Dans un contexte économique marqué par une hausse continue des retards de paiement, la gestion du poste client constitue un enjeu fondamental pour la pérennité des entreprises.
Toute facture impayée peut rapidement fragiliser la trésorerie et générer un risque financier significatif. Il est donc essentiel pour les professionnels de distinguer deux situations bien distinctes : la créance douteuse, qui repose sur une incertitude quant au recouvrement, et la créance irrécouvrable, qui acte une perte définitive.
Si ces deux notions semblent proches, leurs implications juridiques, fiscales et comptables diffèrent profondément. À travers cet article, defendstesdroits.fr vous propose une analyse rigoureuse de ces deux types de créances afin de mieux comprendre leur traitement et d’adopter les bons réflexes en cas d’impayés.
La créance douteuse est celle dont l’exigibilité est certaine, mais dont le recouvrement semble incertain. En d’autres termes, le créancier a droit au paiement, mais des éléments extérieurs compromettent la probabilité d’encaissement.
Juridiquement, aucune définition légale stricte n’est donnée à cette notion. Elle s’inscrit toutefois dans le principe de prudence comptable, obligeant les entreprises à tenir compte des risques de non-recouvrement.
Parmi les signaux d’alerte :
Il ne s’agit ni d’une créance litigieuse (contestée sur le fond), ni d’une créance irrécouvrable (perte définitive), mais d’un niveau intermédiaire de risque.
La créance irrécouvrable est celle pour laquelle le créancier a épuisé toutes les voies de recouvrement sans succès. Elle doit être requalifiée en perte, le paiement n’étant plus envisageable, y compris par la voie judiciaire.
Plusieurs situations justifient cette qualification :
L'article L.631-1 et suivants du Code de commerce précise les critères d’ouverture des procédures collectives, indicateurs forts d’une irrécouvrabilité imminente.
La distinction entre créance douteuse et créance irrécouvrable repose avant tout sur le degré de certitude quant à l’impossibilité de recouvrement de la somme due. Si ces deux situations traduisent un risque de non-paiement, elles n’ont ni les mêmes conséquences comptables, ni les mêmes implications fiscales, ni les mêmes conditions de traitement dans la gestion du poste client.
Une créance est qualifiée de douteuse lorsque, bien que certaine, liquide et exigible, son paiement devient incertain en raison d'éléments extérieurs : retards répétés, absence de réponse du débiteur, difficultés financières présumées. Le créancier conserve toutefois l’espoir légitime de recouvrer la somme.
Il s’agit d’un risque probable, mais pas encore définitif. Cette situation impose à l’entreprise d’anticiper une éventuelle perte en comptabilisant une provision pour dépréciation de la créance, sans pour autant considérer que la perte est réalisée.
Une créance devient irrécouvrable dès lors que le recouvrement est objectivement impossible : liquidation judiciaire du débiteur, carence constatée par un huissier, absence totale d’actif saisissable…
Ici, le paiement est définitivement exclu, et la perte est actée de manière irréversible dans les comptes. La créance est sortie de l’actif, et l’entreprise est en droit de la constater en perte dans le compte de résultat.
Il est fondamental de noter que seule la créance irrécouvrable ouvre droit à la récupération de la TVA précédemment versée à l’administration fiscale, conformément à l’article 272 du Code général des impôts (CGI). En revanche, une créance simplement douteuse ne permet aucune déduction de TVA, puisque le paiement reste possible.
Ainsi :
Cette distinction n’est pas seulement théorique : elle conditionne les décisions comptables, les stratégies de recouvrement et les optimisations fiscales que peut mettre en œuvre une entreprise.
Identifier les clients à risque est un levier fondamental de credit management. Cela suppose une veille constante sur :
Dans le cadre d’une procédure amiable, un huissier de justice peut obtenir des renseignements bancaires via le FICOBA, à condition de disposer d’un titre exécutoire.
Lorsque la créance devient douteuse, l’entreprise doit provisionner la perte potentielle dans sa comptabilité :
Sur le plan fiscal, deux conditions doivent être remplies pour que la provision soit déductible (BOI-BIC-PROV-40-10-20) :
La provision ne porte que sur la part HT de la créance. Si un paiement intervient ultérieurement, la somme est réintégrée dans le résultat imposable.
