Travail

Erreur de paie ou retard : comment faire corriger son salaire

Estelle Marant
Collaboratrice
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Rappel de salaire et prescription : droits et recours du salarié

Le paiement du salaire constitue une obligation fondamentale de l’employeur. En contrepartie de son travail, le salarié doit percevoir une rémunération régulière, conformément aux dispositions légales et conventionnelles. Lorsqu’un salaire est impayé, partiellement versé ou mal calculé, le salarié peut légalement agir pour obtenir un rappel de salaire. Ce recours peut intervenir même s’il a accepté son bulletin de paie sans réserve, comme le prévoit l’article L. 3243-2 du Code du travail.

La jurisprudence rappelle de manière constante que le bulletin de salaire ne constitue pas une preuve de paiement. L’employeur doit donc être en mesure de démontrer qu’il a effectivement versé les sommes dues. Le salarié dispose, de son côté, de voies amiables et judiciaires pour faire valoir ses droits.

Sommaire

  1. Introduction
  2. Qu’est-ce qu’un rappel de salaire
  3. Les situations ouvrant droit à un rappel de salaire
  4. Délai de prescription et cadre légal
  5. Démarches amiables pour obtenir un rappel de salaire
  6. Saisine du Conseil de prud’hommes
  7. Sanctions encourues par l’employeur
  8. Cas particuliers de rappel de salaire
  9. Bonnes pratiques pour faire valoir ses droits
  10. Conclusion

Qu’est-ce qu’un rappel de salaire ?

Définition juridique

Le rappel de salaire est une somme due par l’employeur au salarié au titre de rémunérations non versées ou versées de manière incomplète. Il peut concerner :

  • le salaire de base ;
  • les heures supplémentaires ;
  • les primes et gratifications ;
  • les avantages en nature ;
  • ou toute indemnité prévue par la loi ou la convention collective.

L’article L. 3242-1 du Code du travail impose à l’employeur de verser la rémunération à une périodicité régulière, au moins une fois par mois. Un retard ou une erreur de versement justifie donc une réclamation salariale.

Les situations ouvrant droit à un rappel de salaire

Mauvaise application de la convention collective

Lorsqu’une convention collective plus favorable n’a pas été appliquée, le salarié peut demander un rappel correspondant à la différence entre le salaire perçu et le salaire dû. Cela concerne notamment les grilles de classification, les primes conventionnelles ou encore les majorations pour heures supplémentaires.

Date d’entrée erronée

La date d’ancienneté mentionnée sur le bulletin de salaire impacte le calcul des droits du salarié (prime d’ancienneté, congés, indemnités). Une erreur peut donner lieu à un rappel couvrant l’ensemble de la période non prise en compte.

Heures supplémentaires non rémunérées

Selon l’article L. 3121-28 du Code du travail, toute heure supplémentaire doit être rémunérée avec une majoration légale ou conventionnelle. Le salarié peut réclamer les sommes correspondantes, même plusieurs années après leur exécution.

Primes et gratifications impayées

Les primes contractuelles ou d’usage (prime de treizième mois, prime d’assiduité, gratification annuelle) doivent être payées si les conditions sont remplies. Leur non-versement ouvre droit à un rappel.

Prescription de l’action en rappel de salaire

Conformément à l’article L. 3245-1 du Code du travail, le salarié dispose d’un délai de 3 ans pour agir en paiement de salaire. Le délai court à partir :

  • du jour où il a connaissance de l’erreur ou de l’omission ;
  • ou, en cas de rupture du contrat de travail, des 3 années précédant cette rupture.

La saisine du Conseil de prud’hommes interrompt ce délai de prescription (article R. 1452-1 du Code du travail).

Les démarches amiables pour réclamer un rappel de salaire

Formulation de la réclamation

Avant toute action judiciaire, le salarié doit tenter une résolution amiable. Il peut :

  1. Informer oralement son employeur de l’erreur ou du retard de paiement.
  2. Adresser une mise en demeure écrite, idéalement en lettre recommandée avec accusé de réception, précisant :
    • l’élément de rémunération concerné ;
    • la période visée ;
    • le montant réclamé.

