Dans les relations commerciales, le respect des engagements contractuels est au cœur de la confiance entre partenaires économiques. Toutefois, il n’est pas rare qu’une entreprise, pour des raisons diverses – difficultés de trésorerie, mauvaise foi, litige sur la prestation – se soustraie à son obligation de paiement à l’échéance convenue.
Ce défaut de paiement n’est pas un incident anodin : il peut fragiliser la santé financière du créancier, désorganiser son activité, voire menacer sa survie. Le droit offre cependant des recours précis et structurés permettant au créancier d’agir efficacement pour recouvrer sa créance. Encore faut-il en maîtriser les modalités, respecter les délais et choisir la procédure la plus adaptée à la situation.
Le point de départ du délai de prescription d’une créance commerciale est fixé à la date d’exigibilité de la facture. Conformément à l’article L110-4 du Code de commerce, ce délai est de cinq ans, sauf interruption ou suspension. Il convient de rappeler que la prescription ne peut être soulevée d’office par le juge selon l’article 2247 du Code civil, ce qui signifie que seul le débiteur peut en faire état. Passé ce délai, le créancier se retrouve privé de tout recours judiciaire.
Le non-paiement d’une facture peut entraîner des conséquences économiques sévères, en particulier pour les petites et moyennes entreprises. Une créance impayée altère directement la trésorerie du créancier, qui peut lui-même se retrouver en situation de défaut de paiement vis-à-vis de ses propres fournisseurs. Une multiplication de ces incidents peut conduire à une cessation des paiements, avec le risque d’ouverture d’une procédure collective (redressement ou liquidation judiciaire).
En cas de procédure collective engagée par l’entreprise débitrice, le créancier devra impérativement déclarer sa créance auprès du mandataire judiciaire dans un délai de deux mois à compter de la publication du jugement d’ouverture. À défaut, sa créance pourra être déclarée forclose, le privant ainsi d’un quelconque espoir de recouvrement.
Avant de recourir au contentieux, le droit encourage une phase amiable de règlement. Celle-ci permet de préserver la relation commerciale tout en favorisant un recouvrement moins coûteux.
Une simple relance téléphonique ou par courrier peut suffire à rappeler au débiteur son obligation. En l’absence de réaction, le créancier peut adresser une mise en demeure de payer, par lettre recommandée avec accusé de réception, en application de l’article 1344 du Code civil. Cette formalité interrompt la prescription et permet de démontrer la volonté du créancier de faire valoir son droit.
La mise en demeure doit mentionner :
Le créancier peut également recourir à un huissier de justice ou à un avocat, lesquels peuvent intervenir à cette phase pour signifier une sommation de payer ou enclencher une procédure contentieuse.
Lorsque la voie amiable échoue, le créancier peut saisir la justice pour obtenir le paiement de sa créance. Trois procédures principales existent, devant le tribunal de commerce si les parties sont commerçantes.
Prévue aux articles 1405 à 1425 du Code de procédure civile, cette procédure simplifiée et non contradictoire permet d’obtenir une ordonnance sans audience préalable. Elle suppose que la créance soit :
Le créancier doit présenter un dossier contenant :
Si le juge estime la requête fondée, il rend une ordonnance portant injonction de payer. Le débiteur peut former opposition dans un délai d’un mois après signification. En l’absence d’opposition, le créancier peut demander l’apposition de la formule exécutoire et engager l’exécution forcée par huissier.
Cette procédure d’urgence, encadrée par l’article 873 du Code de procédure civile, permet d’obtenir une condamnation provisoire du débiteur lorsque :
L’ordonnance est rendue rapidement (en général sous 30 jours). En cas d’appel, la procédure devient contradictoire. L’huissier peut alors exécuter l’ordonnance à titre provisoire, même si elle fait l’objet d’un recours.
Lorsque la créance est contestée ou que le créancier souhaite faire valoir des dommages-intérêts, il doit engager une procédure dite au fond. Elle nécessite la rédaction d’une assignation par huissier, signifiée au débiteur, puis l’enrôlement de l’affaire au greffe du tribunal compétent. L’issue est un jugement contradictoire après plaidoiries.
La représentation par avocat est obligatoire au-delà de 10 000 euros. En cas de décision défavorable, un appel peut être formé dans le mois de la signification du jugement.
