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Employer un remplaçant en CDD : les règles à respecter

Francois Hagege
Fondateur
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Contrat de remplacement : les points de droit à ne pas négliger

Le contrat à durée déterminée de remplacement, couramment appelé CDD de remplacement, est un instrument juridique essentiel pour les employeurs confrontés à l'absence temporaire d’un salarié. Qu’il s’agisse d’un congé maladie, d’un congé maternité, d’un accident du travail ou encore d’une réduction temporaire d’activité, ce type de contrat permet de garantir la continuité de l’exploitation tout en respectant le cadre légal strict imposé par le Code du travail.

Cependant, le recours au CDD de remplacement ne s’improvise pas. Il est soumis à des conditions de validité précises, tant en ce qui concerne le motif de recours, que la rédaction du contrat, la durée, le renouvellement, ou encore les modalités de rupture.

Toute imprécision ou irrégularité peut entraîner de graves conséquences juridiques, notamment la requalification en contrat à durée indéterminée (CDI) par le juge prud’homal, avec son cortège de droits sociaux étendus au bénéfice du salarié.

C’est pourquoi il est indispensable, pour tout employeur ou professionnel des ressources humaines, de maîtriser les règles encadrant ce contrat spécifique. À travers cette analyse complète, defendstesdroits.fr vous éclaire sur les fondamentaux du CDD de remplacement, appuyés sur les articles du Code du travail, la jurisprudence récente, et les éventuelles évolutions législatives.

Sommaire

  1. Introduction
  2. Qu’est-ce qu’un CDD de remplacement
  3. Mentions obligatoires du contrat
  4. Peut-on remplacer plusieurs salariés avec un seul contrat
  5. Quelle durée pour un CDD de remplacement
  6. Le renouvellement du contrat de remplacement
  7. Absence de délai de carence entre deux CDD de remplacement
  8. Fin anticipée du CDD de remplacement
  9. Terme du contrat et risque de requalification
  10. Conclusion

Qu’est-ce qu’un CDD de remplacement ?

Le CDD de remplacement est un contrat conclu pour faire face à l’absence temporaire d’un salarié nommément désigné, ou dans certains cas, du chef d’entreprise. Il s’agit d’un motif légalement reconnu de recours au CDD, visé par l’article L1242-2 du Code du travail.

Ce motif ne peut cependant être invoqué que si l’absence est temporaire. Ainsi, une absence liée à une grève ne peut jamais justifier un tel contrat, conformément à l’interdiction posée par l’article L1242-6 du Code du travail.

Mentions obligatoires du contrat

L’article L1242-12 du Code du travail impose un formalisme strict : le contrat doit être écrit et transmis au salarié dans un délai de deux jours ouvrables suivant l’embauche. À défaut, il peut être requalifié en CDI.

Il doit comporter les mentions suivantes :

  • Nom et qualification du salarié remplacé, motif de remplacement ;
  • Date de fin ou, en cas de terme imprécis, durée minimale ;
  • Intitulé du poste, indication de risques particuliers le cas échéant ;
  • Durée de la période d’essai, si prévue ;
  • Rémunération complète, y compris primes et accessoires ;
  • Coordonnées de la caisse de retraite complémentaire et de l’organisme de prévoyance, s’il y a lieu.

Ces exigences sont reprises dans le décret n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, complétant l’obligation d’information du salarié nouvellement embauché.

Peut-on remplacer plusieurs salariés avec un seul contrat ?

En principe, le recours à un contrat à durée déterminée (CDD) de remplacement ne peut viser qu’un seul salarié absent. Cette règle découle d’une interprétation stricte de l’article L1242-2, 1° du Code du travail, lequel encadre les cas autorisés de recours au CDD.

Le motif de remplacement invoqué doit être personnalisé, c’est-à-dire lié à l’absence d’un salarié nommément désigné dans le contrat. Cette exigence permet d’éviter les abus liés à une gestion flexible et trop extensive des contrats précaires.

L’employeur doit donc, en temps normal, conclure autant de CDD distincts qu’il y a de salariés absents à remplacer, chaque contrat devant mentionner avec précision le nom, la qualification et le motif d’absence de la personne remplacée, conformément aux exigences de l’article L1242-12 du Code du travail.

L’expérimentation du CDD multi-remplacements

Cependant, à titre dérogatoire et temporaire, l’article 19 de la loi n°2022-1598 du 21 décembre 2022, dite « loi Marché du travail », a instauré une expérimentation permettant aux entreprises, dans certains secteurs d’activité définis par décret, de conclure un seul CDD pour remplacer plusieurs salariés absents simultanément. Cette mesure, applicable dès le 13 avril 2023, a été limitée à une période de deux ans, soit jusqu’au 13 avril 2025.

Le CDD multi-remplacements, dans ce cadre expérimental, devait mentionner l’identité de l’ensemble des salariés remplacés, ainsi que les motifs et périodes d’absence de chacun, afin d’assurer une transparence juridique et de préserver les droits du salarié remplaçant.

