Travail

Conjoint collaborateur : droits, conditions et obligations en 2025

Estelle Marant
Collaboratrice
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Conjoint collaborateur ou salarié : quelle protection choisir ?

Dans de nombreuses petites entreprises familiales, le conjoint du chef d’entreprise joue un rôle déterminant dans le fonctionnement quotidien : gestion administrative, relation avec la clientèle, organisation des approvisionnements ou encore tenue des comptes. Pourtant, cette participation active ne peut rester juridiquement invisible. Le législateur, conscient de l’importance de cette contribution, a instauré plusieurs statuts permettant d’encadrer la place du conjoint dans l’entreprise : conjoint collaborateur, conjoint salarié ou conjoint associé.

Le statut de conjoint collaborateur occupe une place singulière. Prévu à l’article L.121-4 du Code de commerce, il offre la possibilité au conjoint de participer à la vie de l’entreprise sans percevoir de rémunération, tout en bénéficiant d’une protection sociale propre. Ce statut est particulièrement adapté aux structures artisanales, commerciales ou libérales, où le conjoint souhaite s’impliquer sans entrer dans un lien de subordination ou sans investir financièrement dans la société.

Il présente néanmoins des limites qu’il est indispensable de comprendre : absence de rémunération, exclusion du régime chômage, durée restreinte à cinq ans depuis la loi PACTE. Sa mise en place obéit à des formalités spécifiques, notamment une déclaration lors de l’immatriculation de l’entreprise ou en cours d’activité par voie modificative.

Ainsi, avant d’opter pour ce statut, le chef d’entreprise et son conjoint doivent mesurer précisément ses conséquences juridiques, sociales et financières. L’objectif est double : sécuriser l’implication du conjoint tout en protégeant ses droits sociaux, notamment en matière de retraite et de protection maladie.

Sommaire

  1. Définition du statut de conjoint collaborateur
  2. Conditions pour bénéficier du statut
  3. Rémunération et situation financière
  4. Rôle du conjoint collaborateur dans l’entreprise
  5. Formalités et déclaration du statut
  6. Régime social et cotisations
  7. Distinctions entre conjoint collaborateur, conjoint salarié et conjoint associé
  8. Avantages et limites du statut

Définition du statut de conjoint collaborateur

Le statut de conjoint collaborateur s’adresse au conjoint marié, partenaire de PACS ou concubin d’un chef d’entreprise qui participe régulièrement et activement à l’activité de l’entreprise sans percevoir de rémunération. Ce régime est prévu par l’article L.121-4 du Code de commerce.

Il s’applique aux entreprises commerciales, artisanales ou libérales, et permet au conjoint d’apporter une aide réelle au dirigeant, sans pour autant devenir associé ni salarié. Le conjoint collaborateur agit souvent dans les petites structures familiales, où la distinction entre vie personnelle et vie professionnelle est réduite.

Exemple : l’épouse d’un boulanger qui assure la vente au comptoir et la tenue de la caisse sans contrat de travail formalisé.

Conditions pour bénéficier du statut

Pour obtenir ce statut, plusieurs critères doivent être réunis :

  • être marié, pacsé ou en concubinage avec le chef d’entreprise ;
  • participer de façon régulière et effective aux activités de l’entreprise ;
  • ne pas être rémunéré au titre de cette participation ;
  • ne pas détenir de parts sociales dans l’entreprise.

Ce régime concerne le conjoint d’un entrepreneur individuel, d’un gérant majoritaire de SARL ou de l’associé unique d’une EURL.

À noter : le conjoint collaborateur peut exercer une autre activité salariée ou indépendante à condition que cette seconde activité n’excède pas un mi-temps et qu’il prouve sa participation régulière à l’entreprise de son conjoint.

Rémunération et situation financière

Le conjoint collaborateur n’a pas droit à une rémunération. À la différence du conjoint salarié, il ne bénéficie pas de contrat de travail ni de fiche de paie. Ce choix implique donc une absence de revenus directs liés à l’activité de l’entreprise.

