Le développement massif du commerce en ligne et des échanges numériques a transformé la manière dont les consommateurs achètent, vendent et interagissent. Mais cette évolution a aussi ouvert la voie à de nouvelles formes d’escroquerie, souvent sophistiquées, visant à tromper les internautes et à s’emparer de leurs données personnelles ou de leurs fonds. Phishing, fausses annonces, usurpation d’identité, logiciels malveillants… Les méthodes employées par les fraudeurs sont multiples et se perfectionnent chaque année.
Lorsqu’une arnaque survient, la question de la juridiction compétente pour faire valoir ses droits devient essentielle. Selon les circonstances, le justiciable peut agir devant les juridictions civiles pour obtenir le remboursement des sommes perdues, ou devant les juridictions pénales afin de sanctionner l’auteur de l’infraction et, le cas échéant, obtenir réparation.
Le droit français, à travers le Code pénal, le Code civil et le Code de la consommation, encadre strictement ces situations. Les articles 313-1 et suivants du Code pénal répriment l’escroquerie en ligne et prévoient des sanctions lourdes pour les auteurs, tandis que les dispositions civiles offrent aux victimes des leviers efficaces pour récupérer les sommes détournées.
L’article 313-1 du Code pénal définit l’escroquerie comme le fait de tromper une personne physique ou morale par l’usage d’un faux nom, d’une fausse qualité, ou par des manœuvres frauduleuses, afin de la déterminer à remettre des fonds ou un bien quelconque. Cette définition englobe les arnaques commises par voie numérique, quel que soit le canal utilisé (site Internet, courriel, SMS, plateforme d’annonces, etc.).
Les peines encourues sont particulièrement sévères : jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 375 000 € d’amende, voire davantage en cas de circonstances aggravantes (escroquerie en bande organisée ou impliquant une personne vulnérable).
L’escroquerie en ligne ouvre deux voies d’action distinctes pour la victime :
Le choix entre ces deux voies dépendra de la situation factuelle, de l’identification (ou non) de l’auteur et du montant du litige.
La juridiction civile est compétente lorsque l’arnaque découle d’une relation contractuelle (par exemple une vente en ligne fictive ou non exécutée). C’est le cas typique d’une offre frauduleuse sur une plateforme de vente entre particuliers, d’un site marchand trompeur ou encore d’un paiement détourné à l’aide de données bancaires obtenues par phishing.
Le consommateur lésé peut demander le remboursement des sommes versées ainsi que des dommages et intérêts pour le préjudice subi. Cette action s’appuie sur les dispositions du Code civil relatives à la responsabilité contractuelle (articles 1103 et suivants) ou délictuelle (article 1240).
Même lorsque l’auteur est situé à l’étranger, la victime peut saisir une juridiction française si :
Cette compétence est admise par la jurisprudence, qui reconnaît que le lieu de réalisation du dommage est un critère pertinent pour déterminer la compétence territoriale.
Lorsqu’une arnaque sur Internet est qualifiée d’escroquerie pénale, la victime peut déposer plainte auprès d’un commissariat, d’une gendarmerie ou directement auprès du procureur de la République. Si l’auteur n’est pas identifié, la plainte peut être déposée contre X.
Le tribunal correctionnel est alors compétent pour juger le ou les auteurs et, le cas échéant, accorder des dommages et intérêts à la victime constituée partie civile. Cette action peut se cumuler avec une procédure civile.
La prescription de l’action publique pour l’escroquerie est de 6 ans à compter de la découverte des faits (article 8 du Code de procédure pénale). En matière civile, la prescription de droit commun est de 5 ans (article 2224 du Code civil), sauf exceptions liées à la nature du contrat ou de la faute.
Le respect de ces délais est déterminant : passé ce laps de temps, l’action devient irrecevable.
Avant de saisir une juridiction, la victime peut tenter une résolution amiable en adressant une lettre de mise en cause à l’auteur présumé de l’arnaque ou à la plateforme concernée. Cette étape permet souvent de résoudre le litige rapidement, notamment lorsque l’auteur craint des poursuites.
