Travail

Congé de deuil et congés décès : droits légaux et pratiques pour salariés

Estelle Marant
Collaboratrice
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Décès d’un proche : combien de jours de congés prévus par la loi ?

La perte d’un proche est un événement bouleversant qui appelle à un temps de recueillement et d’organisation familiale. Le droit du travail prend en considération cette réalité en accordant aux salariés des congés pour décès, également appelés congés exceptionnels pour événements familiaux. Ces absences visent à permettre au salarié de gérer à la fois sa douleur et les démarches liées au décès, sans craindre de perdre son emploi ni sa rémunération.

Ce dispositif, prévu par le Code du travail, fixe un socle minimal de droits, mais il peut être amélioré par les conventions collectives ou accords collectifs applicables dans chaque entreprise. Selon le lien de parenté qui unit le salarié au défunt, le nombre de jours varie, avec une attention particulière accordée au décès d’un enfant, qui ouvre droit à un régime spécifique.

L’article qui suit, proposé par defendstesdroits.fr, expose de manière complète les droits des salariés : nombre de jours de congés en fonction du lien familial, conditions d’octroi, démarches pratiques à effectuer, articulation avec les congés payés et règles de rémunération.

Sommaire

  1. Quels sont les droits des salariés en matière de congé pour décès ?
  2. Décès d’un enfant : jours de congés et congé de deuil
  3. Décès d’un conjoint, d’un parent ou d’un membre de la famille proche
  4. Décès d’un proche : quelles démarches effectuer auprès de l’employeur ?
  5. Quel impact des congés décès sur les congés payés annuels ?
  6. Comment est rémunéré le salarié pendant ses congés décès ?
  7. Le rôle des conventions collectives dans l’amélioration des droits
  8. Conclusion

Quels sont les droits des salariés en matière de congé pour décès ?

Principe légal

L’article L3142-1 du Code du travail accorde aux salariés des congés exceptionnels lorsqu’ils traversent un événement familial important : mariage, naissance, adoption, ou décès d’un proche. Ces congés sont un droit, et non une faveur accordée par l’employeur.

Tous les salariés, quelle que soit la nature de leur contrat (CDI, CDD, apprentissage, temps partiel) ou leur ancienneté, peuvent en bénéficier.

Articulation avec les conventions collectives

Le nombre de jours fixé par la loi constitue un minimum obligatoire. Toutefois, les conventions collectives peuvent prévoir des durées plus longues ou des conditions plus favorables, conformément à l’article L3142-4 du Code du travail. Par conséquent, il est essentiel de vérifier le texte conventionnel applicable pour connaître l’étendue exacte de ses droits.

Décès d’un enfant : jours de congés et congé de deuil

Le décès d’un enfant est le cas le plus douloureux et celui qui ouvre droit au plus grand nombre de jours.

  • Décès d’un enfant (cas général) : 12 jours ouvrables.
  • Décès d’un enfant de moins de 25 ans : 14 jours.
  • Décès d’un enfant lui-même parent, quel que soit son âge : 14 jours.
  • Décès d’une personne de moins de 25 ans à la charge effective et permanente du salarié : 14 jours.

À ces congés exceptionnels s’ajoute le congé de deuil, prévu par l’article L3142-1-1 du Code du travail, d’une durée de 8 jours. Ce congé est fractionnable en deux périodes d’au moins une journée et doit être pris dans l’année qui suit le décès. Il est cumulable avec les jours exceptionnels, ce qui peut porter le total à 22 jours.

Décès d’un conjoint, d’un parent ou d’un membre de la famille proche

Jours prévus par la loi

  • Décès du conjoint, concubin ou partenaire de PACS : 3 jours.
  • Décès du père ou de la mère : 3 jours.
  • Décès du beau-père ou de la belle-mère : 3 jours (au sens de parents du conjoint, selon la Cour de cassation, arrêt du 14 mars 1985, n°83-43443).
  • Décès d’un frère ou d’une sœur : 3 jours.

Autres membres de la famille

La loi ne prévoit aucun droit spécifique pour le décès d’un grand-parent, d’un oncle, d’une tante, etc. Néanmoins, certaines conventions collectives accordent des droits supplémentaires.
Exemple : la Convention collective Syntec (article 5-7) accorde 2 jours ouvrés pour le décès d’un ascendant autre que les parents.

Quelles démarches pour bénéficier du congé décès ?

Le salarié doit informer son employeur de son absence et présenter un justificatif, généralement une copie de l’acte ou du certificat de décès. Il peut le faire par écrit (courrier ou email) ou oralement, selon les usages de l’entreprise.

Le congé doit être pris dans un délai raisonnable entourant l’événement, conformément à la jurisprudence (Cass. Soc., 16 décembre 1998, n°96-43323). En revanche, s’il ne fait pas valoir son droit, il ne peut exiger une indemnisation ultérieure (Cass. Soc., 22 décembre 1988, n°87-43289).

