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Micro-entreprise ou SASU : pourquoi et comment changer de statut ?

Jordan Alvarez
Editeur
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Passer de la micro-entreprise à la SASU : les formalités à connaître

La micro-entreprise séduit chaque année des milliers d’entrepreneurs en raison de sa simplicité de création et de gestion. Accessible sans formalités lourdes, elle permet de tester une activité économique avec un cadre fiscal et social allégé. Toutefois, ce régime présente aussi des limites structurelles : seuils de chiffre d’affaires plafonnés, absence de personnalité morale, impossibilité d’accueillir de nouveaux associés, et surtout responsabilité juridique directe de l’entrepreneur.

Nombreux sont donc les indépendants qui, après quelques années d’activité, envisagent de franchir un cap en adoptant un statut sociétaire plus protecteur et plus flexible. La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) s’impose alors comme une option de choix. Dotée d’une personnalité morale (article L210-6 du Code de commerce), elle offre une réelle séparation entre le patrimoine personnel et professionnel, une meilleure crédibilité vis-à-vis des partenaires financiers et commerciaux, ainsi qu’un régime fiscal et social plus modulable.

Passer de la micro-entreprise à la SASU ne consiste pas en une simple formalité : il s’agit d’une véritable transformation juridique impliquant la création d’une nouvelle société, le transfert de l’activité existante et la radiation de l’ancienne structure. Ce processus, bien que plus complexe, permet à l’entrepreneur d’accéder à un statut plus sécurisant et à un potentiel de croissance élargi.

Dans ce guide, defendstesdroits.fr détaille les 3 étapes essentielles pour réussir la mutation de votre micro-entreprise en SASU, en tenant compte des règles prévues par le Code de commerce, le Code monétaire et financier et le Code général des impôts.

Sommaire

  1. Introduction
  2. Pourquoi passer d’une micro-entreprise à une SASU ?
  3. Étape 1 : créer votre SASU
  4. Étape 2 : transférer le fonds de commerce à la SASU
  5. Étape 3 : cesser l’activité de micro-entrepreneur
  6. Conclusion

Pourquoi passer d'une micro-entreprise à une SASU ?

La micro-entreprise est une entreprise individuelle sans personnalité morale. L’entrepreneur exerce en son nom propre et engage son patrimoine professionnel, distinct du patrimoine personnel depuis l’entrée en vigueur de la loi du 14 février 2022 (article L526-22 du Code de commerce).

La SASU, en revanche, est une société dotée de la personnalité morale (article L210-6 du Code de commerce). Elle permet une séparation claire entre le patrimoine de l’associé unique et celui de la société. Le président de SASU relève du régime général de la sécurité sociale, tandis que le micro-entrepreneur dépend du régime social des indépendants.

Sur le plan fiscal, la SASU est en principe soumise à l’impôt sur les sociétés (IS), avec possibilité d’opter pour l’impôt sur le revenu (IR) dans certaines conditions (article 239 bis AB du Code général des impôts). À l’inverse, la micro-entreprise relève uniquement de l’IR.

Autre différence notable : la SASU impose la rédaction de statuts (article L210-2 du Code de commerce) et la constitution d’un capital social, même modeste, ce qui n’est pas exigé en micro-entreprise.

Étape 1 : créer votre SASU

La première étape consiste à constituer votre société par actions simplifiée unipersonnelle :

  • Rédaction des statuts : ce document fondateur doit organiser le fonctionnement de la société (article L210-2 du Code de commerce).
  • Apports et capital social : vous devez effectuer un apport en numéraire et/ou en nature afin de constituer le capital de la société.
  • Publicité légale : insertion obligatoire dans un journal d’annonces légales (articles R210-3 et suivants du Code de commerce).
  • Immatriculation : dépôt du formulaire M0 (Cerfa n°13959*08) auprès du guichet unique électronique des formalités d’entreprises, ce qui permet l’inscription au registre national des entreprises (RNE).
  • Déclaration des bénéficiaires effectifs : conformément à l’article L561-46 du Code monétaire et financier, vous devez identifier les personnes physiques détenant directement ou indirectement plus de 25 % du capital ou exerçant un contrôle effectif.

À noter : lorsqu’une SASU est créée avec un associé unique personne physique qui assume également la présidence, aucune publication au BODACC n’est requise (article R123-155 du Code de commerce).

Étape 2 : transférer le fonds de commerce à la SASU

Une fois la société créée, il est nécessaire de transférer l’activité de la micro-entreprise à la SASU. Deux mécanismes sont possibles :

Option 1 : l’apport du fonds de commerce

L’apport du fonds de commerce à la société doit être constaté par un acte écrit. Il s’agit d’un apport en nature, soumis à une inscription modificative au RCS (article R123-45 du Code de commerce).

