Contrat à durée déterminée, le CDD est un outil d’ajustement des effectifs destiné à répondre à des besoins précisément temporaires. Il ne peut ni avoir pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. À l’inverse, le CDI demeure la forme générale et normale de la relation de travail. Cette frontière, posée par la loi et confirmée par une jurisprudence nourrie, irrigue l’ensemble du régime du CDD : motifs strictement encadrés, écrit obligatoire, mentions substantielles, durées maximales, règles de succession et sanctions (dont la requalification en CDI) en cas d’écart.
L’objectif de ce dossier est de vous donner une lecture opérationnelle et sécurisée du CDD, en citant les textes applicables et les arrêts de référence, afin de prévenir les contentieux et d’optimiser vos pratiques RH.
Le CDD est le contrat par lequel un employeur embauche un salarié pour une durée limitée, afin de répondre à un besoin temporaire précisément identifié (article L1242-1 du Code du travail). Il s’oppose au CDI, reconnu comme la forme normale et générale du contrat de travail (article L1221-2).
Le CDD peut être conclu à temps plein ou à temps partiel selon les nécessités de service.
À retenir : tout usage du CDD hors des cas autorisés expose l’employeur à une requalification en CDI et au paiement d’indemnités.
Le recours au CDD est exceptionnel et limitatif. Les motifs sont listés par la loi (article L1242-2) :
Preuve du motif : l’employeur doit établir la réalité du motif invoqué, sous le contrôle du juge.
Autorisé pour suppléer un salarié temporairement absent ou dont le contrat est suspendu (maladie, congé maternité, etc.), ou pour assurer une transition entre deux CDI. Chaque salarié remplacé implique un CDD distinct, hors dispositifs spéciaux.
Exigence : la temporarité et l’identification du salarié remplacé doivent ressortir clairement du contrat.
L’entreprise doit démontrer une hausse conjoncturelle du volume d’activité au-delà de l’ordinaire, sur une période limitée, sans que cela traduise un développement structurel (Cass. soc., 21 janv. 2004, n°03-42769 à 03-42784 ; Cass. soc., 29 oct. 2014, n°12-27936). Un projet pérenne (ex. ouverture de site) n’autorise pas le CDD.
Réservé à des secteurs listés par textes (spectacle, audiovisuel, hôtellerie-restauration, sport, etc., article D1241-1), par accord étendu ou décret. L’emploi doit, dans le secteur, être habituellement pourvu en CDD et présenter une temporarité de nature (Cass. soc., 26 nov. 2003, n°01-44263).
Précisions 2025 : extension à deux activités supplémentaires (soutien aux formations militaires / médecine en zones sous-dotées) par décrets n°2025-263 du 21 mars 2025 et n°2025-552 du 18 juin 2025.
Emplois dont les tâches se répètent chaque année à période à peu près fixe, en lien avec les saisons ou modes de vie collectifs (tourisme, vendanges, récoltes) (Cass. soc., 12 oct. 1999, n°97-40915 ; 15 oct. 2014, n°13-18582).
Réservé aux ingénieurs et cadres pour une mission dont la fin est l’achèvement de l’objet (préavis de 2 mois), avec une durée maximale de 36 mois (articles L1242-8-2 et L1242-8-1).
Facilite l’emploi des 57 ans et + inscrits comme demandeurs d’emploi (régime spécifique mentionné à L1242-3 ; précisions par voie conventionnelle).
Statut dédié au joueur salarié de jeu vidéo compétitif (durée 12 mois min., 5 ans max.), créé par l’article 102 de la loi n°2016-1321 du 7 oct. 2016.
Interdictions majeures (articles L1242-5 et L1242-6) :
Le CDD doit obligatoirement être écrit (article L1242-12) et remis au salarié dans les 2 jours ouvrables suivant l’embauche (article L1242-13).
Le seul retard de remise n’entraîne pas ipso facto la requalification, mais ouvre droit à une indemnité (plafond 1 mois de salaire) (article L1245-1).
L’absence de signature prive le contrat de sa preuve écrite et expose à la requalification (Cass. soc., 14 nov. 2018, n°16-19038).
En cas de contestation de la validité d’une signature, l’original doit être produit (à défaut : non-écrit et requalification) (Cass. soc., 12 juin 2024, n°22-20962).
Pas de requalification si le refus de signer procède d’une fraude ou mauvaise foi du salarié (Cass. soc., 24 mars 2010, n°08-45552).
Outre l’identité des parties, doivent figurer (articles L1242-12 et s.) :
Depuis la loi n°2023-171 du 9 mars 2023 et le décret n°2023-1004 du 30 oct. 2023 (transposant la directive UE 2019/1152) :
Elle est facultative, mais fréquente. Sa durée dépend :
Le CDD à terme précis comporte un terme fixé dès la conclusion (article L1242-7).
La durée totale peut être aménagée par accord de branche étendu (article L1242-8). À défaut, le plafond est de 18 mois renouvellements inclus (article L1242-8-1).
