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Congé parental remplacé : ce que le gouvernement veut changer

Jordan Alvarez
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Réforme du congé parental : ce que Macron prévoit pour 2025

Dans un contexte de déclin démographique préoccupant, la politique familiale française s’apprête à connaître un tournant majeur. Le congé parental d’éducation, tel que nous le connaissons depuis plusieurs décennies, pourrait bientôt céder la place à un nouveau congé de naissance plus court, mieux rémunéré et pensé pour encourager une répartition plus équilibrée des responsabilités parentales.

Portée par le Président de la République, cette réforme vise à relancer la natalité, tout en corrigeant les déséquilibres professionnels persistants entre les sexes.

Mais que recouvre précisément cette proposition ? Quelles en seraient les modalités concrètes, et surtout, quels impacts pour les salariés comme pour les entreprises ? À travers une lecture juridique rigoureuse, nous décryptons les contours de ce projet et ses conséquences potentielles pour le droit du travail français.

Sommaire

  1. Introduction
  2. Réformer le congé parental pour stimuler la natalité
  3. Une entrée en vigueur reportée à une date incertaine
  4. Ce qui distingue le nouveau congé de naissance des congés actuels
  5. Un fonctionnement repensé pour un meilleur équilibre parental
  6. Une rémunération plus attractive pour les bénéficiaires
  7. Le congé de naissance pourra-t-il être refusé par l’employeur ?
  8. Conclusion

Réformer le congé parental pour stimuler la natalité

Face à une chute préoccupante du taux de natalité – 1,63 enfant par femme en 2023 selon l’Insee – le gouvernement cherche à poser les bases d’un réarmement démographique. L’une des pistes phares de l’exécutif est la suppression du congé parental d’éducation au profit d’un nouveau congé de naissance, jugé plus court, mieux indemnisé, et donc plus accessible.

La législation actuelle encadre le congé parental d’éducation par les articles L1225-47 à L1225-66 du Code du travail. Ce congé permet à un salarié de cesser ou de réduire son activité à la suite de la naissance (ou adoption) d’un enfant, pour une durée pouvant aller jusqu’à trois ans, avec une indemnisation très faible versée par la Caisse d’allocations familiales (CAF).

Ce dispositif, bien que protecteur en théorie, est sous-utilisé : mal rémunéré, trop long, et majoritairement pris par les mères, il contribue à creuser les inégalités professionnelles entre les sexes. C’est dans ce contexte que le président de la République, Emmanuel Macron, a proposé de le remplacer par un congé de naissance plus court mais mieux indemnisé.

Une entrée en vigueur reportée à une date incertaine

Initialement envisagée pour la fin de l’année 2025, la réforme du congé parental d’éducation devait faire l’objet d’une inscription dans le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour l’année 2025. Cette inscription était essentielle pour permettre une entrée en vigueur rapide et structurée de ce nouveau congé de naissance dès le second semestre 2025, conformément aux objectifs affichés par l’exécutif.

Cependant, plusieurs événements politiques majeurs ont perturbé le calendrier législatif. La dissolution de l’Assemblée nationale, suivie de la nomination d’un nouveau gouvernement dirigé par Michel Barnier, a profondément modifié les priorités du Parlement. Dans ce contexte, la réforme n’a pas été inscrite dans le PLFSS 2025, ce qui a mécaniquement repoussé sa mise en œuvre.

Malgré ce contretemps, le ministère des Solidarités a rapidement indiqué que la réforme n’était ni abandonnée ni enterrée. Toutefois, elle ne serait pas appliquée sous la forme initialement envisagée en début d’année 2024. En d’autres termes, le contenu même de la réforme pourrait évoluer, en fonction des arbitrages politiques et des discussions en cours avec les partenaires sociaux.

Le 3 mars 2025, lors d’un déplacement dans la Manche, Aurore Bergé, ministre déléguée chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, a relancé publiquement le débat.

Elle a affirmé vouloir "avancer sur ce projet", précisant que le gouvernement entendait ouvrir une phase de négociation approfondie avec les organisations syndicales et patronales. Cette concertation vise à définir un dispositif équilibré, acceptable à la fois pour les salariés et les employeurs, et conforme aux objectifs de politique familiale poursuivis.

En l’absence d’un calendrier précis, il demeure à ce jour incertain que le nouveau congé de naissance entre en vigueur dès 2026, même si cette échéance reste probable si un consensus législatif est trouvé d’ici la fin de l’année 2025. Les discussions actuellement en cours pourraient aboutir à un projet de loi spécifique, ou à une intégration différée dans un futur PLFSS, selon les choix stratégiques du gouvernement.

