sans prime

Enfin, le Code du travail et la pratique excluent la prime pour :

  • les contrats saisonniers ;
  • les CDD d’usage (CDDU) dans certains secteurs (article L1242-2 du Code du travail) ;
  • les contrats aidés (contrat unique d’insertion, etc.) ;
  • les contrats d’apprentissage et de professionnalisation.

Pour ces contrats, la situation précaire est jugée inhérente à la nature de l’activité ou compensée par un objectif de formation et d’insertion.

Le cas spécial du travail temporaire

En revanche, le contrat de mission, communément appelé contrat d’intérim, ouvre bien droit à une indemnité de fin de mission, assimilée à une prime de précarité, conformément à l’article L1251-32 du Code du travail.

Cette indemnité, souvent appelée IFM, a pour objectif de compenser l’incertitude et la discontinuité de l’emploi inhérentes au recours au travail temporaire.

Le montant de l’indemnité de fin de mission est fixé à 10 % de la rémunération brute totale perçue par le salarié pendant la durée de sa mission, sauf dispositions conventionnelles ou accords de branche plus favorables.

Toutefois, cette indemnité peut être réduite à 6 % si l’intérimaire bénéficie, par exemple, d’un accès à une formation qualifiante pendant la mission ou à son terme, conformément à l’article L1251-33 du Code du travail.

Il existe néanmoins des situations où l’indemnité de fin de mission n’est pas due. Par exemple, si l’entreprise utilisatrice propose au salarié une embauche en CDI pour le même poste ou un poste similaire, à l’issue de la mission, et que le salarié refuse sans motif légitime, l’indemnité de précarité intérim peut être supprimée.

De plus, l’indemnité n’est pas versée lorsque la rupture du contrat est imputable à une faute grave de l’intérimaire ou à un cas de force majeure, selon les mêmes principes que pour le CDD.

Le régime du travail temporaire est également encadré par des obligations spécifiques : l’entreprise de travail temporaire (ETT) doit verser l’indemnité de congés payés distinctement et fournir au salarié une attestation de fin de mission. Ces éléments sont indispensables pour vérifier le calcul de l’IFM et contester tout oubli ou erreur de paiement.

Pour s’assurer de percevoir l’intégralité de ses droits, un salarié intérimaire peut consulter sa convention collective de branche ou les accords conclus au sein de son agence d’intérim, car certains prévoient des modalités de calcul plus favorables.

En cas de litige, il est possible de saisir le Conseil de prud’hommes pour exiger le versement de l’IFM et, le cas échéant, réclamer des dommages et intérêts pour non-respect des obligations légales.

Particularités pour les agents contractuels de la fonction publique

Depuis le 1er janvier 2021, certains agents contractuels relevant de la fonction publique peuvent bénéficier, sous conditions, d’une indemnité de précarité spécifique. Cette mesure est prévue à l’article L554-3 du Code général de la fonction publique, introduit par la loi n°2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.

Toutefois, ce droit ne s’applique pas de façon uniforme : les conditions varient selon qu’il s’agit de la fonction publique d’État, de la fonction publique territoriale ou de la fonction publique hospitalière.
De manière générale, l’indemnité est due lorsque l’agent contractuel est recruté pour une durée inférieure ou égale à un an et qu’il n’est pas réemployé à l’issue de ce contrat.

Le montant de l’indemnité peut atteindre 10 % de la rémunération brute totale perçue, mais il peut être réduit à 6 % si l’agent bénéficie d’un accompagnement renforcé vers un emploi durable (par exemple, un dispositif de titularisation ou un accompagnement Pôle emploi).
Sont notamment exclus de cette indemnité :

  • les agents recrutés sur contrat aidé ou dans le cadre d’un parcours emploi compétences,
  • les contrats liés à des remplacements temporaires,
  • ou encore les renouvellements successifs qui ne créent pas de rupture de contrat.
    Chaque employeur public doit informer l’agent, par écrit, des motifs pour lesquels l’indemnité de précarité est due ou non. En cas de litige, l’agent peut saisir le tribunal administratif pour faire valoir ses droits.

Pour approfondir

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Conclusion

La question du versement de la prime de précarité révèle toute la complexité du droit du travail, entre protection du salarié et marges de manœuvre de l’employeur. Connaître ces cas dérogatoires, cités dans les articles L1243-8, L1243-10, L1242-2, L1251-32 et L554-3, est essentiel pour anticiper ses droits et obligations.

Pour aller plus loin, il est fortement recommandé de se référer aux conventions collectives, aux accords d’entreprise ou aux décisions de jurisprudence actualisées, et de faire appel à un professionnel du droit.

