Civil

Jardin laissé à l’abandon : obligations et recours juridiques

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Mauvais entretien du jardin voisin : solutions légales pour agir

Un jardin laissé à l’abandon peut rapidement devenir source de nuisances pour le voisinage : prolifération de mauvaises herbes, envahissement par les ronces, odeurs désagréables liées à des végétaux en décomposition ou à des déchets accumulés. Ces désordres peuvent altérer la jouissance de votre propriété et même avoir un impact sur sa valeur.

Le droit de propriété, protégé par l’article 544 du Code civil, n’est pas absolu lorsqu’il est exercé au détriment d’autrui. En matière d’entretien, le propriétaire doit veiller à ce que son terrain ne soit pas à l’origine d’un trouble anormal de voisinage.

La loi prévoit plusieurs leviers d’action pour contraindre un voisin à entretenir son jardin, que ce soit par action directe sur les végétaux empiétant sur votre terrain, par intervention de la mairie ou par voie judiciaire. defendstesdroits.fr fait le point sur vos droits et sur les démarches à entreprendre.

Sommaire

  1. Introduction
  2. Cadre juridique et obligations du propriétaire
  3. Végétaux dépassant sur votre terrain : ce que dit la loi
  4. Identifier et contacter le propriétaire
  5. Propriétaire ou locataire : qui doit entretenir ?
  6. Recours amiables en cas de litige
  7. Recours judiciaires et pouvoirs du maire
  8. Conclusion

Cadre juridique et obligations du propriétaire

Selon l’article 1240 du Code civil, tout fait de l’homme qui cause un dommage à autrui oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Ainsi, un propriétaire laissant son jardin à l’abandon peut voir sa responsabilité engagée si l’état de son terrain vous cause un préjudice avéré.

Par ailleurs, l’article L.2213-25 du Code général des collectivités territoriales donne pouvoir au maire d’ordonner, par arrêté, l’exécution de travaux de remise en état. En cas de refus, la commune peut les faire réaliser aux frais du propriétaire. Cette procédure s’applique notamment pour des raisons de salubrité ou de sécurité publique.

Végétaux dépassant sur votre terrain : ce que dit la loi

Le régime juridique diffère selon la nature des végétaux :

  • Branches d’arbres, arbustes ou arbrisseaux :
    L’article 673 alinéa 1 du Code civil interdit de couper soi-même les branches qui dépassent sur votre terrain. Vous pouvez cependant exiger que le propriétaire les coupe, et saisir le juge si nécessaire.
  • Racines, ronces ou brindilles :
    L’article 673 alinéa 2 du Code civil autorise à couper soi-même celles qui avancent au-delà de la limite séparative. Vous pouvez le faire sans accord préalable, à condition de ne pas pénétrer sur le terrain voisin.

Identifier et contacter le propriétaire

  • Si le propriétaire est connu :
    Adressez-lui un courrier recommandé demandant l’élagage, le débroussaillage ou toute mesure nécessaire pour supprimer la nuisance. En cas de refus ou d’absence de réponse, une action devant le juge de proximité ou le tribunal judiciaire est possible pour obtenir la réparation du préjudice.
  • Si le propriétaire est inconnu :
    Saisissez le service communal d’hygiène et de santé. Si les recherches restent infructueuses, la mairie peut dresser un procès-verbal d’abandon et faire réaliser les travaux d’office.

Propriétaire ou locataire : qui doit entretenir ?

L’obligation d’entretien d’un jardin incombe en principe au propriétaire du terrain, car il est le titulaire du droit de propriété et en assume la responsabilité vis-à-vis des tiers. Cependant, lorsqu’un bien immobilier est loué, la loi et la jurisprudence organisent une répartition précise des charges d’entretien entre bailleur et locataire.

