Médiation judiciaire et conventionnelle : comment faire valoir ses droits

Estelle Marant
Collaboratrice
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Recourir à un médiateur pour éviter un procès : ce qu’il faut savoir

Dans un contexte où les litiges se multiplient et encombrent les juridictions, la médiation s’impose comme un mode alternatif de règlement des différends de plus en plus privilégié. Elle permet de résoudre un conflit sans passer par un procès, grâce à l’intervention d’un médiateur de justice, tiers neutre et indépendant. Cette procédure, à la fois souple, confidentielle et rapide, est encadrée par le Code de procédure civile et peut intervenir avant ou pendant une procédure judiciaire.

En France, la médiation concerne un large éventail de situations : litiges civils, commerciaux, familiaux, sociaux, ou encore litiges de consommation. Elle peut être conventionnelle (à l’initiative des parties) ou judiciaire (ordonnée par le juge). Cette démarche a pour objectif principal de favoriser le dialogue, d’éviter un procès long et coûteux, et de parvenir à une solution acceptée par toutes les parties.

Le recours à la médiation est parfois obligatoire pour certains litiges de faible montant ou relevant du droit de la consommation. Dans d’autres cas, il demeure facultatif mais fortement encouragé par les juridictions.

Sommaire

  1. Introduction
  2. Le rôle et le statut du médiateur de justice
  3. Les litiges concernés par la médiation
  4. Quand la médiation est-elle obligatoire ?
  5. Comment saisir un médiateur ?
  6. Déroulement de la médiation
  7. Le coût de la médiation
  8. La valeur juridique de l’accord
  9. Médiation vs conciliation
  10. Avantages de la médiation
  11. Références juridiques à connaître
  12. Conclusion

Le rôle et le statut du médiateur de justice

Un tiers neutre et impartial

Le médiateur de justice est une personne physique ou morale qui intervient à la demande des parties ou sur décision du juge. Il ne juge pas, ne prend pas parti et ne rend pas de décision contraignante. Son rôle est d’aider les parties à renouer le dialogue, à clarifier leurs positions respectives et à co-construire un accord durable.

Selon l’article 131-4 du Code de procédure civile, le médiateur doit présenter des garanties de compétence, d’indépendance et d’impartialité. Il ne peut être désigné s’il a été condamné pénalement ou s’il existe un risque de conflit d’intérêts avec les parties.

Médiation judiciaire et médiation conventionnelle

Deux régimes coexistent :

  • La médiation conventionnelle, qui intervient avant toute saisine du tribunal. Les parties décident librement de recourir à un médiateur pour tenter de trouver une solution amiable.
  • La médiation judiciaire, prévue à l’article 131-1 du Code de procédure civile, qui est proposée ou ordonnée par le juge avec l’accord des parties. Elle intervient dans le cadre d’un procès en cours.

Dans les deux cas, la médiation repose sur le consentement et la coopération des parties.

Les litiges concernés par la médiation

Les litiges civils et commerciaux

La médiation peut être envisagée dans une grande variété de situations, notamment :

  • conflits de voisinage, bornage, servitudes ;
  • différends entre propriétaires et locataires (loyers impayés, dépôt de garantie non restitué) ;
  • recouvrement de créances commerciales ;
  • litiges entre consommateurs et professionnels ;
  • désaccords entre associés ou partenaires commerciaux.

Les litiges familiaux

La médiation familiale est particulièrement utilisée pour résoudre des litiges relatifs :

  • au droit de garde et de visite d’un enfant,
  • au partage des biens après une séparation,
  • aux conflits entre héritiers dans le cadre d’une succession,
  • à des différends entre parents et enfants majeurs.

Elle est obligatoire à titre expérimental dans certaines juridictions (par exemple devant le juge aux affaires familiales) lorsque la situation le permet. Elle est exclue en cas de violence intrafamiliale.

Les litiges de consommation

En matière de consommation, les professionnels ont l’obligation légale de proposer aux consommateurs un médiateur agréé (articles L. 611-1 et suivants du Code de la consommation).
Les coordonnées du médiateur doivent figurer sur les contrats, les factures ou le site internet du professionnel. Cette médiation est gratuite pour le consommateur et constitue un préalable obligatoire avant toute action judiciaire.

Quand la médiation est-elle obligatoire ?

La tentative de médiation est imposée par la loi pour certains litiges civils inférieurs à 5 000 € (article 750-1 du Code de procédure civile). Elle concerne notamment :

  • les litiges de bornage et servitudes ;
  • la distanciation de plantations ;
  • la distance de construction ;
  • le curage des fossés et canaux d’irrigation.

Cette exigence vise à désengorger les tribunaux en privilégiant une résolution amiable. Si cette tentative n’est pas respectée, le juge peut déclarer la demande irrecevable.

Comment saisir un médiateur ?

Désignation dans le cadre judiciaire

Lorsqu’une médiation est ordonnée par le juge, ce dernier désigne le médiateur sur une liste de la cour d’appel. Les parties sont informées de la durée de la médiation (généralement trois mois, renouvelable une fois selon l’article 131-3 du Code de procédure civile) et du coût estimé. Le juge fixe une audience pour suivre l’avancement de la médiation.

Saisine volontaire dans le cadre conventionnel

En dehors de toute procédure judiciaire, les parties peuvent librement :

  • s’adresser au Service d’accueil unique du justiciable (SAUJ) du tribunal,
  • contacter une Maison de justice et du droit,
  • solliciter un médiateur inscrit sur la liste de la cour d’appel,
  • recourir à un médiateur agréé en consommation si le litige concerne une relation avec un professionnel.

Le choix du médiateur doit se faire sur la base de sa compétence et de son indépendance.

