Les congés payés représentent l’un des piliers du droit du travail français, fruit d’une longue évolution sociale et d’un encadrement juridique rigoureux. Inscrits depuis 1936 dans la législation française, ils participent directement à la protection de la santé des salariés, à l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle, et à la dignité du travail.
Régis principalement par les articles L3141-1 et suivants du Code du travail, ils s’imposent à tous les employeurs, quels que soient la taille de l’entreprise, le secteur d’activité ou le type de contrat de travail. Pourtant, en pratique, leur gestion soulève de nombreuses interrogations.
Combien de jours de congés peut-on acquérir ? Qui décide des dates de départ ? L’employeur peut-il refuser ou modifier les congés posés ? Quelles sont les règles en cas de maladie, d’embauche récente ou de départ de l’entreprise ? Autant de questions qui se posent chaque année à l’approche des vacances ou lors de la rupture du contrat de travail.
À cela s’ajoute une actualité législative dense. La réforme introduite par la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 (dite DDADUE), visant à mettre le droit français en conformité avec le droit de l’Union européenne, a modifié les conditions d’acquisition des congés payés pour les salariés en arrêt maladie, marquant une inflexion majeure dans la jurisprudence française.
Cette évolution impose aux employeurs comme aux salariés d’adapter leurs pratiques et d’actualiser leurs connaissances en la matière.
Dans un tel contexte, une compréhension fine et rigoureuse des règles encadrant les congés payés devient indispensable, tant pour sécuriser les droits des salariés que pour prévenir les litiges au sein de l’entreprise. Le présent dossier, rédigé par l’équipe juridique de defendstesdroits.fr, a pour objectif de présenter, de manière claire, exhaustive et juridiquement fondée, les 12 règles essentielles à connaître sur le sujet.
Tout salarié en France bénéficie d’un droit à congés payé dès lors qu’il justifie d’un travail effectif chez un même employeur. Ce droit, fondé sur l’article L3141-3 du Code du travail, permet l’acquisition de 2,5 jours ouvrables par mois de travail, soit 30 jours ouvrables par an (équivalents à 5 semaines). Cette règle s’applique uniformément aux salariés en CDI, CDD, intérim ou à temps partiel.
Le décompte se fait en jours ouvrables, c’est-à-dire tous les jours de la semaine sauf le jour de repos hebdomadaire (souvent le dimanche) et les jours fériés chômés. Une semaine de travail classique compte ainsi 6 jours ouvrables, ce qui a une incidence sur le rythme de consommation des congés.
Une évolution majeure est intervenue avec l'article 37 de la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024 (loi DDADUE). En conformité avec le droit de l’Union européenne, désormais le salarié en arrêt maladie non professionnel acquiert des congés payés à hauteur de 2 jours ouvrables par mois, dans la limite de 24 jours/an.
À l’inverse, en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, le salarié continue d'acquérir 2,5 jours par mois (30 jours maximum/an).
Si l’état de santé empêche la prise de congés, un report de 15 mois s’applique à compter de la reprise d’activité, conformément à la jurisprudence européenne transposée en droit français.
Les salariés de moins de 21 ans au 30 avril de l’année précédente peuvent bénéficier de 2 jours supplémentaires par enfant à charge, dans les conditions des articles L3141-8 et L3164-9 du Code du travail. Toutefois, la durée totale ne peut excéder 30 jours ouvrables, sauf stipulations plus favorables de la convention collective applicable.
La période pendant laquelle les congés peuvent être pris est fixée :
Cette période doit obligatoirement comprendre celle allant du 1er mai au 31 octobre.
L’ordre des départs obéit aux mêmes règles que la période de prise. À défaut de stipulation collective, l’employeur peut le fixer unilatéralement en prenant en compte :
L’employeur dispose d’un pouvoir d’organisation, mais ce dernier est encadré. Il ne peut modifier les dates de congés moins d’un mois avant le départ prévu, sauf circonstances exceptionnelles. De même, il ne peut pas imposer plus de 24 jours ouvrables consécutifs (soit 4 semaines) sans l’accord du salarié.
Le salarié peut prendre des congés anticipés, c’est-à-dire avant le début officiel de la période de prise (1er mai - 31 octobre), sous réserve d’un accord de l’employeur. Cette pratique est fréquente en cas d’embauche récente.
Le fractionnement du congé principal (au-delà de 12 jours) peut ouvrir droit à :
Ce droit au fractionnement suppose généralement l’accord du salarié, sauf fermeture de l’entreprise. Un modèle de renonciation peut être fourni au salarié qui renonce à ses jours supplémentaires.
Lors de la rupture du contrat, si le salarié n’a pas pu prendre tous ses congés, il perçoit une indemnité compensatrice. Celle-ci est due dans tous les cas, y compris en cas de licenciement pour faute lourde, depuis la décision n°2015-523 QPC du 2 mars 2016 et sa confirmation par la Cour de cassation, Soc. 28 mars 2018, n°16-26013.
La période de référence (acquisition) court généralement du 1er juin au 31 mai. Les congés acquis doivent être pris avant le 31 mai de l’année suivante, sous peine de forclusion, sauf report justifié (maladie, congé maternité…).
