Le travail saisonnier occupe une place à part dans le droit du travail français, notamment dans les secteurs où l’activité dépend des cycles naturels ou des pics touristiques.
Si le contrat à durée déterminée (CDD) ouvre en principe droit à une indemnité de fin de contrat — communément appelée prime de précarité —, le cas particulier des emplois saisonniers suscite régulièrement des interrogations tant pour les employeurs que pour les salariés.
Quelles sont les règles applicables ? Quelles conditions doivent être réunies pour prétendre à cette prime ? Le présent article de defendstesdroits.fr fait le point sur le régime juridique encadrant la prime de précarité des travailleurs saisonniers, en s’appuyant sur les textes législatifs et la jurisprudence récente.
En droit du travail, la prime de précarité est une indemnité spécifique versée au salarié à l’issue d’un contrat à durée déterminée (CDD) pour compenser l’absence de sécurité d’emploi. L’article L1243-8 du Code du travail précise que cette indemnité est due, sauf exceptions, lorsque le salarié ne se voit pas proposer un contrat à durée indéterminée (CDI) pour occuper le même emploi ou un emploi similaire, avec une rémunération au moins équivalente.
Le montant de cette indemnité est en principe fixé à 10 % de la rémunération totale brute versée pendant la durée du contrat. Toutefois, ce taux peut être réduit à 6 % lorsqu’un accord ou une convention collective prévoit une action de formation pour le salarié concerné.
L’article L1243-10 du Code du travail écarte expressément le bénéfice de la prime de précarité pour les emplois à caractère saisonnier. La notion de travail saisonnier est définie par l’article L1242-2 du Code du travail, qui évoque les emplois dont les tâches se répètent chaque année à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs.
Ainsi, les secteurs les plus concernés sont l’agriculture, les industries agroalimentaires et le tourisme. C’est le cas notamment des vendanges (référence : articles L718-4 et suivants du Code rural et de la pêche maritime) ou des activités sportives saisonnières comme les moniteurs de ski ou les surveillants de plages.
La logique du législateur est claire : la prime de précarité vise à indemniser la situation de précarité subie par le salarié qui n’a pas de perspectives de poursuite de contrat. Or, dans le cadre des emplois saisonniers, la répétition cyclique et prévisible des tâches rend la précarité moins forte, puisque le retour de ces emplois est lié au cycle naturel de l’activité.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 18 décembre 2019 (Cass. Soc., 18 décembre 2019, n° 18-21870), rappelle que le recours à un CDD saisonnier suppose que le poste occupé soit strictement lié à une variation saisonnière et non à une activité durable déguisée.
Au-delà des contrats saisonniers, le Code du travail prévoit d’autres hypothèses d’exclusion de l’indemnité de fin de contrat :
Il est essentiel pour l’employeur comme pour le salarié de bien qualifier la nature du contrat de travail dès la signature. Un emploi n’est pas automatiquement saisonnier simplement parce qu’il est temporaire ou limité dans le temps.
Pour qu’un contrat saisonnier soit valide, il doit impérativement remplir les conditions fixées par la loi et précisées par la jurisprudence :
Un CDD conclu pour faire face à un surcroît temporaire d’activité, pour remplacer un salarié absent ou pour toute autre raison sans lien direct avec une saison, relève en réalité d’un CDD de droit commun.
Dans ce cas, l’article L1243-8 du Code du travail impose à l’employeur de verser la prime de précarité en fin de contrat, sauf exception expresse prévue par la loi.
Il est donc primordial pour le salarié de vérifier la véracité du motif invoqué par l’employeur et de contrôler que la mission confiée correspond bien à une activité saisonnière au sens juridique. Une qualification erronée pourrait ouvrir droit à une requalification du contrat et à l’obtention des indemnités correspondantes devant le Conseil de prud’hommes.
En cas de litige sur le versement de la prime de précarité, le Conseil de prud’hommes est seul compétent pour apprécier la nature réelle du contrat et vérifier si les conditions légales du recours au CDD saisonnier sont effectivement remplies.
Si le salarié estime que son contrat n’a pas respecté les critères légaux du travail saisonnier (absence de tâches réellement saisonnières, activité exercée toute l’année ou emploi durable déguisé), il peut saisir le Conseil pour faire requalifier son contrat en CDD classique et obtenir le paiement de l’indemnité de fin de contrat.