  • Droits d’enregistrement : l’apport peut être taxé entre 0 et 5 %, sauf exonération lorsqu’il intervient à la constitution de la société et que l’apporteur conserve ses actions pendant trois ans.
  • Fiscalité : l’apport est assimilé à une cession et peut générer une imposition sur la plus-value professionnelle. Des régimes de faveur existent (articles 151 octies et suivants du Code général des impôts).

Option 2 : la vente du fonds de commerce

L’entrepreneur peut également vendre son fonds de commerce à la SASU. L’acte de cession doit être formalisé par écrit et enregistré. La société pourra financer l’opération, le cas échéant, par un emprunt, dont les intérêts sont déductibles de son résultat imposable (article 39 du CGI).

Depuis le 15 mai 2022, l’entrepreneur individuel peut aussi opter pour le transfert universel de son patrimoine professionnel (articles L526-27 et suivants du Code de commerce). Cette procédure permet de transférer l’ensemble de l’actif et du passif de la micro-entreprise à la SASU.

Étape 3 : cesser votre activité de micro-entrepreneur

Une fois le fonds de commerce transféré et la SASU immatriculée et opérationnelle, il est indispensable de procéder à la cessation définitive de l’activité de micro-entrepreneur. Cette formalité permet d’éviter toute double imposition ou assujettissement simultané aux régimes de l’entreprise individuelle et de la société.

Pour ce faire, l’entrepreneur doit :

  • Remplir le formulaire P2-P4 micro-entrepreneur (Cerfa n°13905*04) : ce document permet de déclarer officiellement la radiation de l’entreprise individuelle. Il doit être transmis via le guichet unique électronique des formalités d’entreprises, plateforme désormais compétente depuis le 1er janvier 2023.
  • Déclarer le chiffre d’affaires réalisé jusqu’à la date de cessation : il s’agit de la dernière déclaration auprès de l’administration fiscale et sociale. Elle doit être complète et conforme, afin de liquider toutes les obligations de la micro-entreprise.
  • Régler les cotisations sociales et l’impôt afférents aux revenus générés jusqu’à la cessation : le micro-entrepreneur reste redevable des charges sociales calculées sur son dernier chiffre d’affaires déclaré, ainsi que de l’impôt sur le revenu correspondant.

La radiation produit plusieurs effets juridiques et fiscaux :

  • Elle met fin à l’immatriculation en tant que micro-entrepreneur au registre national des entreprises.
  • Elle clôture les obligations comptables et fiscales liées au statut de la micro-entreprise.
  • Elle permet à l’entrepreneur de n’exercer son activité que sous la forme sociétaire de la SASU, évitant ainsi toute confusion entre les deux structures.

À noter : il est recommandé de conserver l’ensemble des justificatifs, notamment le récépissé de radiation et les dernières déclarations fiscales et sociales, pendant la durée légale de conservation (10 ans pour les documents comptables, selon l’article L123-22 du Code de commerce). Ces documents pourront être exigés en cas de contrôle de l’administration fiscale ou des organismes sociaux.

En pratique, la cessation de la micro-entreprise constitue la dernière étape juridique confirmant la transition vers la SASU. Elle assure la continuité de l’activité économique sous une nouvelle structure plus protectrice et plus adaptée à la croissance.

Conclusion

Transformer une micro-entreprise en SASU est une démarche stratégique qui marque une nouvelle étape dans la vie de l’entrepreneur. Ce choix ne doit pas être pris à la légère : il implique un changement de régime fiscal, social et juridique, mais ouvre aussi de nombreuses opportunités en termes de développement et de structuration de l’activité.

En créant une SASU, vous bénéficiez de la souplesse d’une société par actions, tout en conservant la maîtrise intégrale de votre entreprise en tant qu’associé unique. Le transfert de votre fonds de commerce, qu’il s’agisse d’un apport ou d’une vente, constitue une opération juridique majeure qui doit être anticipée avec précision, notamment sur le plan fiscal. Enfin, la cessation de votre micro-entreprise vient clore le cycle initial pour laisser place à une entité dotée d’une existence autonome et d’une crédibilité renforcée.

Au-delà des formalités, cette transformation doit être envisagée comme un investissement à long terme : elle permet d’accéder à une meilleure protection du patrimoine, d’optimiser la fiscalité en fonction de l’évolution des résultats et de renforcer la confiance des clients, investisseurs et établissements bancaires.

Les dispositions légales citées – articles du Code de commerce, du Code monétaire et financier et du Code général des impôts – encadrent chacune de ces étapes et garantissent la sécurité juridique de l’opération. Pour éviter les erreurs, il est recommandé de se faire accompagner par un professionnel du droit des sociétés ou un expert-comptable, afin d’adapter chaque choix (apport, vente, fiscalité, rémunération du dirigeant) à votre situation personnelle.

Ainsi, la transformation en SASU constitue bien plus qu’un changement de statut : elle est le levier qui permet à l’entrepreneur individuel de consolider son activité et d’assurer sa croissance dans un cadre légal sécurisé et adapté aux ambitions futures.