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FAQ

1️⃣ Dans quels cas précis l’employeur peut-il refuser de verser la prime de précarité à la fin d’un CDD ?
Le principe posé par l’article L1243-8 du Code du travail est qu’un salarié en contrat à durée déterminée (CDD) a droit à une indemnité dite prime de précarité, égale à 10 % de la rémunération brute totale, sauf dispositions conventionnelles prévoyant un taux plus élevé ou plus bas (souvent ramené à 6 % en cas de formation). Toutefois, cette prime n’est pas due si le CDD débouche immédiatement sur un CDI pour le même poste ou un emploi similaire, sans interruption de la relation de travail. Cette situation est expressément prévue par l’article L1243-10 et confirmée par la jurisprudence (Cass. Soc., 3 déc. 1997, n°95-45093 ; Cass. Soc., 8 déc. 2004, n°01-46877). De même, si le salarié refuse un CDI équivalent, proposé avant la fin du contrat, l’employeur est dispensé de l’indemnité.
Certains CDD spécifiques sont également exclus : CDD saisonniers, CDD d’usage (CDDU) conclus dans des secteurs définis par décret (spectacle, hôtellerie, déménagement…), contrats aidés, contrats d’apprentissage ou de professionnalisation. Pour ces cas, la précarité est réputée intégrée au contrat du fait de sa nature temporaire ou formatrice.

2️⃣ Si le salarié rompt son CDD avant son terme, peut-il réclamer tout de même la prime de précarité ?
En principe, non : la rupture anticipée à l’initiative du salarié le prive de la prime, sauf exception. Conformément aux articles L1243-1 et L1243-4 du Code du travail, la prime n’est pas versée lorsque la rupture du CDD est motivée par une faute grave ou lourde du salarié, par une force majeure ou si elle intervient pendant la période d’essai. En revanche, si le salarié démontre que la rupture anticipée résulte d’une faute de l’employeur (non-paiement du salaire, modification abusive du contrat), il peut réclamer la prime et des dommages et intérêts. La rupture amiable, validée par un accord écrit entre les parties, n’est pas une cause d’exonération : l’indemnité est due sauf disposition expresse du protocole de rupture.

3️⃣ Quelle est la règle pour les étudiants qui travaillent sous CDD ?
Le CDD étudiant est un cas fréquent : de nombreux jeunes signent un contrat pour occuper un emploi saisonnier ou un job d’été. L’article L1243-10 et la jurisprudence (Cons. Const., déc. n°2014-401 QPC et CJUE, affaire C-432/14) confirment que la prime de précarité n’est pas versée si le CDD est conclu pendant les vacances scolaires ou universitaires, à condition que l’étudiant poursuive ses études ensuite. La logique est que l’activité est provisoire et intégrée dans un parcours d’études, et ne place donc pas l’étudiant dans une situation de précarité durable. À l’inverse, si un jeune diplômé signe un CDD après la fin de ses études, la prime est due, sauf si le contrat relève d’un CDD saisonnier ou d’un contrat aidé.

4️⃣ Quelle différence entre un CDD saisonnier et un contrat d’intérim pour la prime de précarité ?
Les travailleurs saisonniers ne touchent pas la prime de précarité, sauf clause plus favorable prévue par une convention collective ou un accord de branche. Par exemple, le travail dans une station de ski, les vendanges ou l’hôtellerie estivale sont régis par des CDD saisonniers (article L1242-2 du Code du travail). Ces contrats sont encadrés car l’activité est répétitive chaque année et la précarité est inhérente à la nature du poste.
En revanche, le contrat de mission (intérim) est régi par les articles L1251-1 et suivants et donne droit à une indemnité de fin de mission égale à 10 % de la rémunération brute totale, sauf si l’intérimaire refuse un CDI équivalent proposé par l’entreprise utilisatrice ou l’agence d’intérim (article L1251-32). L’objectif est de compenser l’instabilité du travail temporaire et d’inciter les entreprises à embaucher en CDI.

5️⃣ Que faire si l’employeur ne respecte pas le versement de la prime de précarité ?
Le salarié peut d’abord vérifier son contrat de travail, ses bulletins de salaire, et consulter sa convention collective pour s’assurer qu’aucune disposition particulière ne le prive de la prime. En cas de non-paiement injustifié, il doit adresser à l’employeur une lettre recommandée avec accusé de réception pour exiger la régularisation. À défaut de réponse, le salarié dispose de 3 ans pour agir devant le Conseil de prud’hommes (article L3245-1 du Code du travail). La saisine est gratuite et peut permettre d’obtenir la prime, des intérêts de retard et, le cas échéant, des dommages et intérêts pour préjudice subi. Pour rédiger une mise en demeure conforme ou saisir le juge, defendstesdroits.fr met à disposition des modèles de lettres, des explications juridiques et un accompagnement personnalisé par un professionnel du droit.

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