En cas de refus de l’employeur, le salarié peut saisir le Conseil de prud’hommes en procédure accélérée.

Congés décès et impact sur les congés payés

L’article L3142-2 du Code du travail établit clairement que les jours de congés pour décès sont assimilés à du temps de travail effectif. Cette qualification juridique n’est pas neutre : elle entraîne plusieurs conséquences favorables pour le salarié, que l’employeur doit respecter strictement.

Maintien des droits à congés payés annuels

En étant comptabilisés comme du temps de travail effectif, les jours de congés décès :

  • ouvrent droit à congés payés annuels au même titre que des jours travaillés ;
  • sont pris en compte pour le calcul de l’ancienneté du salarié, ce qui impacte positivement ses droits futurs (prime d’ancienneté, indemnité de licenciement, etc.).

Ainsi, un salarié qui bénéficie d’un congé décès ne subit aucune perte sur son compteur de congés payés et continue d’acquérir des droits comme s’il avait travaillé.

Interdiction de déduire les congés décès du contingent annuel

La loi précise également que les jours octroyés au titre du décès d’un proche ne peuvent pas être imputés sur le contingent des congés payés légaux (5 semaines par an). Il s’agit d’un droit autonome, distinct des congés payés ordinaires ou des RTT.

En pratique, cela signifie que l’employeur ne peut pas considérer que ces jours spéciaux remplacent une partie des congés annuels du salarié. Une telle pratique constituerait une violation du droit du travail et pourrait être contestée devant le Conseil de prud’hommes.

Sécurisation de la protection du salarié

Cette assimilation protège également le salarié contre toute tentative de sanction ou de pénalisation indirecte. Par exemple :

  • l’absence au titre d’un congé décès ne peut pas être qualifiée d’absence injustifiée ;
  • elle ne peut pas être utilisée comme motif pour limiter une promotion ou remettre en cause une prime liée à la présence ;
  • elle n’a aucun effet négatif sur le calcul des droits liés au compte épargne-temps ou aux dispositifs similaires.

En d’autres termes, le salarié conserve l’intégralité de ses droits sociaux malgré l’absence.

Importance des conventions collectives

Certaines conventions collectives vont encore plus loin et prévoient que les jours de congés décès sont non seulement assimilés à du temps de travail effectif, mais également pris en charge de manière plus favorable (maintien total de salaire, extension de la durée, etc.). Le salarié doit donc impérativement vérifier sa convention collective pour savoir si des droits supplémentaires s’appliquent.

Rémunération pendant les congés décès

Les jours de congés décès sont rémunérés comme si le salarié travaillait. Le salarié perçoit donc son salaire habituel, sans retenue.

Une particularité concerne le congé de deuil : il ouvre droit à des indemnités journalières de Sécurité sociale, qui peuvent être complétées par l’employeur via le mécanisme de la subrogation. Ces indemnités ne sont pas cumulables avec celles des congés maladie, maternité, paternité, adoption ou accident du travail.

Certaines conventions collectives prévoient en outre le versement d’allocations obsèques, comme c’est le cas dans la Convention collective de l’automobile.

Conclusion

Le congé pour décès est l’une des protections essentielles prévues par le Code du travail afin de permettre aux salariés de faire face à l’épreuve de la perte d’un proche. Loin d’être un simple aménagement technique du temps de travail, il répond à une réalité humaine et sociale forte : laisser au salarié le temps nécessaire pour se recueillir, accompagner sa famille et accomplir les démarches liées au décès.

Le législateur a fixé un socle minimal de droits, en distinguant selon le lien de parenté. Ainsi, la loi accorde 3 jours en cas de décès du conjoint, d’un parent ou d’un frère ou sœur, et va jusqu’à 12 ou 14 jours en cas de perte d’un enfant, auxquels s’ajoute le congé de deuil de 8 jours. Ces droits sont d’ordre public minimal et peuvent donc être étendus par les conventions collectives ou accords collectifs, qui jouent un rôle déterminant dans la protection des salariés.

La jurisprudence est venue préciser les contours de ce droit : le congé doit être pris dans un délai raisonnable entourant l’événement (Cass. Soc., 16 décembre 1998, n°96-43323), l’employeur ne peut pas le refuser si les conditions légales sont remplies, et en cas de litige, le salarié peut saisir le Conseil de prud’hommes en procédure accélérée.

Autre élément important : les jours de congé pour décès sont rémunérés et assimilés à du temps de travail effectif. Ils ne réduisent donc pas les droits à congés payés annuels. Dans le cadre spécifique du congé de deuil, le salarié bénéficie d’indemnités journalières de la Sécurité sociale, éventuellement complétées par l’employeur.