Il est vivement conseillé de préparer tout élément de preuve démontrant le caractère permanent ou non cyclique des missions effectuées (plannings, fiches de poste, attestations).
Par ailleurs, le salarié doit se référer à la convention collective applicable dans l’entreprise : certaines conventions ou accords collectifs peuvent prévoir, par dérogation, le versement d’une prime compensatrice même pour les travailleurs saisonniers. Vérifier ces dispositions est donc essentiel pour défendre ses droits.
Pour engager une procédure prud’homale, l’accompagnement par un avocat en droit du travail ou un conseiller syndical est fortement recommandé pour maximiser ses chances de succès.
Enfin, l’absence de prime de précarité ne signifie pas que le travailleur saisonnier est privé de toute protection sociale à l’issue de son contrat. Comme tout salarié en CDD, il peut bénéficier de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) versée par France Travail (anciennement Pôle emploi), sous réserve de remplir les conditions d’affiliation : avoir travaillé une durée minimale, justifier d’une recherche active d’emploi et être inscrit comme demandeur d’emploi.
Le montant et la durée de cette allocation dépendent notamment du salaire de référence et du nombre de jours travaillés.
Il est donc recommandé au travailleur saisonnier de bien conserver ses bulletins de paie, ses attestations employeur et tout document justificatif pour faciliter son inscription et le calcul de ses droits.
Pour approfondir ces démarches, vérifier vos droits selon votre secteur d’activité ou préparer une éventuelle rupture conventionnelle, retrouvez sur defendstesdroits.fr nos ressources juridiques, modèles de lettres et contrats à jour pour sécuriser vos démarches en toute légalité.
À l’heure où les emplois à caractère saisonnier concernent chaque année des milliers de travailleurs dans l’agriculture, le tourisme ou encore l’événementiel, bien connaître le cadre légal applicable à la prime de précarité est indispensable pour éviter toute contestation.
En cas de doute sur la nature du contrat, sur les droits ouverts ou sur la convention collective applicable, il est toujours possible de se tourner vers un professionnel du droit ou de s’informer grâce aux ressources fiables disponibles sur defendstesdroits.fr.
Un contrat de travail saisonnier est un contrat à durée déterminée conclu pour l’exécution de tâches appelées à se répéter chaque année, à des périodes fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs. Il est encadré par l’article L1242-2 du Code du travail, qui définit précisément les activités saisonnières. Par exemple, le ramassage des vendanges, l’emploi de moniteurs de ski ou l’accueil touristique dans une station balnéaire relèvent du travail saisonnier. L’enjeu est d’éviter les abus de qualification : un emploi permanent ne peut pas être déguisé en contrat saisonnier pour échapper à certaines obligations, notamment la prime de précarité.
En principe, non. La prime de précarité, prévue par l’article L1243-8 du Code du travail, est due aux salariés en CDD pour compenser la précarité de leur situation à la fin du contrat. Cependant, l’article L1243-10 du Code du travail écarte cette indemnité pour les emplois à caractère saisonnier, considérés comme une exception, car ils reposent sur un cycle prévisible et récurrent. Ainsi, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, le salarié saisonnier ne perçoit pas de prime de fin de contrat. Il est donc essentiel de vérifier la nature réelle du poste occupé.
Bien que la règle générale exclue la prime de précarité pour les emplois saisonniers, certaines situations peuvent ouvrir droit à une indemnité. Par exemple, une convention collective ou un accord d’entreprise peut prévoir le versement d’une prime de fin de contrat même pour les saisonniers. De plus, si le contrat ne répond pas réellement aux critères du travail saisonnier (absence de cycle annuel, tâches durables), le salarié peut contester la qualification et réclamer la prime devant le Conseil de prud’hommes. La jurisprudence (Cass. Soc., 18 décembre 2019, n° 18-21870) rappelle l’importance de l’analyse concrète de l’activité exercée.
Outre les emplois saisonniers, d’autres situations excluent le versement de la prime de précarité :
Oui, le travailleur saisonnier reste éligible aux allocations chômage, sous réserve de remplir les conditions d’affiliation fixées par France Travail (ex-Pôle emploi). Le non-versement de la prime de précarité ne prive pas le saisonnier de ses droits à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE). Il doit toutefois justifier d’une durée minimale d’activité sur une période de référence, comme tout autre salarié en CDD. Pour s’assurer de ses droits et éviter toute erreur, il est recommandé de consulter sa convention collective et, si besoin, un avocat en droit du travail via defendstesdroits.fr.