La demande de naturalisation française repose sur une condition essentielle : justifier d’une bonne vie et mœurs. Cette exigence signifie que le candidat doit présenter un parcours exempt de comportements incompatibles avec l’intégration dans la communauté nationale.
Or, une ancienne condamnation pénale ou même une simple inscription dans un fichier judiciaire peut faire obstacle à l’obtention de la nationalité.
Face à cette difficulté, le droit prévoit plusieurs mécanismes permettant d’« assainir » son passé judiciaire, de démontrer une véritable réinsertion sociale, et de neutraliser les conséquences d’une condamnation ancienne. Parmi ces outils, l’exclusion d’une condamnation du bulletin n° 2 du casier judiciaire, la réhabilitation et l’effacement d’une mention au TAJ (traitement des antécédents judiciaires) sont les leviers principaux.
La naturalisation par décision de l’autorité publique suppose notamment une bonne vie et mœurs : une condamnation pénale peut fonder un refus, même ancienne, si elle fait douter de votre moralité actuelle. Le Code civil le rappelle expressément (« nul ne peut être naturalisé s’il n’est pas de bonnes vie et mœurs »).
Dans l’instruction du dossier, l’administration peut consulter le bulletin n° 2 (B2) de votre casier — document réservé aux autorités publiques — et tenir compte de ses mentions. Le B2 n’est pas accessible au public ni au candidat : seules certaines autorités et employeurs habilités peuvent le recevoir.
Bon à savoir
Le B2 n’est pas votre B3. Le B3 (que vous seul pouvez obtenir) comporte moins de mentions et ne suffit pas à évaluer le risque pour la naturalisation. Effacer le B3 n’efface pas le B2.
Astuce
Vous ne pouvez pas demander une copie de votre B2, mais vous pouvez solliciter sa consultation auprès du procureur pour connaître ce qu’il contient (utile avant toute démarche d’effacement).
Par ailleurs, l’autorité de naturalisation vérifie aussi vos antécédents à l’étranger : le décret de 1993 impose la production d’un extrait de casier du ou des pays de résidence des dix dernières années (ou équivalent), point crucial pour des parcours internationaux.
Le Code de procédure pénale prévoit que le juge ou le procureur peut ordonner l’exclusion d’une condamnation du bulletin n° 2 du casier judiciaire. Cette démarche est la plus pertinente dans un projet de naturalisation, car c’est précisément ce bulletin que l’administration consultera.
L’exclusion produit des effets immédiats et puissants : elle entraîne automatiquement le relèvement de toutes les incapacités, déchéances et interdictions attachées à la condamnation (ex. interdiction professionnelle, interdiction de gérer). Autrement dit, elle « neutralise » la condamnation pour l’avenir administratif.
Cependant, cette faculté n’est pas universelle : le législateur a expressément exclu les infractions sexuelles visées à l’article 706-47 du CPP. Pour ce type de faits, l’effacement du B2 est juridiquement impossible, la seule issue restant la réhabilitation.
Astuce
Si vous sollicitez la naturalisation, concentrez votre stratégie sur l’exclusion B2. Même si votre B3 (que vous pouvez demander vous-même) paraît vierge, cela n’est pas suffisant : l’administration ne se fonde pas sur ce bulletin mais sur le B2, beaucoup plus complet.
La réhabilitation, prévue par le Code pénal, constitue une autre voie d’« assainissement » de votre passé pénal. Elle peut être :
Les effets de la réhabilitation sont plus larges que l’exclusion B2 : elle efface en totalité les condamnations du casier judiciaire, rétablit la personne dans l’intégralité de ses droits, et fait disparaître les conséquences pénales et civiles de la sanction.
En revanche, la réhabilitation suppose une stabilité sur la durée : absence de récidive, insertion sociale, respect des obligations légales et fiscales.
Bon à savoir
Les délais dépendent de la gravité de la peine : plus la condamnation est lourde, plus le délai est long. Par exemple, après une simple amende contraventionnelle, le délai est de 3 ans, alors qu’après une peine correctionnelle de prison avec sursis, il peut atteindre 5 ans ou plus.
Pour une demande de naturalisation urgente, la réhabilitation judiciaire peut être trop lente à enclencher : dans ce cas, l’exclusion B2 reste la voie prioritaire.
Au-delà du casier judiciaire, il existe un autre obstacle : le TAJ (traitement des antécédents judiciaires), fichier de police recensant les gardes à vue, mises en cause et certaines procédures, même sans condamnation définitive.
L’administration chargée de la naturalisation consulte également le TAJ. Un refus peut ainsi intervenir même si votre casier judiciaire a été purgé, dès lors que le TAJ mentionne des faits récents ou non effacés.
Le régime du TAJ est spécifique : son effacement ou sa rectification repose sur l’article 230-8 du CPP. La demande doit être adressée au procureur de la République du lieu de la procédure, et elle est appréciée au regard de critères précis :
Bon à savoir
Effacer une condamnation du B2 n’a aucun effet sur le TAJ. Ce sont deux démarches totalement séparées : l’une ne dispense pas de l’autre. Pour sécuriser un dossier de naturalisation, il faut souvent combiner les deux démarches.
En pratique, la requête d’exclusion du B2 est adressée au procureur de la République près le tribunal judiciaire ayant prononcé la dernière condamnation (ou à celui compétent pour centraliser). Joignez la copie de la décision, l’historique pénal et tout justificatif récent. (Pratique professionnelle admise.)
