Travail

Embauche d’un salarié : comment recruter en respectant la loi

Francois Hagege
Fondateur
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Recruter un salarié en toute légalité : obligations, formalités, conseils

Recruter un salarié en France ne s’improvise pas. Loin d’être un simple acte de gestion des ressources humaines, l’embauche constitue un acte juridique majeur qui engage durablement la responsabilité de l’employeur. Que l’on soit artisan, dirigeant d’une TPE ou DRH d’une entreprise structurée, chaque embauche déclenche une cascade d’obligations formelles, réglementaires, contractuelles et déclaratives.

Ce processus encadré par le Code du travail exige de maîtriser aussi bien les étapes pratiques (rédaction d’une offre, déroulement de l’entretien, contractualisation de la relation de travail) que les formalités administratives (DPAE, registre du personnel, visite médicale...). La méconnaissance ou l’oubli d’une seule de ces obligations peut conduire à de sévères sanctions civiles, administratives voire pénales.

Il s’agit également de composer avec une législation en constante évolution : transposition des directives européennes, réforme des modalités d’information du salarié, modernisation des démarches pour les travailleurs étrangers ou encore adaptation des obligations liées au handicap. L’employeur doit ainsi conjuguer sécurité juridique, efficacité organisationnelle et conformité sociale.

Ce guide exhaustif publié sur defendstesdroits.fr vous accompagne pas à pas dans toutes les étapes nécessaires pour embaucher un salarié en toute légalité, que ce soit un collaborateur français, étranger ou en situation de handicap. Vous y trouverez des repères clairs, des références juridiques précises, et une méthode applicable à tous les types d’employeurs, du secteur privé.

Sommaire

  1. Recruter un salarié : organiser la procédure
  2. Formaliser la relation de travail
  3. Respecter les formalités administratives
  4. Embaucher un travailleur étranger : précautions à prendre
  5. Respecter l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés

Recruter un salarié : organiser la procédure

Définir le besoin et le profil du poste

Avant toute embauche, l’entreprise doit évaluer ses besoins internes et déterminer les compétences requises. Ce travail préparatoire permet d’élaborer un profil de poste précis, en tenant compte du contrat envisagé (CDI, CDD, alternance, etc.) et du périmètre des missions.

Rédiger une offre d’emploi légale

L’article L5331-4 du Code du travail impose que l’offre soit rédigée en français. Elle doit présenter :

  • l’identité de l’employeur ;
  • les caractéristiques du poste ;
  • les conditions de travail ;
  • les compétences et diplômes attendus.

L’employeur doit proscrire toute mention discriminatoire (âge, sexe, origine, orientation sexuelle, etc.), conformément à l’article L1132-1 du Code du travail.

Diffuser l’annonce de manière appropriée

La publication peut s’effectuer via différents canaux : Pôle emploi, réseaux professionnels, site de l’entreprise, cabinet de recrutement… Une large diffusion garantit l’égalité d’accès à l’emploi.

Conduire un entretien conforme au droit

L’entretien d’embauche, régi par l’article L1221-6 du Code du travail, doit respecter le principe de loyauté. Il est interdit de poser des questions relatives à la vie privée du candidat. Il est essentiel de préparer une grille d’évaluation neutre et cohérente.

Formaliser la relation de travail

Proposer une promesse d’embauche

Lorsque le candidat est retenu, l’employeur peut émettre une promesse d’embauche, dont la portée diffère selon qu’il s’agit :

  • d’une offre de contrat de travail (engagement unilatéral révocable) ;
  • d’une promesse unilatérale de contrat de travail, juridiquement engageante.

Depuis l’arrêt de la Cour de cassation du 21 septembre 2017 (n° 16-20.103), seule la seconde engage valablement les parties.

Signer un contrat de travail adapté

Pour un CDD, le contrat écrit est impératif (article L1242-12). Pour un CDI, la loi ne l’impose pas, mais la rédaction écrite est vivement conseillée.

Les clauses obligatoires incluent :

  • la qualification du salarié ;
  • la rémunération ;
  • la durée du travail ;
  • les conditions d’exécution (mobilité, période d’essai, etc.).

Le contrat doit être signé en deux exemplaires, remis à chaque partie.

Informer le salarié de ses droits

L’article L1221-5-1 impose la remise d’un document d’information reprenant les éléments essentiels du contrat dans un délai d’un mois. Sont notamment visés :

  • les accords collectifs applicables ;
  • les dispositifs d’épargne salariale ;
  • les droits à la formation.

