L’année 2025 marque une étape déterminante pour la politique de l’emploi en France.
Alors que la réforme des retraites a repoussé l’âge légal de départ à 64 ans, la question du maintien dans l’emploi des salariés expérimentés devient un enjeu social et économique majeur. La population active vieillit, les carrières s’allongent, et les entreprises doivent désormais composer avec une main-d’œuvre dont les besoins et les attentes évoluent.
Pourtant, les chiffres demeurent éloquents : selon la DARES (Direction de l’Animation de la Recherche, des Études et des Statistiques), seuls 60,4 % des 55-64 ans occupaient un emploi en 2024, contre 82,8 % pour les 25-49 ans. Cette disparité souligne une difficulté structurelle à maintenir les seniors dans le monde du travail. Fatigue professionnelle, préjugés liés à l’âge, difficulté d’accès à la formation, départs anticipés : autant de freins à une carrière prolongée et épanouie.
Face à ce constat, le gouvernement et les partenaires sociaux ont engagé une profonde refonte du cadre juridique applicable à l’emploi des seniors.
Le résultat ? Une loi du 25 octobre 2025 portant transposition des Accords Nationaux Interprofessionnels (ANI) signés en novembre 2024, intégrée au Code du travail.
Cette réforme, souvent désignée sous le nom de “Plan seniors 2025”, vise à reconstruire le dialogue social autour des fins de carrière, à sécuriser les parcours professionnels et à favoriser la transmission intergénérationnelle des compétences.
Plus qu’un simple ajustement réglementaire, il s’agit d’un changement de paradigme : faire du salarié senior un acteur reconnu du développement de l’entreprise, tout en lui assurant un accompagnement adapté à chaque étape de sa carrière.
Le législateur, par cette loi, cherche à concilier l’allongement de la vie professionnelle avec le droit à la dignité au travail, en renforçant les obligations de négociation collective et en créant de nouveaux dispositifs contractuels dédiés aux travailleurs expérimentés.
L’analyse du Plan seniors 2025 révèle ainsi plusieurs axes majeurs :
la définition de nouvelles obligations de négociation, la création du contrat de valorisation de l’expérience (CVE), la refonte des entretiens professionnels, les ajustements du régime d’indemnisation du chômage, et la meilleure articulation entre emploi et retraite.
Autant de mesures qui redessinent le paysage du droit du travail français, à la lumière des évolutions démographiques et économiques contemporaines.
Il n’existe aucune définition légale unique du “senior” dans le Code du travail. Ce terme, employé dans un sens large, désigne les salariés en fin de carrière, souvent âgés de 55 à 64 ans, et dotés d’une expérience professionnelle significative.
L’administration publique, notamment France Travail, rattache également cette catégorie à ceux proches de la retraite.
Selon les données publiées par la DARES (résultats n°40 du 23 juillet 2025), seuls 60,4 % des 55-64 ans occupaient un emploi en 2024, contre 82,8 % pour la tranche 25-49 ans.
Cette différence traduit une marginalisation persistante des seniors sur le marché du travail.
Les causes identifiées sont multiples : représentations négatives liées à l’âge, difficultés de reconversion, pénibilité et discrimination à l’embauche.
En vertu de l’article L.1132-1 du Code du travail, toute distinction fondée sur l’âge est interdite, sauf justification objective et proportionnée.
Les entreprises sont donc tenues de mettre en œuvre des actions concrètes de prévention de l’âgisme, notamment par le biais de formations, de dispositifs de reconversion et de politiques de maintien dans l’emploi.
La loi n°2023-1196 du 18 décembre 2023 pour le plein emploi avait pour ambition d’accroître l’activité des seniors, sans pour autant fixer de mesures coercitives.
L’État a alors confié aux partenaires sociaux la responsabilité de définir un cadre adapté.
Un document d’orientation du ministère du Travail a servi de base à la négociation.
Parmi les objectifs assignés :
Ces concertations ont abouti à la signature, le 14 novembre 2024, d’un Accord National Interprofessionnel (ANI) sur l’emploi des salariés expérimentés, entériné par le Medef, la CPME, l’U2P et les syndicats représentatifs (CFDT, FO, CFE-CGC, CFTC).
L’accord a ensuite été transposé par la loi n°2025-989 du 24 octobre 2025, publiée au Journal officiel le 25 octobre 2025.
Cette loi de transposition intègre plusieurs dispositifs destinés à renforcer la place des seniors dans l’emploi et à structurer un dialogue social de branche sur la gestion des carrières longues.
Les branches professionnelles et les entreprises d’au moins 300 salariés disposant d’une section syndicale représentative doivent désormais négocier périodiquement sur :
Cette obligation est d’ordre public, ce qui signifie qu’aucune entreprise ne peut y déroger.
En l’absence d’accord, l’employeur devra établir un plan d’action unilatéral, soumis à consultation du CSE.
La loi introduit deux nouveaux entretiens obligatoires :
Ces entretiens alimentent le plan de développement des compétences de l’entreprise et orientent les formations spécifiques à cette tranche d’âge.
La loi de 2025 crée un contrat de travail spécifique pour les salariés de plus de 60 ans : le Contrat de Valorisation de l’Expérience (CVE), aussi appelé CDI senior.