Si cette démarche reste sans effet, l’envoi d’une mise en demeure juridiquement motivée, accompagnée d’une preuve de dépôt ou d’un accusé de réception, peut constituer un levier efficace pour inciter au remboursement.
Outre son efficacité dans certaines situations, la phase amiable facilite la procédure judiciaire ultérieure en démontrant la bonne foi de la victime et en constituant un élément probatoire utile devant le juge.
Si le litige n’est pas résolu, la victime peut saisir le tribunal judiciaire ou, si le montant du litige est inférieur à 10 000 €, le tribunal de proximité. L’action vise alors à obtenir la réparation intégrale du préjudice, y compris les frais engagés pour la procédure.
La victime peut parallèlement ou alternativement engager une procédure pénale. Cette démarche présente l’avantage de permettre au juge de sanctionner l’auteur et de prononcer des réparations financières au bénéfice de la victime. Elle peut être initiée par une plainte simple ou par une plainte avec constitution de partie civile.
Les arnaques sur Internet constituent aujourd’hui une menace juridique et économique majeure, mais le droit français offre aux victimes des moyens d’action structurés et efficaces. L’arsenal législatif combine la protection civile – centrée sur la réparation du dommage – et la répression pénale – axée sur la sanction des auteurs. Grâce aux dispositions des articles 313-1 et suivants du Code pénal, mais aussi du Code civil et du Code de la consommation, toute personne victime d’une escroquerie en ligne dispose de leviers concrets pour obtenir justice et réparation.
La double voie de recours (civile et pénale), la compétence territoriale étendue des juridictions françaises et la possibilité de recourir à des procédures amiables ou contentieuses assurent une protection juridique robuste aux consommateurs. La vigilance individuelle demeure importante, mais le cadre légal actuel permet de transformer une situation d’arnaque en une action structurée et défendable devant les tribunaux.
Ainsi, face à une escroquerie numérique, l’inaction n’est jamais une fatalité : agir rapidement et s’appuyer sur le droit applicable permet de rétablir l’équilibre et de faire respecter ses droits.
1. Quelle juridiction est compétente en cas d’arnaque sur Internet ?
La juridiction compétente dépend directement de l’objectif de la victime et de la nature juridique de l’affaire.
Cette distinction permet à la victime d’articuler deux voies complémentaires : la réparation financière et la sanction de l’auteur. En pratique, les victimes choisissent souvent d’engager une procédure pénale tout en se constituant partie civile, afin d’obtenir en une seule procédure la condamnation et la réparation. Les articles 313-1 et suivants du Code pénal encadrent et sanctionnent ces infractions.
2. Puis-je saisir un tribunal français si l’escroc est à l’étranger ?
Oui. Le droit français prévoit des règles de compétence territoriale étendues pour protéger les victimes. Ainsi, une personne résidant en France peut saisir une juridiction française dès lors que :
Ces principes sont reconnus par la jurisprudence et permettent de ne pas laisser les victimes démunies face à des escrocs opérant depuis l’étranger. Cette compétence internationale facilite également la coopération judiciaire et les demandes d’entraide, notamment en cas de procédure pénale.
3. Quels sont les délais pour agir en cas d’escroquerie en ligne ?
La victime doit agir dans des délais stricts :
Une action rapide renforce les chances d’aboutir à une condamnation ou à un remboursement effectif. En pratique, il est conseillé de déposer plainte et de constituer un dossier probant dès la constatation des faits : captures d’écran, échanges de mails, preuves de paiement, annonces frauduleuses, etc.
4. Quels recours sont possibles en cas d’arnaque sur Internet ?
Le droit français prévoit plusieurs recours adaptés à la situation :
Ces recours sont cumulables : une victime peut tout à fait initier une procédure pénale et une procédure civile en parallèle.
5. Pourquoi engager une procédure amiable avant un procès ?
La procédure amiable est une étape stratégique dans la gestion des litiges liés aux arnaques en ligne. Elle présente plusieurs avantages :
Si cette phase échoue, elle ne ferme aucune porte : au contraire, elle renforce la crédibilité de la victime et la solidité juridique de son recours judiciaire.