Si l’entreprise débitrice est en état de cessation des paiements, le créancier peut demander au tribunal l’ouverture d’une procédure collective. Cette démarche lui permet de se faire reconnaître comme créancier dans la procédure, mais n’offre pas la garantie d’un paiement effectif, les actifs étant répartis entre tous les créanciers selon l’ordre légal des privilèges.
Agir rapidement en cas de facture impayée est une nécessité vitale pour toute entreprise soucieuse de préserver sa liquidité et de sécuriser ses relations d’affaires. Le droit français offre au créancier plusieurs outils juridiques complémentaires, de la mise en demeure amiable aux procédures contentieuses adaptées à la nature de la créance et à la stratégie adoptée.
Toutefois, une bonne connaissance des règles de procédure, des délais de prescription et des risques liés à une procédure collective s’impose pour maximiser les chances de succès. En cas de doute, il est recommandé de s’entourer d’un professionnel du droit afin de mettre en œuvre les actions les plus pertinentes.
Le délai pour agir en justice contre une entreprise débitrice est en principe de cinq ans, conformément à l’article L110-4 du Code de commerce, applicable aux actes de commerce entre professionnels. Ce délai commence à courir à compter de l’échéance de la facture, c’est-à-dire le jour où le paiement aurait dû intervenir. Il est important de noter que ce délai peut être interrompu (par exemple, par une mise en demeure, une reconnaissance de dette ou l’introduction d’un recours judiciaire) ou suspendu (dans certains cas particuliers prévus par la loi). Passé ce délai, la créance est prescrite, ce qui empêche le créancier d’en réclamer judiciairement le paiement, sauf si le débiteur ne soulève pas la prescription devant le juge (article 2247 du Code civil).
Oui, mais sous conditions. En droit commercial, le débiteur a la possibilité de contester la créance, notamment s’il estime que le service n’a pas été exécuté conformément au contrat (défaut, retard, non-conformité). Toutefois, la contestation doit être justifiée et sérieuse : une contestation dilatoire ou de mauvaise foi ne le libère pas de son obligation de paiement. En cas de litige, le créancier peut engager une action devant le tribunal de commerce, qui appréciera la réalité et la validité de la contestation. Une créance « sérieusement contestable » ne permet pas d’agir en référé provision (article 873 alinéa 2 du Code de procédure civile) mais impose une procédure au fond.
La procédure d’injonction de payer, régie par les articles 1405 à 1425 du Code de procédure civile, est adaptée aux créances non contestées. Le créancier doit déposer une requête écrite auprès du tribunal de commerce compétent (celui du siège social du débiteur), accompagnée de toutes les pièces justificatives : facture impayée, bon de commande, contrat, mise en demeure, etc. Cette procédure est non contradictoire : le juge statue sans audience. Si la demande est acceptée, une ordonnance portant injonction de payer est rendue. Elle doit être signifiée au débiteur, qui peut faire opposition dans un délai d’un mois. À défaut d’opposition, le créancier peut obtenir l’apposition de la formule exécutoire et mandater un huissier pour exécuter la décision.
Absolument. Le recours amiable est recommandé en première intention, notamment par lettre de relance, mise en demeure ou sommation de payer (article 1344 du Code civil). Ces démarches, en plus d’être souvent efficaces pour préserver les relations commerciales, permettent également d’interrompre le délai de prescription. En cas d’échec, il est parfaitement possible d’engager une procédure judiciaire : injonction de payer, référé provision ou assignation au fond. L’efficacité du recours contentieux repose souvent sur la qualité des preuves accumulées au stade amiable.
Dans ce cas, le créancier ne peut plus engager d’action individuelle en recouvrement. Il doit déclarer sa créance auprès du mandataire judiciaire dans un délai de deux mois suivant la publication du jugement d’ouverture de la procédure collective au BODACC (article L622-24 du Code de commerce). Cette déclaration conditionne la possibilité d’obtenir un paiement, qui dépendra ensuite de l’existence d’un plan de redressement ou de la réalisation des actifs en liquidation. Les créanciers sont alors payés selon un ordre de priorité légal (salariés, Trésor public, créanciers chirographaires, etc.). Si le créancier omet de déclarer sa créance dans les temps, il risque la forclusion, à moins de démontrer un cas de force majeure.