Nombre maximal fixé par accord de branche (article L1243-13). À défaut : 2 renouvellements (article L1243-13-1).
Le renouvellement suppose : une clause prévue dès l’origine ou un avenant signé avant le terme.
Attention : en l’absence de renouvellement valable, la poursuite de la relation après le terme emporte transformation en CDI.
Plafonds spécifiques (article L1242-8-1) :
Possibles pour remplacement, saisonnier et usage (régimes spéciaux).
Un délai de carence s’impose entre deux CDD, sauf exceptions.
À défaut d’accord de branche, le délai est (article L1244-3-1) :
Interdiction d’affectation à des travaux particulièrement dangereux, sauf dérogation (article L4154-1).
Pour les postes à risques particuliers, obligations renforcées : accueil, information et formation sécurité ; la liste des postes est établie par l’employeur après avis du médecin du travail et du CSE, et tenue à disposition de l’inspection du travail.
Le Compte personnel de formation est alimenté prorata temporis selon le temps de travail effectif sur l’année. Le salarié en CDD peut mobiliser ses droits CPF pour des formations qualifiantes / certifiantes.
Le salarié en CDD bénéficie de l’égalité de traitement : même rémunération de base, primes et avantages collectifs que les salariés CDI dans une situation équivalente.
Il acquiert des congés payés dans les mêmes conditions que les CDI.
Ancienneté : calculée comme pour un CDI ; en cas de poursuite en CDI, l’ancienneté acquise en CDD est conservée. En saisonnier, les durées se cumulent.
La rupture avant terme est strictement encadrée (article L1243-1) :
En dehors de ces cas, la partie qui rompt à tort doit réparer :
Due dans la plupart des cas à la fin du CDD (article L1243-8), sauf exceptions (ex. CDI proposé et refus fautif, contrats saisonniers ou d’usage selon texte, faute grave, etc.).
Due pour les congés acquis non pris (article L1242-16).
Remise du certificat de travail, attestation France Travail et reçu pour solde de tout compte.
Prononcée lorsque :
Le salarié obtient alors son CDI (avec ancienneté) et peut prétendre à des indemnités (notamment l’indemnité de requalification).
Le non-respect des règles du CDD peut aussi être pénalement sanctionné (selon les cas), et civilement par des dommages-intérêts. Des amendes administratives existent pour divers manquements formels.
Lorsque l’employeur propose un CDI sur le même emploi, au même lieu et pour une rémunération au moins équivalente, le refus du salarié ou son silence (après délai de réflexion) doit être notifié à France Travail par voie dématérialisée.
Un demandeur d’emploi ayant refusé 2 fois une telle proposition de CDI dans les 12 derniers mois peut perdre le bénéfice de l’allocation d’assurance chômage et de la prime de précarité, sous réserve des conditions légales applicables.
Bien utilisé, le CDD est un outil de gestion temporaire efficace ; mal cadré, il devient un facteur de risque juridique majeur. Tout l’enjeu consiste à documenter le besoin ponctuel, choisir le bon motif (L1242-2), sécuriser l’écrit (motif précis, mentions essentielles, signatures, L1242-12 à L1242-13), respecter les durées et renouvellements (L1242-8-1, L1243-13-1) et maîtriser les successions avec délai de carence (L1244-3-1). À défaut, la requalification en CDI et les indemnités associées guettent.
Pour ancrer une pratique fiable, adoptez une discipline probatoire et opérationnelle :
Pour les employeurs, cette méthode limite l’aléa prud’homal et stabilise les coûts ; pour les salariés, elle garantit transparence et droits opposables. En somme, le CDD n’est ni un « mini-CDI » ni une variable sans règles : c’est un contrat d’exception qui exige rigueur et traçabilité à chaque étape de son cycle de vie.
Le CDD (article L1242-1 du Code du travail) est un contrat temporaire conclu pour répondre à un besoin ponctuel de main-d’œuvre, tandis que le CDI (L1221-2) est la forme normale du contrat de travail.
Le CDD doit obligatoirement être motivé par une cause précise : remplacement, accroissement temporaire d’activité, ou emploi saisonnier.
Un CDD conclu sans motif valable, ou pour un emploi permanent, est automatiquement requalifié en CDI par le Conseil de prud’hommes.
La durée d’un CDD ne peut excéder 18 mois, renouvellements inclus (article L1242-8-1), sauf exceptions légales :
L’article L1242-5 du Code du travail interdit le CDD dans trois situations :
Oui. Le principe d’égalité de traitement impose que le salarié en CDD bénéficie de la même rémunération et des mêmes avantages collectifs qu’un salarié en CDI occupant un poste équivalent (article L1242-15).
Il a également droit :
Tout manquement formel ou matériel (absence d’écrit, défaut de motif précis, dépassement de durée, non-respect du délai de carence) entraîne la requalification automatique en CDI (articles L1245-1 et L1245-2).
L’employeur encourt également :