Situation actuelle : fin de l’expérimentation

Depuis le 13 avril 2025, ce dispositif expérimental est arrivé à son terme. À ce jour, aucune reconduction ni inscription définitive dans le Code du travail n’a été adoptée. Par conséquent, le droit commun est rétabli : il n’est plus possible de conclure un CDD unique pour remplacer plusieurs salariés absents, sauf évolution législative ou nouvelle disposition réglementaire à venir.

👉 Pour sécuriser vos pratiques en matière de remplacement de salariés, et éviter tout risque de requalification du contrat en CDI, il est indispensable de respecter strictement la législation en vigueur et de s’appuyer sur des conseils juridiques adaptés, que vous pouvez retrouver sur defendstesdroits.fr.

Quelle durée pour un CDD de remplacement ?

La durée maximale du CDD de remplacement est fixée par l’article L1242-8 du Code du travail :

  • 18 mois maximum en principe ;
  • 9 mois en cas d’attente d’un salarié embauché ;
  • 24 mois en cas de suppression de poste prévue à la suite de l’absence ;
  • Sans durée maximale déterminée, mais avec durée minimale obligatoire, lorsque le contrat est à terme imprécis (article L1242-7 du Code du travail).

Le renouvellement du contrat de remplacement

Le renouvellement d’un CDD de remplacement est envisageable uniquement dans le cadre d’un contrat à terme précis, c’est-à-dire lorsque la date de fin du contrat est fixée dès sa signature. Dans ce cas, le renouvellement doit être expressément prévu par une clause du contrat initial.

À défaut, un avenant signé par les deux parties avant l’échéance du contrat est impératif pour permettre la prolongation de la relation contractuelle.

Conformément à l’article L1243-13 du Code du travail, et sauf si une convention collective ou un accord de branche prévoit des conditions plus favorables :

  • Le CDD de remplacement peut être renouvelé jusqu’à deux fois maximum ;
  • La durée totale du contrat, y compris les périodes de renouvellement, ne doit jamais excéder la durée maximale légale, soit 9 mois, 18 mois ou 24 mois, selon le motif du recours.

La durée maximale s’apprécie en fonction du motif précis de remplacement (attente de prise de poste, suppression de poste, etc.), tel que le prévoit l’article L1242-8 du Code du travail. Tout dépassement ou défaut de formalisme dans le renouvellement expose l’employeur à une requalification automatique du contrat en CDI, avec les conséquences juridiques et financières qui en découlent.

Absence de délai de carence entre deux CDD de remplacement

L’article L1244-3-1 du Code du travail permet une dérogation importante au principe du délai de carence entre deux contrats à durée déterminée. Ainsi, lorsque deux CDD sont successifs et que chacun est justifié par le remplacement d’un salarié absent, aucun délai de carence n’est requis entre les deux.

Cela permet à l’employeur de maintenir la continuité du poste sans interruption contractuelle, tant que le motif de remplacement reste identique et licite.

⚠️ Attention : cette exonération du délai de carence ne s’applique que si les deux contrats successifs ont le même motif légal de remplacement.

En revanche, si le premier contrat était conclu pour un accroissement temporaire d’activité, et que le second vise à remplacer un salarié absent, alors un délai de carence doit impérativement être respecté, conformément aux règles classiques posées par l’article L1244-3 du Code du travail.

À défaut, l’administration ou le juge prud’homal pourra requalifier la succession des contrats en un CDI, en estimant que l’employeur a contourné les limitations imposées par la loi pour le recours au travail précaire.

Fin anticipée du CDD : quelles sont les règles ?

La période d’essai permet la rupture libre du contrat, dans les conditions prévues à l’article L1242-10 du Code du travail. Sa durée est proportionnelle à celle du contrat :

  • 1 jour par semaine dans la limite de 2 semaines pour un contrat ≤ 6 mois ;
  • 1 mois maximum pour un contrat > 6 mois.

En dehors de cette période, le contrat ne peut être rompu que dans les cas suivants, prévus par l’article L1243-1 du Code du travail :

  • Accord des parties ;
  • Faute grave ;
  • Force majeure ;
  • Inaptitude médicalement constatée ;
  • Salarié justifiant d’un CDI.

Dans ces cas, l’indemnité de fin de contrat (ou prime de précarité) n’est pas due, sauf en cas d’accord amiable (article L1243-8 du Code du travail).

Terme du CDD et risque de requalification

Le CDD de remplacement prend fin :

  • à la date fixée par contrat ;
  • au retour du salarié remplacé ;
  • à la rupture définitive du contrat du salarié remplacé.

Un délai d’un jour supplémentaire peut être prévu pour assurer la passation (article L1242-7 précité).

Si la relation de travail se poursuit au-delà du terme, le contrat risque une requalification en CDI par le conseil de prud’hommes, en application de l’article L1245-1 du Code du travail.

Dans ce cas, l’employeur s’expose à :

  • Le paiement de l’indemnité de requalification ;
  • La reconnaissance d’une ancienneté continue ;
  • Le versement de dommages et intérêts, le cas échéant.

Enfin, l’employeur doit notifier France Travail (anciennement Pôle emploi) si le salarié refuse deux offres de CDI équivalentes en 12 mois (article L5411-6-2 du Code du travail), ce refus entraînant une perte de droit à l’indemnisation chômage.