Déroulement de la médiation

La médiation se déroule en plusieurs étapes encadrées par le Code de procédure civile :

  1. Ouverture de la médiation : le médiateur réunit les parties, expose la méthode et fixe les règles de confidentialité.
  2. Échanges : chaque partie présente son point de vue, ses attentes et ses griefs. Le médiateur facilite la communication.
  3. Négociation : les parties recherchent ensemble un terrain d’entente, sans contrainte.
  4. Accord ou échec : si un accord est trouvé, il peut être homologué par le juge pour lui donner force exécutoire. En cas d’échec, la procédure judiciaire reprend son cours.

La durée légale de la médiation judiciaire est de trois mois, renouvelable une fois.

Le coût de la médiation

La médiation de la consommation est gratuite pour le consommateur.
En revanche, pour les médiations civiles, commerciales ou familiales, les honoraires du médiateur sont :

  • fixés par le juge, lorsqu’il s’agit d’une médiation judiciaire,
  • déterminés librement dans le cadre conventionnel.

Le coût est réparti entre les parties, sauf décision contraire du juge. Dans certains cas, l’aide juridictionnelle peut couvrir tout ou partie des frais de médiation.

La valeur juridique de l’accord issu de la médiation

L’accord conclu peut être formalisé par écrit et signé par les parties. Si elles souhaitent lui donner une valeur exécutoire, elles peuvent le faire homologuer par le juge.
La loi du 22 décembre 2021 a renforcé la sécurité juridique de ces accords : ceux signés par les avocats des parties peuvent directement avoir force exécutoire, sans passer par le juge.

En cas d’échec de la médiation, la procédure judiciaire reprend et le juge tranche le litige.

La médiation vs la conciliation : une différence importante

La médiation et la conciliation sont deux modes amiables de règlement des conflits, mais elles diffèrent par leur nature :

  • le conciliateur de justice est un auxiliaire de justice assermenté, dont l’intervention est gratuite,
  • le médiateur est un professionnel indépendant qui doit remplir des conditions de compétence et de neutralité, et dont l’intervention peut être rémunérée.

La conciliation est souvent utilisée pour les petits litiges de proximité, tandis que la médiation est privilégiée dans des affaires plus complexes ou nécessitant un accompagnement spécifique.

Les avantages de la médiation

La médiation présente de nombreux avantages pour les justiciables :

  • elle permet de gagner du temps et d’éviter une procédure longue,
  • elle favorise des solutions sur mesure adaptées à la situation,
  • elle préserve la confidentialité des échanges,
  • elle limite les coûts liés à une action judiciaire,
  • elle contribue à désamorcer durablement les conflits.

De plus, lorsqu’un accord est trouvé, il est souvent mieux respecté, car il résulte de la volonté commune des parties.

Conclusion

La médiation constitue aujourd’hui une voie efficace et reconnue de règlement des litiges, encouragée par le législateur et les juridictions françaises. Elle repose sur le dialogue, la volonté des parties et l’intervention d’un tiers neutre garant de l’équilibre du processus.

Qu’elle soit conventionnelle ou judiciaire, elle offre une alternative pragmatique aux procès longs et coûteux, et favorise des accords pérennes. Encadrée par le Code de procédure civile et la réglementation en matière de consommation, la médiation est un outil juridique accessible à tous les justiciables pour faire valoir leurs droits autrement.

FAQ

1. Quel est le rôle d’un médiateur de justice ?
Le médiateur de justice est un tiers neutre et indépendant qui aide les parties à résoudre leur différend à l’amiable. Il facilite la communication, clarifie les points de désaccord et accompagne les parties vers un accord commun sans imposer de solution. Contrairement à un juge, il ne rend pas de décision. Cette démarche est encadrée par les articles 131-1 à 131-15 du Code de procédure civile.

2. Dans quels cas peut-on recourir à la médiation ?
La médiation est possible dans de nombreux domaines :

  • Litiges civils (bornage, servitudes, voisinage, bail, créances),
  • Litiges familiaux (droit de garde, pension alimentaire, succession),
  • Litiges commerciaux (désaccords entre partenaires ou fournisseurs),
  • Litiges de consommation (conflits avec des professionnels).
    Elle est particulièrement adaptée lorsque les parties souhaitent éviter un procès et maintenir une relation apaisée.

3. La médiation est-elle obligatoire dans certains cas ?
Oui, la médiation est obligatoire pour certains litiges civils inférieurs à 5 000 € (article 750-1 du Code de procédure civile). Elle s’applique notamment aux litiges de bornage, servitudes, plantations, constructions ou curage de fossés. En matière de consommation, elle est également une étape préalable obligatoire avant de saisir le tribunal. À défaut, la demande peut être jugée irrecevable.

4. Comment saisir un médiateur ?
La saisine d’un médiateur dépend du contexte :

  • Médiation judiciaire : le juge désigne un médiateur sur la liste officielle de la cour d’appel.
  • Médiation conventionnelle : les parties choisissent librement un médiateur via le Service d’accueil unique du justiciable (SAUJ), une Maison de justice et du droit, ou un médiateur agréé.
    En matière de consommation, les coordonnées du médiateur sont fournies par le professionnel. Cette procédure est confidentielle et encadrée par la loi.

5. Quel est le coût et la valeur juridique d’une médiation ?

  • Coût : la médiation est gratuite pour les litiges de consommation. Pour les autres domaines, les honoraires sont fixés par le juge ou négociés librement. Ils peuvent être partagés entre les parties et, dans certains cas, couverts par l’aide juridictionnelle.
  • Valeur juridique : si un accord est trouvé, il peut être homologué par le juge pour obtenir force exécutoire. Depuis la loi du 22 décembre 2021, un accord signé par les avocats des parties a également cette valeur sans passer par le tribunal. Cela renforce la sécurité juridique de la médiation.

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