Malade pendant les congés : le droit au report confirmé
Jusqu’ici, beaucoup d’entreprises considéraient qu’un arrêt maladie survenant pendant des congés payés ne “rendait” pas les jours déjà posés, sauf textes internes plus favorables. La Cour de cassation dit désormais l’inverse : le salarié qui justifie d’un arrêt maladie tombant pendant ses congés a droit au report des jours correspondants, à prendre ultérieurement.
Concrètement, que faut-il faire ?
Informer l’employeur sans tarder (idéalement dès le premier jour de l’arrêt), par les voies habituelles de l’entreprise.
Transmettre l’arrêt médical dans les délais usuels.
Demander le report des jours impactés : ils reviennent alors dans le compteur et seront reprogrammés.
Ce que cela implique pour le salarié
Les jours de repos “perdus” pendant la maladie ne disparaissent plus.
Les dates de report sont à fixer ultérieurement selon les règles ordinaires de prise des congés (délai de prévenance, période de référence, etc.).
Si la maladie se prolonge au-delà des congés initialement prévus, toute la période concernée est neutralisée au profit d’un report.
Ce que cela implique pour l’employeur
Adapter les procédures internes pour enregistrer rapidement ces situations (SIRH, paie, notes RH).
Prévoir une traçabilité : date d’information, justificatifs reçus, jours réintégrés au compteur.
Anticiper la reprogrammation : le salarié ne reprend pas automatiquement ses congés à la fin de l’arrêt, il a un droit au report, à positionner plus tard.
À retenir : l’entreprise ne discute pas l’opportunité du report lorsqu’un arrêt maladie est dûment constaté pendant des congés payés. Elle organise ce report.
Déclenchement des heures supplémentaires : les congés payés comptent désormais
Deuxième évolution du 10 septembre 2025 : les jours de congés payés sont pris en compte dans le seuil hebdomadaire de 35 heures pour déclencher les heures supplémentaires. Autrement dit, même si le salarié n’a pas “travaillé” 35 heures effectives parce qu’il a posé un jour de congé, ce jour est assimilé à du temps de travail pour apprécier si les heures effectuées au-delà relèvent des heures supplémentaires.
Pourquoi c’est important ?
Dans de nombreuses organisations, les heures sup sont déclenchées à la semaine. Jusqu’alors, une semaine contenant un jour de congé pouvait mécaniquement réduire le total d’heures “effectives”, décalant le déclenchement des heures supplémentaires. Désormais, le congé se comptera comme du temps travaillé pour la seule appréciation de ce seuil.
Exemple simple
Horaire collectif : 35 h / semaine.
Le salarié pose 1 jour de congé (7 h). Il travaille 4 jours et effectue 8 h le jeudi (soit +1 h) et 9 h le vendredi (soit +2 h).
Total d’heures effectives : 31 h (car 7 h de congé ne sont pas “travaillées”).
Avec les nouvelles règles : on ajoute les 7 h de congé pour le seuil de déclenchement. On considère donc 38 h “pour le seuil” : 3 h au-delà de 35 deviennent des heures supplémentaires (majorées selon la convention applicable).
Effets pratiques
Paie : reparamétrer les compteurs pour que les CP “alimentent” le seuil hebdomadaire.
Gestion des plannings : une semaine “morcelée” par un congé n’est plus une semaine “inertée” pour les heures sup.
Dialogue social : informer le CSE, vérifier les accords d’entreprise et mettre à jour les notes de service.
À retenir : le congé payé ne devient pas du “travail effectif” pour tout (ancienneté, repos compensateur, etc.) ; il compte uniquement pour savoir quand les heures supplémentaires se déclenchent.
Pourquoi ces changements maintenant ?
Le droit européen reconnaît depuis longtemps un droit effectif au repos annuel, incompatible avec la perte de droits du fait d’une maladie surgie pendant les vacances. De même, l’approche européenne de la durée du travail invite à ne pas pénaliser le salarié dans le déclenchement des heures supplémentaires lorsqu’il exerce des droits à congés. Les décisions du 10 septembre 2025 harmonisent donc la lecture nationale avec cette logique de protection, tout en apportant de la prévisibilité.
Impacts immédiats pour les entreprises
a) Paie et SIRH
Mettre à jour les règles d’agrégation hebdomadaire : congés payés inclus dans le seuil de 35 h.
Créer un motif spécifique pour le “report de CP pour cause maladie” avec réintégration automatique des droits.