FAQ

1. Pourquoi transformer une micro-entreprise en SASU ?
Le passage de la micro-entreprise à la SASU s’explique par plusieurs raisons. La micro-entreprise, bien que simple à gérer, limite le développement : les plafonds de chiffre d’affaires (77 700 € pour les prestations de service et 188 700 € pour les activités commerciales – chiffres révisés régulièrement) restreignent la croissance. En SASU, ces seuils disparaissent, et l’entrepreneur bénéficie d’une séparation entre son patrimoine personnel et professionnel (articles L526-22 et suivants du Code de commerce). La SASU facilite aussi l’accès aux financements bancaires, permet de faire entrer ultérieurement des associés et offre une optimisation fiscale grâce au choix entre impôt sur les sociétés (IS) et option temporaire pour l’impôt sur le revenu (IR).

2. Quelles formalités juridiques sont nécessaires pour passer en SASU ?
Transformer une micro-entreprise en SASU n’est pas une simple modification administrative, mais la création d’une nouvelle société. Les étapes imposées par le Code de commerce incluent :

  • Rédiger des statuts (article L210-2 du Code de commerce), qui organisent le fonctionnement de la société et les pouvoirs du président.
  • Constituer un capital social, même symbolique (1 €), qui marque l’indépendance patrimoniale de la société.
  • Publier une annonce légale dans un journal habilité (article R210-3 du Code de commerce).
  • Immatriculer la SASU au registre national des entreprises (RNE) via le guichet unique électronique (remplaçant le CFE depuis 2023).
  • Déclarer les bénéficiaires effectifs (article L561-46 du Code monétaire et financier), afin de lutter contre le blanchiment et la fraude.

Ces démarches donnent naissance à une personne morale distincte, dotée de droits et d’obligations propres.

3. Comment transférer l’activité d’une micro-entreprise vers la SASU ?
Une fois la SASU créée, il faut y transférer le fonds de commerce de la micro-entreprise :

  • L’apport du fonds de commerce : l’entrepreneur apporte son activité en échange de titres sociaux. C’est une opération assimilée à une cession, générant une imposition des plus-values, mais qui peut bénéficier de régimes fiscaux de faveur (article 151 octies du CGI). L’apport doit être constaté par un acte écrit et publié.
  • La cession (vente) du fonds : l’entrepreneur vend son fonds de commerce à la SASU. La société peut financer l’opération par emprunt, et les intérêts sont déductibles du résultat imposable (article 39 du CGI). L’avantage est de percevoir immédiatement un capital, mais cette option entraîne une imposition immédiate des plus-values.
  • Le transfert universel du patrimoine professionnel (TUPP) : depuis la loi du 14 février 2022, l’entrepreneur individuel dispose d’un patrimoine professionnel distinct. Il peut transférer en bloc actif et passif à la SASU (articles L526-27 et suivants du Code de commerce), simplifiant ainsi la transition.

4. Quels impacts fiscaux et sociaux entraîne ce changement de statut ?
Le changement de statut modifie profondément la situation de l’entrepreneur :

  • Régime fiscal : la micro-entreprise relève obligatoirement de l’IR, tandis que la SASU est soumise à l’IS, avec option temporaire pour l’IR (article 239 bis AB du CGI). Ce choix peut être avantageux selon le niveau de bénéfices et la stratégie de rémunération.
  • Cotisations sociales : le micro-entrepreneur cotise sur son chiffre d’affaires, tandis que le président de SASU cotise uniquement sur sa rémunération, relevant du régime général de la sécurité sociale. En l’absence de rémunération, seules des contributions sociales limitées s’appliquent sur les dividendes éventuels.
  • Responsabilité : l’entrepreneur individuel, bien que protégé depuis 2022 par la séparation des patrimoines, reste juridiquement lié à son activité. En SASU, la responsabilité est strictement limitée aux apports, sauf faute de gestion.

Ainsi, le passage en SASU offre un cadre plus protecteur et modulable, adapté à une activité en expansion.

5. Comment mettre fin officiellement à une micro-entreprise après la création d’une SASU ?
La transformation s’achève par la radiation de la micro-entreprise. Cette démarche consiste à :

  • Remplir le formulaire P2-P4 micro-entrepreneur (Cerfa n°13905*04) et le déposer via le guichet unique.
  • Déclarer le chiffre d’affaires réalisé jusqu’à la date de cessation.
  • Régler les cotisations sociales et contributions fiscales correspondant à la période d’activité restante.
  • Conserver les documents comptables et fiscaux pendant la durée légale (10 ans pour la comptabilité).

La radiation met un terme définitif à l’existence juridique de la micro-entreprise, permettant à l’entrepreneur de poursuivre uniquement sous la forme sociétaire de la SASU.

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