Peut en bénéficier toute personne :
Le CVE est un CDI de droit commun assorti de spécificités :
Ce dispositif vise à valoriser les compétences acquises tout en facilitant la transmission du savoir-faire au sein des équipes mixtes.
La loi 2025-989 introduit une logique de flexibilité en fin de parcours professionnel.
Depuis le 26 octobre 2025, un employeur qui refuse une demande de retraite progressive doit motiver son refus par des raisons économiques ou organisationnelles objectives, en conformité avec le Code du travail (art. L.3123-1).
Cette mesure protège le salarié et favorise les aménagements du temps de travail.
L’article L.1237-9-2 du Code du travail permet désormais qu’un accord d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche, autorise le salarié à affecter son indemnité de départ à la compensation d’une baisse de rémunération liée à un passage à temps partiel en fin de carrière.
Outre le CVE, plusieurs dispositifs spécifiques permettent d’encourager l’embauche ou le maintien des seniors :
Ces mécanismes s’inscrivent dans une logique de formation continue et de maintien de l’employabilité.
Entrée en vigueur le 1er septembre 2023, la réforme des retraites (loi n°2023-270 du 14 avril 2023) a relevé l’âge légal de départ à 64 ans.
Cette mesure entraîne mécaniquement un allongement des carrières et impose aux entreprises d’adapter leur gestion des ressources humaines.
Par ailleurs, le décret n°2025-252 du 20 mars 2025 a ajusté les conditions d’accès à l’allocation chômage pour les seniors :
Ces ajustements traduisent la volonté du législateur d’assurer une sécurisation des parcours professionnels tout en maintenant l’incitation à l’emploi.
Le Plan seniors 2025 s’inscrit dans la continuité des grandes réformes sociales qui cherchent à répondre à une double exigence : maintenir les seniors dans l’emploi et adapter les entreprises à une société où la carrière s’étend désormais sur quatre décennies.
Mais plus encore, il consacre un principe juridique fondamental : celui de la responsabilité partagée entre l’État, les partenaires sociaux et les employeurs dans la construction d’un environnement de travail inclusif.
En imposant une obligation de négociation sur l’emploi des salariés expérimentés, le législateur confère une nouvelle portée à la concertation collective, désormais au cœur de la stratégie de gestion des âges en entreprise.
La création du contrat de valorisation de l’expérience (CVE), quant à elle, symbolise la volonté de redonner de la valeur à l’expérience et d’encourager la transmission des savoirs, dans une logique de continuité professionnelle et de valorisation du parcours.
L’introduction d’entretiens de mi-carrière et de fin de carrière répond également à une nécessité de prévention : anticiper les risques d’usure professionnelle, repenser la formation et faciliter les transitions vers la retraite.
Autant de dispositifs qui replacent la gestion de la deuxième partie de carrière au centre du dialogue social, et qui obligent les entreprises à adapter leur politique RH à l’allongement de la vie active.
Par ailleurs, la réforme des retraites de 2023, combinée à la réforme de l’assurance chômage de 2025, contribue à rééquilibrer la protection sociale en fin de carrière :
d’une part, en prolongeant les durées d’indemnisation pour les seniors, et d’autre part, en aménageant des passerelles entre emploi, formation et retraite progressive.
L’enjeu est donc double : soutenir les seniors dans la continuité de leur parcours professionnel et permettre aux entreprises de bénéficier durablement de leur expertise.
Cette politique publique ne se limite plus à un enjeu d’emploi : elle traduit la transformation du droit du travail en un outil de cohésion intergénérationnelle, où la notion de carrière devient évolutive, adaptative et inclusive.
Ainsi, le Plan seniors 2025 ne se contente pas d’aménager les conditions d’emploi des plus âgés — il redéfinit en profondeur la conception du travail en France, en plaçant l’expérience, la transmission et la dignité professionnelle au cœur de la réforme.
Le Plan seniors 2025 résulte de la loi du 25 octobre 2025, transposant plusieurs Accords Nationaux Interprofessionnels (ANI) conclus en 2024. Il vise à favoriser le maintien et le retour à l’emploi des salariés âgés, notamment ceux de 55 ans et plus, à travers des mesures concrètes : obligation de négociation sur l’emploi des seniors, création du CDI senior, et adaptation du temps de travail en fin de carrière. Toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, sont concernées par ces nouvelles obligations sociales.
La loi impose désormais aux branches professionnelles et aux entreprises d’au moins 300 salariés de négocier sur l’emploi des salariés expérimentés.
Cette négociation porte notamment sur la prévention de la pénibilité, les opportunités de reconversion, les aménagements de fin de carrière, et la formation continue.
En l’absence d’accord collectif, l’employeur doit adopter un plan d’action unilatéral respectant le contenu minimal défini par la loi (article L.2242-20 du Code du travail). Cette obligation est d’ordre public : aucune entreprise ne peut y échapper.
Le CDI senior, aussi appelé Contrat de Valorisation de l’Expérience (CVE), est un nouveau type de contrat créé par la loi n°2025-989 du 24 octobre 2025.
Il s’adresse aux demandeurs d’emploi âgés d’au moins 60 ans (ou dès 57 ans si un accord de branche le permet).
Ce contrat permet :
La loi 2025 introduit deux nouveaux entretiens de carrière :
Plusieurs dispositifs favorisent l’emploi des travailleurs expérimentés :