Pour faire reconnaître une créance comme irrécouvrable, le créancier doit obtenir un certificat d’irrécouvrabilité, délivré par :
Ce document constitue une preuve juridique de l’impossibilité définitive de recouvrement, et permet :
L'écriture comptable correspondante :
Lorsqu’une créance devient irrécouvrable, l’entreprise dispose d’un levier fiscal important : la possibilité de récupérer la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) précédemment déclarée et versée au Trésor public. Cette mesure, souvent méconnue des PME, peut pourtant représenter un enjeu de trésorerie significatif.
En application de l’article 272 du Code général des impôts (CGI), deux conditions cumulatives doivent impérativement être réunies :
« Facture demeurée impayée pour la somme de … euros (prix net) et pour la somme de … euros (montant de la TVA) qui ne peut faire l’objet d’une déduction ».
Cette mention a pour but de prévenir toute tentative de déduction indue de la TVA par le débiteur.
Cette possibilité de réintégration de TVA est un mécanisme de correction fiscale qui permet à l’entreprise de ne pas supporter indéfiniment la charge fiscale d’une opération non réglée. Elle s’avère d’autant plus stratégique que la créance initiale peut être importante et que la trésorerie est déjà impactée par la perte du chiffre d’affaires correspondant.
En définitive, bien que soumise à formalisme, la récupération de TVA en cas de créance irrécouvrable constitue un dispositif efficace pour limiter les effets financiers négatifs liés aux impayés. Les entreprises ont donc tout intérêt à documenter rigoureusement leurs démarches de recouvrement afin de sécuriser ce droit.
La maîtrise de la distinction entre créance douteuse et créance irrécouvrable est indispensable à toute entreprise soucieuse de sécuriser sa gestion financière. Outre les enjeux comptables, cette distinction a des répercussions fiscales notables, notamment en matière de récupération de la TVA.
Elle conditionne également les stratégies de recouvrement à adopter, qu'elles soient amiables ou judiciaires. Dès l’apparition de signaux de défaillance chez un client, il convient d’agir avec diligence, de documenter ses démarches, et, le cas échéant, d’obtenir les preuves nécessaires pour justifier une dépréciation ou une annulation de créance.
En s’appuyant sur les dispositifs légaux en vigueur, notamment les articles 272 du CGI, L.152-2 du CPCE ou encore L.631-1 du Code de commerce, les créanciers disposent d’outils concrets pour limiter les pertes et préserver leur équilibre financier.
Une créance douteuse est une créance certaine, liquide et exigible dont le recouvrement devient incertain en raison de la situation financière du débiteur. Contrairement à une créance litigieuse, elle n’est pas contestée sur le fond mais menacée par des éléments économiques défavorables : retards répétés de paiement, absence de réponse du client, signes de difficultés financières (perte de marché, restructuration, etc.).
Sur le plan comptable, elle est traitée selon le principe de prudence : l’entreprise doit la provisionner via une dépréciation comptable au débit du compte 68174 et au crédit du compte 491, conformément à l’article 38-2 du Code général des impôts et à la doctrine fiscale issue du BOI-BIC-PROV-40-10-20.
Une créance devient irrécouvrable lorsque toutes les démarches de recouvrement amiable ou judiciaire ont échoué et que la perte est certaine et définitive. Plusieurs événements peuvent justifier cette qualification :
La distinction repose sur le degré de certitude de non-recouvrement :
Pour obtenir la récupération de la TVA, l’entreprise doit :
« Facture demeurée impayée pour la somme de … euros (prix net) et pour la somme de … euros (montant de la TVA) qui ne peut faire l’objet d’une déduction (article 272 du Code général des impôts) »
Cette procédure est indispensable pour que l’administration fiscale accepte la rectification de la TVA collectée.
Lorsque la perte est actée, l’entreprise doit annuler la créance douteuse et enregistrer la perte dans ses écritures comptables. L’écriture classique est la suivante :