Conclusion

Le CDD de remplacement est un outil juridique essentiel pour assurer la continuité de l’activité en cas d’absence temporaire d’un salarié. Toutefois, son recours exige une maîtrise rigoureuse des conditions légales : respect du formalisme, justification du motif, limitation de la durée, encadrement du renouvellement, et règles strictes en cas de rupture anticipée.

Une mauvaise gestion de ce contrat peut entraîner de lourdes conséquences pour l’employeur, notamment une requalification en CDI, des sanctions financières ou encore des litiges prud’homaux. Il est donc indispensable de s’y conformer scrupuleusement en s’appuyant sur les dispositions du Code du travail, la jurisprudence et les accords de branche applicables.

Pour sécuriser vos pratiques, n’hésitez pas à consulter les ressources disponibles sur defendstesdroits.fr, ou à faire appel à un professionnel du droit du travail afin d’éviter toute erreur susceptible d’engager la responsabilité de l’entreprise.

FAQ

1. Dans quels cas peut-on légalement recourir à un CDD de remplacement ?

Le CDD de remplacement peut être utilisé uniquement pour faire face à l'absence temporaire d’un salarié dont l’identité et le motif d’absence sont précisés dans le contrat. Il peut s’agir notamment d’un arrêt maladie, d’un congé maternité ou paternité, d’un accident du travail, d’un congé sabbatique, ou encore d’une réduction temporaire du temps de travail. Il est également admis pour remplacer un chef d’entreprise ou un professionnel libéral temporairement indisponible. En revanche, le recours à ce contrat est interdit pour remplacer un salarié en grève, comme le précise l’article L1242-6 du Code du travail. Le non-respect de ces conditions expose l’employeur à une requalification du contrat en CDI.

2. Quelles sont les mentions obligatoires à insérer dans un CDD de remplacement ?

Le formalisme du CDD de remplacement est strictement encadré par l’article L1242-12 du Code du travail. Le contrat doit impérativement être écrit et transmis au salarié dans un délai de deux jours ouvrables suivant l’embauche. Il doit comporter notamment :

  • Le nom, la qualification et le motif d'absence du salarié remplacé ;
  • La date de fin du contrat, ou une durée minimale si le terme est imprécis ;
  • La description du poste et, le cas échéant, les risques associés ;
  • La durée de la période d’essai, si elle est prévue ;
  • Le montant de la rémunération, avec le détail des primes ou avantages ;
  • Les coordonnées de la caisse de retraite complémentaire et de prévoyance ;
  • L’intitulé de la convention collective applicable.

L’omission de l’une de ces mentions peut entraîner une requalification du contrat en CDI et l’octroi de dommages et intérêts au salarié.

3. Combien de fois peut-on renouveler un CDD de remplacement ?

Un CDD de remplacement à terme précis peut être renouvelé jusqu’à deux fois, sous réserve que le contrat initial le prévoie expressément ou qu’un avenant de renouvellement soit signé avant l’échéance, conformément à l’article L1243-13 du Code du travail. Toutefois, la durée totale du contrat, renouvellements compris, ne doit pas dépasser les plafonds légaux, qui varient selon la situation :

  • 9 mois si l’on attend la prise de poste d’un salarié recruté ;
  • 18 mois dans les cas standards d’absence temporaire ;
  • 24 mois si l’absence précède une suppression de poste.

L’absence de clause de renouvellement dans le contrat initial interdit à l’employeur de prolonger unilatéralement la durée du contrat, sauf accord exprès du salarié.

4. Doit-on respecter un délai de carence entre deux CDD de remplacement ?

Non, lorsqu’un CDD de remplacement succède à un autre CDD de remplacement, aucun délai de carence n’est requis, en vertu de l’article L1244-3-1 du Code du travail. Cela permet à l’employeur de conclure plusieurs CDD consécutifs avec le même salarié, tant que le motif du contrat reste le remplacement d’un salarié absent. En revanche, si le contrat précédent avait un autre motif (ex. : accroissement temporaire d’activité), un délai de carence doit obligatoirement être respecté avant la conclusion d’un nouveau CDD, sous peine de requalification en CDI.

5. Quelles sont les règles en matière de rupture anticipée du CDD de remplacement ?

Le CDD de remplacement peut être rompu de manière anticipée uniquement dans les cas prévus par la loi :

  • D’un commun accord entre les parties ;
  • En cas de faute grave du salarié ou de l’employeur ;
  • En cas de force majeure (événement imprévisible et irrésistible) ;
  • En cas d’inaptitude constatée par la médecine du travail ;
  • Lorsque le salarié justifie d’une embauche en CDI (article L1243-1 du Code du travail).

Pendant la période d’essai, l’employeur peut également rompre librement le contrat, sous réserve de respecter le délai de prévenance (24 ou 48 heures selon la durée de présence). Si la rupture anticipée ne répond pas à l’un de ces cas, elle est considérée comme abusive et peut donner lieu à des dommages et intérêts. Par ailleurs, sauf accord amiable, l’indemnité de précarité n’est pas due en cas de rupture anticipée légitime.

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