Ce qui distingue le nouveau congé de naissance des congés actuels

Le nouveau congé de naissance tel qu’envisagé par l’exécutif ne doit en aucun cas être confondu avec les dispositifs déjà existants dans le Code du travail. Il s’agit d’un dispositif autonome, distinct dans sa finalité, sa durée et ses modalités d’indemnisation. Il viendrait s’ajouter aux droits existants en matière de congé familial, tout en remplaçant le congé parental d’éducation dans sa forme actuelle.

Il convient ainsi de le distinguer clairement de :

  • L’article L3142-1 du Code du travail, qui prévoit 3 jours de congé exceptionnel pour la naissance d’un enfant. Ce congé s’applique à tout salarié dont l’enfant vient de naître, et peut être pris immédiatement. Il est considéré comme un événement familial et n’est pas soumis à conditions d’ancienneté ni à une indemnisation spécifique, puisqu’il est rémunéré intégralement par l’employeur comme du temps de travail effectif.
  • Le congé de paternité, régi par l’article L1225-35 du Code du travail, d’une durée de 25 jours calendaires (ou 32 jours en cas de naissances multiples), doit être pris dans un délai de six mois suivant la naissance. Ce congé, pris dans la foulée des 3 jours de naissance, est rémunéré par la Sécurité sociale sous forme d’indemnités journalières, sous réserve de certaines conditions d’ouverture de droits.

Le nouveau congé de naissance, en revanche, aurait pour vocation de :

  • Remplacer le congé parental d’éducation, souvent jugé trop long et mal indemnisé.
  • Être pris dans la première année de l’enfant, et non jusqu’à ses trois ans.
  • Être partagé entre les deux parents, et non attribué à l’un ou l’autre de manière exclusive.
  • Être mieux indemnisé, sur la base d’un pourcentage du salaire, ce qui le rendrait plus attractif et accessible à un plus grand nombre de foyers.

Enfin, ce congé viendrait compléter sans supprimer les autres dispositifs : il s’ajouterait au congé maternité (prévu aux articles L1225-17 et suivants du Code du travail) et au congé de paternité, formant ainsi un ensemble cohérent destiné à mieux accompagner les parents dans les premiers mois de la vie de l’enfant, tout en préservant l’activité professionnelle des deux parents.

Un fonctionnement repensé pour un meilleur équilibre parental

La principale innovation réside dans la durée du congé : le gouvernement propose une période de 6 mois, à partager entre les deux parents. Contrairement au congé parental qui pouvait s’étendre jusqu’aux 3 ans de l’enfant, ce nouveau congé devra être pris dans la première année suivant la naissance.

Autrement dit, il ne s’agira pas de 6 mois par parent, mais d’un quota commun à répartir : par exemple, 3 mois pour chacun des deux parents. Ce partage obligatoire vise à encourager la prise de congé par les pères, et à réduire la pénalisation professionnelle des femmes.

Ce dispositif se rapprocherait ainsi des systèmes scandinaves, où les congés parentaux sont partagés pour garantir un équilibre des responsabilités parentales et limiter l’impact sur les carrières féminines.

Une rémunération plus attractive pour les bénéficiaires

L’une des critiques majeures du congé parental actuel réside dans sa faible indemnisation. En 2024, la PreParE versée par la CAF oscillait entre 167 € et 448 € par mois selon le temps de travail maintenu – des montants jugés insuffisants pour compenser une perte de salaire.

Le nouveau congé de naissance serait quant à lui indemnisé à hauteur de 50 % du salaire, dans la limite de 1 900 € mensuels, pris en charge par la Sécurité sociale. Cette indemnité journalière proportionnelle au revenu s’éloignerait du modèle de prestation forfaitaire et favoriserait un accès plus équitable entre les foyers modestes et les classes moyennes.

Par ailleurs, l’indemnisation pourrait éventuellement être complétée par l’employeur, notamment dans les entreprises déjà dotées d’accords collectifs favorables à la parentalité, conformément aux dispositions de l’article L911-1 du Code de la sécurité sociale.

Le congé de naissance pourra-t-il être refusé par l’employeur ?

À ce jour, aucune disposition légale précise n’a été arrêtée concernant les modalités pratiques de ce futur congé. Plusieurs incertitudes demeurent :

  • Le salarié pourra-t-il choisir librement les dates de départ ?
  • Un préavis sera-t-il imposé ?
  • L’accord de l’employeur sera-t-il requis ?
  • L’entreprise pourra-t-elle en différer l’octroi ?

Une chose semble acquise : le congé de naissance ne serait pas obligatoire, mais optionnel, à la discrétion des parents. Toutefois, son impact organisationnel sur les entreprises, notamment en cas de remplacement temporaire, devra faire l’objet de discussions dans le cadre du dialogue social.