Cette étape permet souvent une régularisation rapide tout en interrompant la prescription si la lettre est correctement formulée.

Pièces justificatives à conserver

Pour appuyer sa demande, le salarié doit conserver :

  • les bulletins de paie concernés,
  • le contrat de travail,
  • les éventuels échanges écrits,
  • tout élément prouvant l’exécution des heures ou la réalisation de la prestation.

La procédure devant le Conseil de prud’hommes

Saisine du CPH

Si la demande reste sans effet, le salarié peut saisir le Conseil de prud’hommes, compétent pour tous les litiges relatifs au contrat de travail. Cette saisine peut être déposée au greffe ou en ligne.

Instruction et preuve

  • Le salarié n’est pas tenu de se faire représenter par un avocat, mais cette assistance est recommandée pour sécuriser la procédure.
  • La charge de la preuve du paiement incombe à l’employeur. L’émission d’un bulletin de salaire ne suffit pas : il doit produire des justificatifs de versement (virements, chèques encaissés).

Référé ou jugement au fond

Si la demande n’est pas sérieusement contestable, elle peut être examinée en référé, permettant une décision plus rapide. En cas de contestation sérieuse, l’affaire est instruite au fond.

Sanctions encourues par l’employeur

En cas de condamnation, le Conseil de prud’hommes peut :

  • ordonner le paiement du rappel de salaire avec intérêts de retard ;
  • imposer une astreinte en cas de non-exécution ;
  • allouer des dommages et intérêts si le salarié a subi un préjudice (retard de paiement répété, atteinte à sa situation financière) ;
  • prononcer, dans les cas graves, la résiliation judiciaire du contrat de travail, ouvrant droit aux indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (article L. 1235-3 C. trav.).

Cas particuliers

Rappel de salaire après la rupture du contrat

Un salarié ayant quitté l’entreprise peut toujours agir pour un rappel dans les 3 ans suivant la rupture. L’employeur reste redevable des sommes dues.

Rappel de salaire en cas de discrimination salariale

L’article L. 3221-2 du Code du travail consacre le principe d’égalité de rémunération. En cas de traitement inégal non justifié, le salarié peut réclamer un rappel couvrant l’intégralité de la période concernée, dans la limite légale de prescription.

Bonnes pratiques pour les salariés

  • Vérifier chaque bulletin de salaire attentivement.
  • Formuler toute contestation par écrit dans les plus brefs délais.
  • Conserver les preuves d’exécution du travail et des réclamations.
  • Agir avant l’expiration du délai de prescription de 3 ans.
  • Ne pas hésiter à saisir le Conseil de prud’hommes en cas d’inaction de l’employeur.

Conclusion

Le rappel de salaire est un droit fondamental du salarié, garanti par le Code du travail et protégé par une jurisprudence constante. Qu’il s’agisse d’une erreur, d’un retard ou d’une omission volontaire, l’employeur ne peut se soustraire à son obligation de paiement. Le salarié dispose de moyens juridiques efficaces — amiables et judiciaires — pour faire respecter ses droits et obtenir les sommes qui lui sont légitimement dues.

FAQ

1. Qu’est-ce qu’un rappel de salaire et dans quels cas peut-on le demander ?
Le rappel de salaire est la somme due au salarié lorsque l’employeur a omis ou retardé le versement d’une partie de la rémunération. Il peut intervenir dans plusieurs situations :

  • erreur de calcul sur le salaire de base ou sur les heures supplémentaires,
  • omission de primes, d’indemnités ou d’avantages en nature,
  • application d’une mauvaise convention collective, entraînant une rémunération inférieure à celle prévue,
  • erreur sur la date d’entrée dans l’entreprise, ayant des conséquences sur l’ancienneté,
  • ou encore retard de paiement régulier de la part de l’employeur.

Le droit au rappel de salaire est garanti par l’article L. 3243-2 du Code du travail, qui précise que l’acceptation d’un bulletin de paie n’éteint pas la créance salariale.