Il convient enfin de rappeler que certaines conventions collectives prévoient des droits supplémentaires : extension du nombre de jours, maintien renforcé de salaire, versement d’allocations obsèques. Vérifier la convention applicable à son entreprise est donc une étape indispensable pour connaître l’intégralité de ses droits.

En définitive, le congé décès illustre l’équilibre entre les exigences de la vie professionnelle et les réalités personnelles et familiales. Il garantit aux salariés la possibilité de traverser une période douloureuse dans des conditions plus dignes et sécurisées, en associant le respect de la vie privée et la protection de la situation professionnelle.

FAQ

1. Quelle est la durée légale du congé en cas de décès d’un proche ?

Le Code du travail (article L3142-1) prévoit un nombre de jours variable selon le lien de parenté :

  • 3 jours ouvrables pour le décès du conjoint, du partenaire de PACS, du concubin, d’un parent (père ou mère), du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur.
  • 12 jours ouvrables pour le décès d’un enfant.
  • 14 jours ouvrables pour le décès d’un enfant âgé de moins de 25 ans, d’un enfant quel que soit son âge s’il était parent, ou d’une personne de moins de 25 ans à la charge effective et permanente du salarié.

Ces jours constituent un minimum légal et sont accordés indépendamment de l’ancienneté ou du type de contrat (CDI, CDD, temps partiel, apprentissage). En cas de dispositions conventionnelles plus favorables, c’est la convention collective qui s’applique.

2. Qu’est-ce que le congé de deuil et qui peut en bénéficier ?

Le congé de deuil est prévu par l’article L3142-1-1 du Code du travail. Il concerne les salariés confrontés au décès :

  • d’un enfant de moins de 25 ans ;
  • ou d’une personne de moins de 25 ans à leur charge effective et permanente.

Ce congé est d’une durée de 8 jours, qui peuvent être pris de manière continue ou fractionnée en deux périodes d’au moins une journée. Il doit être utilisé dans l’année qui suit le décès.

Il s’ajoute aux jours de congé décès déjà prévus par la loi. Ainsi, un salarié confronté à la perte d’un enfant de moins de 25 ans bénéficie de 14 jours de congé décès + 8 jours de congé de deuil, soit un total de 22 jours.

3. L’employeur peut-il refuser un congé pour décès ?

Non. Le congé pour décès est un droit impératif pour le salarié. Dès lors que celui-ci justifie la situation par un document officiel (acte ou certificat de décès), l’employeur doit accorder les jours correspondants.

La jurisprudence a confirmé que le salarié n’est pas obligé de prendre ces jours, mais s’il les demande, l’employeur ne peut pas les lui refuser (Cass. Soc., 22 décembre 1988, n°87-43289). En cas de refus, le salarié peut saisir le Conseil de prud’hommes en référé, qui statue rapidement (articles L3142-3 et R3142-1).

Par ailleurs, la Cour de cassation (Cass. Soc., 16 décembre 1998, n°96-43323) a précisé que ces congés doivent être pris dans une période raisonnable entourant l’événement.

4. Les congés pour décès sont-ils rémunérés ?

Oui, le salarié conserve l’intégralité de sa rémunération habituelle durant ses congés décès. Ces jours sont considérés comme du temps de travail effectif (article L3142-2 du Code du travail), ce qui signifie qu’ils n’entraînent aucune retenue de salaire et qu’ils comptent pour l’acquisition des congés payés annuels.

Concernant le congé de deuil, il ouvre droit à des indemnités journalières de Sécurité sociale (IJSS), calculées selon les mêmes règles que les congés maternité (article L331-9 du Code de la Sécurité sociale). L’employeur peut compléter ces indemnités afin d’assurer un maintien de salaire, souvent via le mécanisme de la subrogation.

À noter que les IJSS du congé de deuil ne sont pas cumulables avec celles versées au titre de la maladie, de la maternité, du congé paternité ou adoption, ni avec celles liées aux accidents du travail.

5. Les conventions collectives peuvent-elles accorder plus de jours ?

Oui, de nombreuses conventions collectives élargissent les droits légaux. Elles peuvent :

  • allonger le nombre de jours (parfois jusqu’à 15 jours) ;
  • étendre les bénéficiaires (par exemple en incluant les grands-parents, oncles, tantes) ;
  • prévoir un maintien intégral du salaire même pendant le congé de deuil ;
  • accorder des allocations spécifiques comme une aide financière ou une indemnité obsèques.

Exemple : la Convention Syntec accorde 2 jours ouvrés pour le décès d’un ascendant autre que les parents. Dans le secteur automobile, certaines dispositions prévoient le versement d’une allocation obsèques.

C’est pourquoi il est indispensable pour chaque salarié de consulter la convention collective applicable à son entreprise afin de connaître ses droits exacts et de vérifier si des dispositions plus favorables s’appliquent.

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