Prévoir une période d’essai

Facultative, la période d’essai permet à l’employeur et au salarié de tester leur collaboration. Elle doit être expressément prévue par écrit. Sa durée dépend de la nature du contrat :

  • CDI : 2 à 4 mois (renouvelables) selon le poste ;
  • CDD : 1 jour par semaine, dans la limite de 2 semaines à 1 mois.

Respecter les formalités administratives

Déclarer l’embauche : la DPAE

Avant toute prise de poste, l’employeur doit transmettre une déclaration préalable à l’embauche à l’Urssaf, au plus tôt 8 jours avant l’embauche. Cette formalité permet notamment :

  • d’ouvrir les droits sociaux du salarié ;
  • d’organiser la visite médicale ;
  • de signaler l’embauche aux autorités sociales.

Le défaut de DPAE constitue un délit de travail dissimulé puni par l’article L8221-5 du Code du travail.

Organiser la visite médicale

Dans les 3 mois suivant la prise de poste, le salarié doit bénéficier d’une visite d’information et de prévention (article R4624-10). Pour les postes à risque, un examen médical d’aptitude s’impose dès l’embauche.

Inscrire le salarié au registre du personnel

Le registre unique du personnel doit mentionner toute embauche, dans l’ordre chronologique (article L1221-13). Ce document doit être présenté à l’inspection du travail sur demande. L’omission d’inscription peut entraîner une amende de 750 € par salarié (article R1227-7).

Embaucher un travailleur étranger : précautions à prendre

Vérifier l’autorisation de travail

Avant l’embauche, l’employeur doit s’assurer que le salarié étranger est titulaire d’un titre de séjour autorisant le travail. En l’absence de ce document, l’employeur encourt des sanctions pénales (article L8251-1).

Depuis l’arrêté du 3 janvier 2025, la liste des pièces à fournir a été actualisée pour toute demande d’autorisation de travail.

Mener les démarches d’introduction

Si le salarié ne réside pas encore en France, l’employeur doit :

  • lancer une procédure d’introduction ;
  • obtenir un visa long séjour (VLS-TS) ;
  • prévoir la visite à l’OFII ;
  • régler la taxe d’introduction auprès de la DGFiP.

Respecter l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés

Qui est concerné ?

L’OETH s’applique aux entreprises d’au moins 20 salariés (article L5212-2). Le taux d’emploi est fixé à 6 % de l’effectif total.

Moyens de s’acquitter de l’OETH

L’entreprise peut :

  • embaucher directement des travailleurs handicapés ;
  • avoir recours à des entreprises adaptées ;
  • verser une contribution annuelle à l’Agefiph.

Une déclaration annuelle obligatoire est à effectuer via la DSN.

Conclusion

Recruter un salarié est bien plus qu’un acte de gestion humaine : c’est une opération juridique complète qui mobilise une pluralité de règles de droit, de formalités et de réflexes à maîtriser. Si chaque étape — du recrutement à l’intégration, en passant par la contractualisation et les déclarations obligatoires — doit être abordée avec rigueur, c’est parce qu’elle constitue un point de départ déterminant dans la relation de travail.

Oublier une DPAE, mal rédiger une clause contractuelle, négliger la vérification d’un titre de séjour ou ignorer l’OETH peut exposer l’employeur à des litiges prud’homaux, des redressements URSSAF ou même des poursuites pénales. À l’inverse, respecter scrupuleusement le droit du travail à chaque étape permet de sécuriser la relation, de valoriser la marque employeur, et de favoriser une dynamique sociale saine au sein de l’entreprise.

En vous appuyant sur les recommandations juridiques fournies par defendstesdroits.fr, vous disposez désormais d’un cadre clair, fiable et opérationnel pour procéder à vos embauches en toute conformité. Il ne s’agit pas seulement de cocher des cases administratives, mais de bâtir les fondations solides d’un rapport de travail équilibré, sécurisé et pérenne.

FAQ

1. Quelles sont les obligations légales avant l’embauche d’un salarié ?

Avant de pouvoir faire travailler un salarié, l’employeur doit respecter un certain nombre de formalités obligatoires, sans lesquelles l’embauche est juridiquement irrégulière :

  • Déclaration préalable à l’embauche (DPAE) : à adresser à l’Urssaf dans les 8 jours précédant toute prise de poste (article L1221-10 du Code du travail). Cette déclaration permet notamment l’affiliation du salarié à la Sécurité sociale, la demande d’une visite médicale, et la déclaration à un service de santé au travail.
  • Rédaction du contrat de travail : obligatoire en CDD (article L1242-12) et fortement conseillée en CDI pour sécuriser les conditions de la relation.
  • Inscription au registre unique du personnel (article L1221-13) : ce registre doit comporter le nom du salarié, la date d’entrée, le type de contrat et d’autres mentions précises. Il doit être à jour en permanence.
  • Organisation de la visite médicale d’information et de prévention (VIP) dans les trois mois suivant l’embauche (article R4624-10).