En revanche, il peut cumuler son statut avec une autre activité professionnelle extérieure, ce qui lui permet d’avoir une source de revenu distincte. Cette souplesse est prévue pour sécuriser sa situation financière tout en maintenant son rôle dans l’entreprise familiale.

Rôle dans l’entreprise

Le conjoint collaborateur peut accomplir, au nom et pour le compte du chef d’entreprise, des actes administratifs nécessaires au fonctionnement de la structure. L’article L.121-6 du Code de commerce institue une présomption de mandat.

Ainsi, il peut signer des documents, traiter avec les fournisseurs, ou assurer la gestion courante. Dans certains cas, il peut aussi réaliser des actes de disposition (vente, donation, location) lorsque l’entreprise fait partie de la communauté matrimoniale.

Sa responsabilité peut être engagée pour les actes accomplis dans l’intérêt de l’entreprise, ce qui suppose une vigilance particulière.

Formalités et déclaration

La déclaration du statut de conjoint collaborateur incombe au chef d’entreprise :

  • au moment de l’immatriculation de l’entreprise, le statut doit être choisi et déclaré ;
  • depuis le décret n°2021-300 du 18 mars 2021, une attestation sur l’honneur est exigée pour confirmer ce choix ;
  • il est possible de déclarer le statut en cours de vie sociale, dans un délai de deux mois à compter du début de la participation effective du conjoint.

Toute modification (passage au statut de conjoint salarié ou associé) doit faire l’objet d’une déclaration modificative auprès du centre de formalités compétent.

Régime social et cotisations

Le conjoint collaborateur est affilié à la Sécurité sociale en tant que travailleur non salarié (TNS) ou auprès de la MSA pour les exploitants agricoles.

Il bénéficie ainsi de droits propres en matière de :

  • retraite de base et complémentaire ;
  • invalidité-décès ;
  • indemnités journalières et prestations maladie ;
  • maternité et formation professionnelle.

En revanche, il n’ouvre pas de droits à l’assurance chômage. Les cotisations dues sont calculées en fonction de la situation de l’entreprise et des revenus du chef d’entreprise.

Référence : articles L.121-7 du Code de commerce et suivants.

Comparaison avec les autres statuts

Conjoint collaborateur

  • Travaille régulièrement sans rémunération.
  • Dispose d’un mandat légal pour les actes de gestion courante.
  • Protégé socialement mais sans droit au chômage.
  • Statut limité dans le temps (au maximum 5 ans depuis la loi PACTE).

Conjoint associé

  • Détient des parts sociales dans l’entreprise.
  • Dispose d’un droit de vote en assemblée générale.
  • Rémunéré par des dividendes.
  • Sa responsabilité dépend de la forme sociale (limitée dans une SARL, illimitée dans une SNC).

Conjoint salarié

  • Dispose d’un contrat de travail et d’un salaire.
  • Bénéficie du droit du travail et de l’assurance chômage.
  • Subordonné au chef d’entreprise et exclu de tout acte de gestion.

Avantages et limites du statut

Avantages :

  • Implication officielle dans l’entreprise familiale ;
  • Accès à une protection sociale individuelle ;
  • Participation à la formation professionnelle ;
  • Mandat légal de gestion.

Limites :

  • Absence de rémunération ;
  • Pas de droits au chômage ;
  • Statut limité dans le temps (5 ans maximum).

Conclusion

Le statut de conjoint collaborateur constitue un compromis juridique permettant de reconnaître la contribution du conjoint dans l’entreprise tout en lui donnant accès à des droits sociaux. Bien qu’il n’entraîne pas de rémunération ni d’ouverture aux allocations chômage, il garantit une protection sociale individuelle (santé, maternité, retraite, invalidité-décès) et officialise la participation du conjoint dans les actes de gestion.

Toutefois, il ne doit pas être choisi à la légère. La comparaison avec les statuts de conjoint salarié ou de conjoint associé s’impose, car chacun entraîne des droits et obligations différents. Le conjoint salarié bénéficie d’une véritable sécurité professionnelle grâce à son contrat de travail, tandis que le conjoint associé s’investit financièrement et dispose d’un pouvoir décisionnel dans la société.