Astuce
Si plusieurs condamnations figurent au B2, visez la plus récente d’abord : une exclusion partielle peut déjà débloquer votre naturalisation, puis vous traiterez les autres.
Bon à savoir
L’exclusion B2 produit un relèvement des interdictions/déchéances liées à la condamnation (ex. interdiction professionnelle), ce qui peut sécuriser l’appréciation de votre moralité par l’administration.
Astuce
Synchronisez vos démarches : B2 d’abord, TAJ ensuite (si nécessaire). Un B2 « propre » met déjà votre dossier de naturalisation dans de bien meilleures conditions.
Toutes les condamnations ne peuvent pas être effacées du bulletin n° 2. Le législateur a expressément prévu que les infractions sexuelles mentionnées à l’article 706-47 du Code de procédure pénale — comme les agressions sexuelles, le viol, la corruption de mineur, ou encore la traite à des fins sexuelles — ne peuvent en aucun cas faire l’objet d’une exclusion. Dans ces hypothèses, la seule solution reste la réhabilitation, après respect des délais et conditions.
Il est donc crucial de vérifier la qualification exacte de la condamnation avant d’engager des frais ou de déposer une requête qui serait d’emblée irrecevable.
Beaucoup de candidats pensent qu’un bulletin n° 3 vierge suffit à démontrer leur bonne moralité. C’est une erreur fréquente.
Le bulletin n° 3, délivré uniquement à la personne concernée, ne contient qu’une partie des condamnations : les plus graves, récentes ou non encore effacées par réhabilitation. À l’inverse, le bulletin n° 2 est beaucoup plus complet et c’est celui que consultera l’administration dans le cadre d’une demande de naturalisation.
Une mention absente du B3 peut donc toujours figurer au B2 et bloquer la procédure. D’où l’importance d’agir directement sur le B2 et non de se rassurer avec un B3 vierge.
Les candidats ayant vécu à l’étranger au cours des dix dernières années doivent produire un extrait de casier judiciaire ou équivalent des pays concernés. Cette exigence, issue du décret du 30 décembre 1993, permet à l’administration française de s’assurer que la personne ne dissimule pas des condamnations commises hors de France.
Il est conseillé d’anticiper largement cette démarche, car certains pays mettent plusieurs mois à délivrer un extrait. Dans certains cas, il peut même être nécessaire de passer par une apostille ou une légalisation consulaire pour que le document soit recevable.
Si vous n’avez qu’une condamnation isolée, l’exclusion B2 peut suffire à lever l’obstacle. Mais dans les situations où :
alors la réhabilitation constitue une stratégie plus efficace, car elle purge l’ensemble du casier judiciaire. Elle peut être sollicitée devant la juridiction compétente, et ses effets sont généraux : disparition des mentions, rétablissement de tous les droits civils et civiques.
La réhabilitation reste compatible avec une exclusion B2 : on peut d’abord demander une exclusion ciblée pour débloquer un dossier urgent, puis envisager ensuite une réhabilitation pour obtenir une assainissement global.
Astuce pratique
Lors de la préparation d’un dossier de naturalisation, joignez à votre requête d’exclusion B2 ou de réhabilitation des preuves concrètes d’intégration :
Un dossier cohérent, documenté et actualisé — montrant une insertion durable et l’absence de récidive — maximise vos chances d’aboutir.
Un classement sans suite signifie que le procureur a décidé de ne pas poursuivre l’affaire (faute de preuve, absence d’infraction, prescription…). Pourtant, la procédure peut rester inscrite dans le TAJ (Traitement des Antécédents Judiciaires). Cette inscription peut bloquer une naturalisation ou un recrutement dans des métiers sensibles.
L’article 230-8 du Code de procédure pénale permet de demander l’effacement du TAJ lorsque la conservation de l’inscription est disproportionnée au regard de la situation actuelle. Il faut adresser une requête motivée au procureur de la République, démontrant l’absence de récidive, une insertion stable et le caractère injustifié du maintien.
Astuce SEO / Pratique : Dans votre courrier, joignez la décision de classement sans suite, vos justificatifs d’emploi, de logement et de régularité fiscale pour renforcer votre dossier.
Ces deux procédures sont distinctes :
Bon à savoir : Le B3 (que vous seul pouvez obtenir) ne reflète pas toujours la réalité. L’administration consulte surtout le B2, et parfois le TAJ.
L’article 775-1 du Code de procédure pénale autorise l’exclusion d’une condamnation du bulletin n° 2. La demande doit être adressée au procureur de la République du tribunal qui a rendu la condamnation.
La requête doit contenir :
Astuce SEO / Justiciable : Appuyez votre demande par des pièces de stabilité (CDI, bulletins de salaire, avis d’imposition, attestations de bénévolat).
Oui. Même si une condamnation a été exécutée, le TAJ peut continuer à conserver la trace de l’infraction pendant plusieurs années. Or, cette inscription peut faire obstacle à un projet professionnel ou à une demande de nationalité.
L’effacement peut être sollicité si le maintien de la mention est disproportionné au regard du temps écoulé, de l’absence de récidive et de l’évolution personnelle. Cette demande se fait auprès du procureur compétent, et peut être contestée devant le président de la chambre de l’instruction en cas de refus.
La meilleure stratégie dépend de la situation :
Astuce pratique : Construisez un dossier cohérent et chronologique, démontrant votre évolution (absence de récidive, régularité fiscale, stabilité résidentielle, intégration sociale). Cela maximise vos chances de succès auprès du parquet et, ensuite, auprès de l’administration de naturalisation.