2. Quel est le délai légal pour réclamer un rappel de salaire ?
Le salarié dispose d’un délai de prescription de 3 ans pour agir, conformément à l’article L. 3245-1 du Code du travail. Ce délai commence à courir à partir :

  • du jour où le salarié a eu connaissance du non-paiement ou de l’erreur,
  • ou, s’il a quitté l’entreprise, à partir des trois années précédant la rupture du contrat de travail.

Ce délai peut être interrompu par la saisine du Conseil de prud’hommes, ce qui permet au salarié de préserver ses droits. Il est donc recommandé d’agir rapidement pour éviter la prescription partielle de la créance.

3. Quelles démarches amiables effectuer avant de saisir le Conseil de prud’hommes ?
Avant d’entamer une procédure judiciaire, la loi encourage une tentative amiable :

  • Étape 1 : informer l’employeur oralement pour signaler l’erreur.
  • Étape 2 : si rien n’est fait, envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception exposant le montant dû, la période concernée et la nature de la réclamation.
  • Étape 3 : conserver toutes les preuves écrites (courriels, fiches de paie, attestations) qui pourront être produites en justice.

Une régularisation amiable peut permettre de résoudre le litige rapidement sans passer par le juge. En l’absence de réponse, le salarié pourra engager une action prud’homale.

4. Comment se déroule une procédure devant le Conseil de prud’hommes ?
En cas d’échec amiable, le salarié peut saisir le Conseil de prud’hommes, juridiction compétente pour les litiges liés au contrat de travail.

  • La procédure débute par le dépôt d’une requête au greffe, en personne ou par voie dématérialisée.
  • L’affaire passe ensuite devant le bureau de conciliation et d’orientation, qui tente de trouver un accord.
  • Si aucun accord n’est trouvé, elle est renvoyée devant le bureau de jugement.
  • Le salarié n’est pas obligé d’avoir un avocat, mais une assistance juridique est recommandée pour sécuriser la procédure et maximiser ses chances de succès.

La charge de la preuve du paiement incombe à l’employeur. Le simple bulletin de paie ne suffit pas : il doit démontrer le versement effectif.

5. Quelles conséquences juridiques pour l’employeur en cas de rappel de salaire non réglé ?
Un employeur qui refuse ou tarde à payer un rappel de salaire encourt des sanctions financières et judiciaires :

  • condamnation au paiement des sommes dues avec intérêts de retard,
  • astreinte en cas de non-exécution de la décision,
  • dommages et intérêts pour compenser le préjudice subi par le salarié,
  • résiliation judiciaire du contrat de travail pouvant être prononcée en cas de manquements graves, équivalant à un licenciement sans cause réelle et sérieuse (article L. 1235-3 du Code du travail).

De plus, le non-paiement des salaires est considéré comme une faute lourde de l’employeur, pouvant engager sa responsabilité civile et, dans certains cas, donner lieu à des poursuites pénales.

6. Peut-on demander un rappel de salaire après avoir quitté l’entreprise ?
Oui. Le salarié dispose toujours d’un délai de 3 ans à compter de la date de rupture du contrat pour agir. Même après le départ, il peut réclamer :

  • des heures supplémentaires non payées,
  • des primes ou indemnités non versées,
  • une régularisation liée à une erreur sur l’ancienneté ou la convention collective applicable.

Cette action peut être introduite devant le Conseil de prud’hommes du lieu de travail, même si le salarié n’est plus dans l’effectif.

7. Peut-on demander un rappel de salaire en cas de discrimination ?
Oui. L’article L. 3221-2 du Code du travail consacre l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale. Si un salarié constate un écart de traitement non justifié (par exemple, un collègue perçoit une rémunération supérieure pour des fonctions équivalentes), il peut réclamer un rappel de salaire rétroactif.
En matière de discrimination salariale, la charge de la preuve est partagée :

  • le salarié doit présenter des éléments laissant supposer une discrimination,
  • l’employeur doit justifier objectivement la différence.

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