En pratique, le statut de conjoint collaborateur demeure une solution adaptée pour les TPE et entreprises familiales, à condition d’anticiper ses limites et de respecter les formalités de déclaration. C’est un outil de valorisation du travail du conjoint, qui, bien que non rémunéré, trouve ainsi une reconnaissance juridique et sociale au sein du fonctionnement de l’entreprise.

FAQ

1. Qui peut bénéficier du statut de conjoint collaborateur ?
Le statut de conjoint collaborateur est réservé au conjoint marié, pacsé ou concubin d’un chef d’entreprise exerçant une activité artisanale, commerciale, agricole ou libérale. Pour en bénéficier, le conjoint doit participer régulièrement et de manière effective à l’activité de l’entreprise sans percevoir de rémunération. Il ne doit pas être associé dans la société ni titulaire d’un contrat de travail au sein de l’entreprise. Cette reconnaissance juridique est particulièrement adaptée aux entreprises individuelles, EURL et SARL à gérance majoritaire, où l’activité familiale est souvent centrale.

2. Comment déclarer le statut de conjoint collaborateur ?
La déclaration relève de la responsabilité du chef d’entreprise. Lors de l’immatriculation, il doit préciser le choix du statut de son conjoint. Depuis le décret n° 2021-300 du 18 mars 2021, une attestation sur l’honneur est exigée afin de confirmer ce choix. Il est également possible de déclarer le statut en cours de vie de l’entreprise, dans les deux mois suivant le début de la participation du conjoint. La demande se fait auprès du centre de formalités des entreprises (CFE) compétent ou via le guichet électronique des formalités des entreprises. En cas de changement de statut (vers conjoint salarié ou associé), une déclaration modificative doit être effectuée.

3. Quels droits sociaux ouvre le statut de conjoint collaborateur ?
Même sans rémunération, le conjoint collaborateur bénéficie d’une affiliation à la Sécurité sociale des indépendants (SSI) ou à la MSA pour les exploitants agricoles. Cela lui ouvre des droits sociaux personnels en matière de :

  • santé : remboursement des soins, indemnités journalières, congé maternité ;
  • retraite : cotisation pour la retraite de base et la retraite complémentaire ;
  • invalidité-décès : protection pour lui-même et ses ayants droit ;
  • formation professionnelle : accès aux dispositifs de formation continue.

Toutefois, ce statut ne donne aucun droit au chômage, contrairement au statut de conjoint salarié. Les cotisations sont calculées sur une base forfaitaire ou proportionnelle, en fonction des revenus du chef d’entreprise.

4. Quelle différence entre conjoint collaborateur, conjoint salarié et conjoint associé ?
Le choix du statut dépend de l’implication du conjoint et des objectifs de l’entreprise :

  • Conjoint collaborateur : il agit aux côtés du chef d’entreprise sans être rémunéré, bénéficie d’une couverture sociale et d’un mandat légal de gestion, mais ne perçoit pas de salaire ni d’indemnisation chômage.
  • Conjoint salarié : il dispose d’un contrat de travail, d’une rémunération au moins égale au SMIC, d’une couverture complète au titre du droit du travail (assurance chômage, congés payés, protection en cas de licenciement). Ce statut implique une véritable relation de subordination.
  • Conjoint associé : il détient des parts sociales, participe aux assemblées générales, perçoit des dividendes et partage la responsabilité selon la forme sociale (limitée dans une SARL, illimitée dans une SNC). Ce statut suppose un apport financier initial.

Cette distinction est essentielle car elle détermine la nature des droits sociaux, des responsabilités et de la rémunération du conjoint.

5. Le statut de conjoint collaborateur est-il limité dans le temps ?
Depuis la loi PACTE de 2019, le statut de conjoint collaborateur est limité à une durée maximale de 5 ans. À l’issue de cette période, le conjoint doit opter pour un autre statut : salarié ou associé. Cette réforme vise à renforcer la protection du conjoint et à éviter des situations de précarité prolongées liées à l’absence de rémunération. En pratique, il est donc recommandé d’anticiper cette échéance et de préparer la transition vers un statut plus protecteur, notamment pour la retraite ou l’accès aux droits au chômage.

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