Revoir les tests de cohérence (heures sup anormalement basses/élevées les semaines avec CP).
b) Processus RH
Prévoir une procédure de notification simple (email dédié, formulaire SIRH).
Délai de traitement accéléré : re-créditer les droits sans attendre la fin de la période de référence.
Informer les managers : ils doivent accepter le report et replanifier avec le salarié.
c) Communication & conformité
Diffuser une note d’information aux salariés.
Vérifier l’accord d’entreprise ou la convention collective : si un texte interne est moins favorable, il doit s’écarter au profit des décisions de la Cour.
Former la paie et l’ADV RH sur les cas limites (mi-temps thérapeutique, fractionnement, fermeture d’établissement).
Impacts concrets pour les salariés
Sécurité des droits à repos : tomber malade pendant ses congés n’entraîne plus de perte sèche de jours.
Rémunération : les heures en plus dans une semaine comportant des CP peuvent ouvrir droit aux majorations.
Dialogue plus simple : un cadre clair pour prévenir l’employeur et reprogrammer ses congés.
Conseil pratique : gardez la preuve de l’information envoyée à l’employeur (email, accusé de réception) et conservez les justificatifs médicaux. Pour la paie, vérifiez vos bulletins lors des semaines “mixtes” (travail + CP).
Trois cas d’école pour se repérer
Cas n°1 — Arrêt maladie en plein milieu des vacances
CP initialement du 1er au 14 août. Arrêt maladie du 5 au 12 août.
Résultat : les jours du 5 au 12 reviennent au compteur. Le salarié a “consommé” les CP du 1 au 4 et du 13 au 14 uniquement.
Cas n°2 — Semaine mixte et heures sup
1 jour de CP le mardi. Le reste de la semaine est chargé : +3 h au total.
Résultat : ces 3 h sont des heures supplémentaires car le CP est compté pour franchir le seuil des 35 h.
Cas n°3 — Congé fractionné et fermeture d’atelier
L’entreprise ferme le vendredi, le salarié pose un CP le jeudi et travaille plus longtemps lundi à mercredi.
Résultat : le CP du jeudi compte pour le déclenchement ; si les heures de lundi à mercredi dépassent, majorations dues.
Check-list éclair pour les employeurs
Paramétrage paie/SIRH : intégrer les CP dans le seuil hebdo de déclenchement.
Procédure de report : fiche réflexe “maladie pendant CP” (qui fait quoi, quand, comment).
Information/formation : managers, paie, CSE.
Mise à jour documentaire : règlement intérieur, intranet RH, modèles d’accord d’annualisation si besoin.
Suivi des litiges : ouvrir une période de régularisation si des semaines passées doivent être corrigées.
FAQ express
Faut-il un certificat médical pour le report ? Oui, l’arrêt maladie doit être constaté et transmis selon les délais habituels.
Le report est-il automatique ? Le droit au report est reconnu, mais la programmation des nouveaux jours se fait en concertation avec l’employeur, comme pour tout congé.
Les CP comptent-ils désormais comme temps de travail pour tout ? Non. La décision vise le déclenchement des heures supplémentaires. Pour d’autres effets (ancienneté, RTT, repos comp.), on applique les règles existantes.
Quid des forfaits-jours ? Le seuil hebdomadaire de 35 h n’est pas l’outil de référence pour les forfaits-jours. Les entreprises doivent toutefois vérifier les impacts dans leurs accords (suivi de la charge et du repos).
Peut-on revenir sur des paies déjà émises ? Si des semaines récentes ont été calculées à l’ancienne, une régularisation peut s’imposer. Mieux vaut documenter les corrections (bulletins rectificatifs, explications).
L’esprit des décisions : protéger un droit au repos “réel” et une rémunération “juste”
Ces deux arrêts poursuivent une même logique : ne pas faire peser sur le salarié le hasard de la maladie ni le priver des effets normaux de ses droits à congés. Le repos annuel doit rester effectif ; la rémunération liée aux heures réellement fournies ne doit pas être amoindrie par la présence de congés dans la semaine. Pour les entreprises, la clé est d’anticiper et de sécuriser : une procédure claire, un paramétrage fiable et une information transparente éviteront la plupart des contentieux.
En résumé
Malade pendant des congés payés ? Les jours concernés sont reportés.
Semaine avec congés payés et heures en plus ? Les CP comptent pour franchir le seuil de 35 h, et les heures excédentaires deviennent des heures supplémentaires.
À faire tout de suite : mettre à jour la paie, sécuriser la procédure de notification et communiquer aux équipes.