  • Règles générales
    Conformément à l’article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire doit « prendre à sa charge l’entretien courant du logement, y compris des extérieurs ». Cette obligation est précisée par le décret n°87-712 du 26 août 1987, qui dresse la liste des réparations locatives. Pour les espaces verts, il s’agit notamment :
    • De la tonte régulière de la pelouse ;
    • De la taille des haies, arbustes et massifs ;
    • De l’élagage des arbres pour éviter les branches dangereuses ou gênantes ;
    • Du désherbage des allées et espaces plantés ;
    • Du remplacement des plantes ou arbustes morts, sauf en cas de force majeure.
  • Cas particuliers
    Si le bail prévoit expressément que certaines tâches sont à la charge du propriétaire (par exemple, l’élagage d’arbres de grande hauteur ou l’abattage d’arbres malades), ces stipulations s’imposent aux parties.
    En copropriété, le règlement peut également répartir certaines obligations d’entretien entre copropriétaires, en particulier pour les espaces communs.
  • Responsabilité vis-à-vis des tiers
    Même si le locataire assume l’entretien courant, le propriétaire bailleur reste responsable vis-à-vis des tiers et de la commune si le jardin est laissé dans un état préjudiciable à la sécurité ou à la salubrité publiques. Ainsi, en cas de mise en demeure par la mairie sur le fondement de l’article L.2213-25 du Code général des collectivités territoriales, le propriétaire est tenu de veiller à l’exécution des travaux, quitte à se retourner ensuite contre son locataire.

En résumé, si le locataire assure l’entretien courant, le propriétaire demeure garant du respect des obligations légales liées à la propriété du terrain. Une clause claire dans le bail permet d’éviter la plupart des litiges en la matière.

Recours amiables en cas de litige

Avant toute saisine du tribunal, il est fortement recommandé d’engager une démarche amiable. Cette approche permet non seulement d’éviter un contentieux long et coûteux, mais aussi de préserver la relation de voisinage.

  • Envoyer une mise en cause
    La mise en cause consiste à adresser au voisin un courrier recommandé avec accusé de réception, exposant clairement :
    • Les nuisances constatées (mauvaises herbes, ronces, odeurs, végétaux empiétant sur votre terrain) ;
    • Les textes juridiques applicables, notamment l’article 1240 du Code civil pour la responsabilité civile et l’article 673 du Code civil pour l’élagage et l’entretien des végétaux ;
    • Une demande précise de remise en état dans un délai déterminé.
      Ce courrier a une valeur probatoire importante : il démontre, devant le juge, que vous avez tenté un règlement à l’amiable avant de recourir à la justice. Il est recommandé de conserver une copie et l’accusé de réception comme preuve.
  • Proposer une conciliation
    Si la mise en cause reste sans effet, il est possible de recourir à un conciliateur de justice. Cette procédure, gratuite et prévue par les articles 1536 et suivants du Code de procédure civile, consiste en une rencontre entre les parties sous l’égide d’un tiers impartial nommé par le tribunal.
    La conciliation permet de :
    • Réinstaurer le dialogue dans un cadre apaisé ;
    • Trouver un compromis respectant les droits et obligations de chacun ;
    • Établir un accord écrit, qui peut être homologué par le juge et avoir force exécutoire.

Cette phase amiable est souvent la plus efficace, car elle offre la possibilité de résoudre le litige rapidement tout en évitant les frais et les délais inhérents à une procédure judiciaire. Elle constitue également un gage de bonne foi en cas de saisine ultérieure du tribunal.

Recours judiciaires et pouvoirs du maire

En l’absence de solution amiable :

  • Vous pouvez saisir le tribunal judiciaire pour obtenir la condamnation du voisin à effectuer les travaux et, le cas échéant, à vous indemniser ;
  • Vous pouvez demander au maire d’intervenir sur le fondement de l’article L.2213-25 CGCT, avec possibilité pour la commune d’exécuter les travaux d’office.

Conclusion

Le mauvais entretien d’un jardin voisin n’est pas un simple désagrément : il peut constituer un trouble anormal de voisinage engageant la responsabilité de son propriétaire ou de son locataire.

Le cadre légal, articulé autour de l’article 1240 du Code civil, de l’article 673 du Code civil et de l’article L.2213-25 du CGCT, offre plusieurs voies d’action, allant de la mise en demeure amiable à l’intervention d’office par la mairie, en passant par la saisine du tribunal judiciaire.