Les modalités définitives pourraient s’inspirer des règles encadrant actuellement le congé parental d’éducation (préavis de 1 à 2 mois selon l’article L1225-51 du Code du travail) ou encore celles du congé paternité, qui impose un délai de prévenance d’un mois.

Conclusion

Le passage du congé parental d’éducation à un congé de naissance plus court mais mieux indemnisé illustre une volonté politique de réconcilier temps parental et parcours professionnel.

Si l’ambition affichée est de favoriser l’implication des deux parents dès la première année de l’enfant, les modalités pratiques de cette réforme restent à affiner, tant en ce qui concerne l’articulation avec les autres congés familiaux, que les droits et obligations des employeurs et des salariés.

En l’absence de texte législatif à ce jour, l’insécurité juridique persiste, mais les principes esquissés laissent entrevoir une réforme structurante du droit du travail, à suivre de près sur defendstesdroits.fr.

FAQ

1. Pourquoi le gouvernement souhaite-t-il remplacer le congé parental d’éducation par un congé de naissance ?

Le congé parental d’éducation actuel, prévu par les articles L1225-47 à L1225-66 du Code du travail, est jugé trop long (jusqu’à trois ans) et insuffisamment indemnisé. En effet, la prestation versée dans ce cadre (PreParE) atteint au maximum 448,43 € par mois, ce qui représente un frein majeur pour de nombreux foyers, notamment les classes moyennes, qui renoncent à ce droit faute de moyens financiers. Ce dispositif est par ailleurs majoritairement pris par les femmes, ce qui accentue les inégalités de carrière entre les sexes. L’objectif de la réforme est donc double : stimuler la natalité en France (en forte baisse) et favoriser une répartition plus équilibrée des responsabilités parentales, en rendant le dispositif plus attractif, plus court et mieux rémunéré.

2. Quelle serait la durée du nouveau congé de naissance envisagé ?

Contrairement au congé parental d’éducation actuel, le nouveau congé de naissance serait limité à 6 mois. Cette durée ne serait pas accordée individuellement à chaque parent, mais à répartir entre les deux membres du couple. Par exemple, un père et une mère pourraient chacun prendre 3 mois consécutifs ou alternés, dans la première année de vie de l’enfant. Ce caractère non-cumulatif vise à inciter une prise équilibrée entre les deux parents, en suivant l’exemple de certains pays nordiques. Le congé de naissance serait ainsi complémentaire au congé maternité et au congé paternité, sans les remplacer.

3. Quelle rémunération est prévue pour le nouveau congé de naissance ?

L’une des innovations majeures de la réforme réside dans le mode d’indemnisation du nouveau congé de naissance. Alors que le congé parental est aujourd’hui indemnisé de manière forfaitaire, le nouveau dispositif prévoirait une indemnité journalière équivalente à 50 % du salaire antérieur, plafonnée à 1 900 € par mois, et versée par la Sécurité sociale. Ce système se rapprocherait de celui appliqué pour le congé maternité (articles L331-3 et suivants du Code de la sécurité sociale). Il pourrait être complété par l’employeur via des accords collectifs, garantissant ainsi un maintien de revenu partiel voire total pour les bénéficiaires.

4. Le nouveau congé de naissance serait-il obligatoire pour les salariés ?

Non, le congé de naissance ne serait pas obligatoire. Il s’agirait d’un droit optionnel, que chaque parent pourrait exercer ou non. À ce jour, les textes envisagés ne précisent pas encore les modalités de prise (préavis, conditions d’accord, date de demande, etc.). Toutefois, le gouvernement a indiqué vouloir associer les partenaires sociaux à sa mise en œuvre, ce qui laisse entendre que des règles souples et encadrées seront prévues, tant pour protéger les droits des salariés que pour organiser l’absence au sein des entreprises. En revanche, aucune disposition légale ne permettrait à l’employeur de s’y opposer de manière discrétionnaire, comme c’est déjà le cas pour le congé parental.

5. Quand le nouveau congé de naissance entrera-t-il en vigueur ?

Initialement envisagée pour la fin de l’année 2025, l’entrée en vigueur du nouveau congé de naissance a été retardée en raison de l’instabilité politique (dissolution de l’Assemblée nationale, changement de gouvernement). Le projet n’a finalement pas été inscrit dans le PLFSS 2025, mais il reste à l’étude. La ministre Aurore Bergé a réaffirmé, le 3 mars 2025, que le dispositif faisait toujours l’objet de discussions avec les partenaires sociaux. Il est donc probable que la réforme soit mise en œuvre à l’horizon 2026, sous réserve d’un consensus parlementaire et syndical suffisant. Les professionnels comme les salariés devront donc rester attentifs à son évolution.

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