Omettre une seule de ces formalités peut exposer l’employeur à des sanctions administratives, civiles ou pénales, selon la gravité de l’omission.

2. L’entretien d’embauche est-il encadré juridiquement ?

Oui, et les règles sont souvent méconnues. L’entretien d’embauche est un acte juridique préparatoire à la conclusion d’un contrat, et doit respecter les principes suivants :

  • Pertinence des questions : l’article L1221-6 impose que toute question posée soit strictement liée à l’évaluation des capacités professionnelles du candidat.
  • Interdiction de toute discrimination : l’employeur ne peut interroger le candidat sur son orientation sexuelle, ses convictions religieuses, son état de santé, ou encore sa situation familiale (articles L1132-1 et L1142-1).
  • Obligation d’information : le candidat doit être informé du traitement de ses données personnelles lors du processus de recrutement (article L1221-8 du Code du travail, RGPD).

💡 Exemple interdit : demander à une femme si elle compte avoir un enfant constitue une discrimination potentielle. Si cette question influence le refus d’embauche, l’entreprise peut être condamnée aux prud’hommes et sanctionnée par la CNIL.

3. Quels sont les risques en cas d’oubli ou d’omission de la DPAE ?

La déclaration préalable à l’embauche (DPAE) est une formalité incontournable. L’article L8221-5 du Code du travail qualifie son omission de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié. Les conséquences sont très lourdes :

  • Sanction pénale : jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende pour une personne physique (225 000 € pour une personne morale), pouvant aller jusqu'à 5 ans en cas de récidive.
  • Sanction URSSAF : redressement des cotisations non versées, majoré de pénalités.
  • Sanctions administratives : exclusion des marchés publics, remboursement des aides à l’embauche, fermeture temporaire de l’établissement.

💡 Précision : même si l’employeur a rédigé un contrat de travail, cela ne dispense pas de la DPAE. Le manquement reste caractérisé.

4. Quelles sont les formalités spécifiques pour embaucher un travailleur étranger ?

Embaucher un salarié étranger implique des vérifications rigoureuses et, le cas échéant, des démarches spécifiques :

  • Vérification du droit au travail : l’employeur doit s’assurer que le salarié possède un titre de séjour autorisant le travail. Certains titres valent autorisation automatique (ex. : carte de résident), d’autres nécessitent une demande d’autorisation auprès de la préfecture (article R5221-41).
  • Demande d’introduction si le salarié réside à l’étranger : procédure engagée auprès de la Direccte, délivrance d’un visa long séjour (VLS-TS), puis validation par l’OFII.
  • Documents à conserver : copie du titre de séjour ou autorisation de travail, sous peine de poursuites (articles L8251-1 et suivants).
  • Paiement d’une taxe à la Direction Générale des Finances Publiques, dont le montant varie selon la durée et le niveau de rémunération du contrat.

💡 À savoir : un simple stage ou contrat à durée courte peut parfois nécessiter une autorisation. Un oubli ou une vérification insuffisante peut entraîner une interdiction d’embauche et des peines pénales sévères.

5. Une entreprise est-elle obligée d’embaucher des travailleurs handicapés ?

Oui, mais sous certaines conditions. Toute entreprise d’au moins 20 salariés est soumise à l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés (OETH), conformément à l’article L5212-2 du Code du travail.

  • Le quota à respecter est de 6 % de l’effectif global.
  • Cette obligation peut être remplie :
    • par l’embauche directe de salariés handicapés ;
    • par le recours à des entreprises du secteur adapté ou protégé ;
    • ou par le versement d’une contribution annuelle à l’Agefiph.
  • La déclaration est faite via la DSN annuelle. En l’absence de déclaration, l’Urssaf applique des pénalités financières proportionnées à l’effectif et au niveau de manquement.

💡 Cas concret : une entreprise de 25 salariés n’ayant embauché aucun salarié handicapé devra verser une contribution qui peut dépasser 4 000 € par poste non pourvu.

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