La clé réside dans une démarche structurée : constater les nuisances, rappeler au voisin ses obligations légales, proposer un règlement amiable et, si nécessaire, engager une procédure judiciaire. Dans tous les cas, il est préférable de conserver des preuves précises (photographies, constats, courriers) afin de sécuriser toute action future.

En combinant la connaissance des textes, la préparation rigoureuse du dossier et la progressivité des démarches, il est possible de faire cesser les nuisances tout en préservant, autant que possible, la relation de voisinage. L’information juridique et la réactivité restent vos meilleurs atouts pour obtenir un environnement sain et conforme à vos droits.

FAQ

1. Le voisin est-il obligé d’entretenir son jardin ?
Oui. L’entretien d’un terrain fait partie des obligations liées au droit de propriété. Selon l’article 1240 du Code civil, tout propriétaire qui cause un préjudice à autrui en raison de sa négligence engage sa responsabilité civile. Un jardin laissé à l’abandon peut provoquer des nuisances sonores, visuelles ou olfactives, favoriser la prolifération d’animaux nuisibles, ou envahir les terrains voisins.
Par ailleurs, l’article L.2213-25 du Code général des collectivités territoriales permet au maire d’ordonner au propriétaire de réaliser des travaux de remise en état. Si ce dernier ne s’exécute pas, la commune peut faire exécuter les travaux à ses frais.

2. Puis-je couper les branches ou racines qui dépassent sur mon terrain ?
L’article 673 du Code civil établit une distinction :

  • Branches d’arbres, arbustes ou arbrisseaux : vous ne pouvez pas les couper vous-même. Vous pouvez exiger du propriétaire qu’il le fasse, et saisir le juge si nécessaire.
  • Racines, ronces ou brindilles : vous pouvez les couper vous-même à la limite séparative, sans autorisation, à condition de ne pas pénétrer sur le terrain voisin.
    Cette règle vise à protéger la propriété d’autrui tout en permettant au voisin lésé de se défendre contre l’envahissement végétal.

3. Que faire si je ne connais pas le propriétaire du terrain mal entretenu ?
Si le propriétaire est inconnu ou injoignable, vous pouvez saisir le service communal d’hygiène et de santé de votre mairie. Ce service recherchera le propriétaire via le service de publicité foncière.
Si les recherches échouent, la mairie peut dresser un procès-verbal d’abandon de terrain. Cette procédure ouvre la possibilité de faire exécuter les travaux d’office, notamment en cas de risque sanitaire ou de sécurité.

4. Comment agir si mon voisin refuse d’entretenir son jardin malgré ma demande ?
La démarche classique comporte plusieurs étapes :

  • Lettre de mise en cause : un courrier recommandé exposant les nuisances constatées, les textes applicables et la demande précise de remise en état.
  • Mise en demeure : si le voisin ne réagit pas, cette lettre plus formelle, également recommandée, fixe un délai pour agir et avertit des suites judiciaires.
  • Conciliation : rencontre gratuite avec un conciliateur de justice pour tenter un accord à l’amiable.
  • Saisine du tribunal judiciaire : pour obtenir une décision contraignant le voisin à effectuer les travaux et, le cas échéant, à indemniser le préjudice.
  • Intervention du maire : en parallèle ou en complément, le maire peut ordonner les travaux sur le fondement de l’article L.2213-25 CGCT.

5. Le locataire ou le propriétaire est-il responsable de l’entretien ?
En principe, selon le décret n°87-712 du 26 août 1987 pris en application de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est tenu d’assurer l’entretien courant du jardin : tonte, taille, élagage, désherbage, remplacement des haies et arbustes morts.
Cependant, le propriétaire bailleur reste responsable vis-à-vis des tiers et de la commune si le terrain est laissé à l’abandon. Si le bail prévoit que certaines tâches incombent au propriétaire, celles-ci doivent être respectées. En cas de litige, c’est donc le contrat de bail qui détermine la répartition exacte des responsabilités.

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