Certains congés légaux ou absences, comme le congé maternité, parental, ou un arrêt maladie, peuvent justifier un report des congés, sous conditions. Le report de 15 mois applicable en cas de maladie est désormais de droit depuis la réforme de 2024, alignée sur la jurisprudence communautaire.
L’employeur doit afficher les dates de congés au moins 1 mois avant le départ et consulter le CSE lorsqu’il existe. Toute modification postérieure doit respecter les mêmes obligations, sauf situation exceptionnelle.
Certaines conventions collectives prévoient des jours supplémentaires ou un mode de calcul plus favorable (jours ouvrés, congés supplémentaires pour ancienneté...). Il est donc essentiel de consulter la convention applicable, disponible sur defendstesdroits.fr.
Une absence non autorisée constitue une faute susceptible de sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute grave. À l’inverse, un refus abusif de l’employeur d’accorder des congés peut entraîner une mise en demeure ou saisine du conseil de prud’hommes.
Le droit aux congés payés constitue un droit fondamental pour tout salarié, mais aussi une source fréquente de tension lorsque sa mise en œuvre méconnaît les textes légaux ou les accords collectifs applicables.
Loin d’être une simple formalité administrative, la gestion des congés payés mobilise des notions de droit impératif, de dialogue social, de calendrier collectif et d’aménagement des conditions de travail.
Les règles détaillées dans cet article — qu’il s’agisse du calcul des droits, de l’ordre des départs, des reports en cas de maladie, ou encore des modalités d’indemnisation en fin de contrat — ne sont pas anecdotiques : elles s’inscrivent dans une architecture juridique complexe, articulant Code du travail, jurisprudence, conventions collectives et accords d’entreprise.
Face à ces enjeux, salariés comme employeurs ont tout intérêt à se doter d’outils juridiques actualisés, d’une bonne connaissance des textes, et de réflexes de vérification (période de référence, droit au report, jours de fractionnement, affichage obligatoire...).
En cas de doute ou de conflit, le recours au dialogue interne, à la consultation du CSE ou à l’accompagnement d’un professionnel du droit (avocat ou juriste) est vivement recommandé.
Chez defendstesdroits.fr, nous vous aidons à faire valoir vos droits, à comprendre vos obligations, et à sécuriser chaque étape liée aux congés payés. Car connaître la règle, c’est aussi garantir la sérénité du repos mérité.
1. Combien de jours de congés payés un salarié acquiert-il chaque année ?
Tout salarié, qu’il soit en CDI, en CDD, en contrat d’intérim ou à temps partiel, acquiert 2,5 jours ouvrables de congés payés par mois de travail effectif chez un même employeur, soit 30 jours ouvrables par an, ce qui correspond à 5 semaines de congés.
Ce droit est défini à l’article L3141-3 du Code du travail. Les jours sont comptés en jours ouvrables (du lundi au samedi, hors jours fériés chômés), sauf stipulation contraire de la convention collective applicable.
Il est important de noter que les absences injustifiées, les arrêts maladie non couverts par la loi, ou les périodes non assimilées à du travail effectif peuvent réduire le nombre de jours acquis.
2. Peut-on acquérir des congés payés pendant un arrêt maladie ?
Depuis la loi n° 2024-364 du 22 avril 2024, dite loi DDADUE, le droit aux congés payés a été profondément réformé pour se conformer aux exigences du droit de l’Union européenne.
Lorsque le salarié est empêché de prendre ses congés en raison de son état de santé, il bénéficie automatiquement d’un délai de report de 15 mois à compter de la reprise de son activité (article issu de la réforme de 2024).
Ces nouvelles règles s’appliquent aux absences intervenues depuis le 1er décembre 2009, conformément à la jurisprudence européenne. L’employeur a donc l’obligation de réexaminer les droits antérieurs non pris sous peine de contentieux prud’homal.
3. L’employeur peut-il refuser ou modifier les dates de congés posées ?
Oui, mais sous conditions strictes. L’employeur détient un pouvoir de direction qui lui permet de valider ou de refuser une demande de congé, en tenant compte des nécessités du service, de l’organisation de l’entreprise ou du calendrier collectif de congés.
Il ne peut toutefois pas agir arbitrairement :
Un refus injustifié ou un changement tardif peut être contesté devant le conseil de prud’hommes, notamment si le salarié a engagé des frais (billets d’avion, réservation…).
4. Quels sont les droits du salarié en fin de contrat concernant les congés payés ?
Lorsqu’un contrat prend fin (licenciement, démission, fin de CDD, rupture conventionnelle…), le salarié qui n’a pas utilisé tout ou partie de ses congés payés acquis a droit à une indemnité compensatrice (article L3141-28 du Code du travail).
Cette indemnité :
Le montant correspond à la rémunération que le salarié aurait perçue s’il avait pris ses congés. Elle est mentionnée sur le solde de tout compte et soumise aux cotisations sociales, sauf exonérations spécifiques.
5. Existe-t-il des congés supplémentaires pour enfants à charge ou fractionnement ?
Oui. Le Code du travail prévoit des situations dans lesquelles des jours de congés supplémentaires peuvent être accordés :
Ces droits peuvent être renoncés par écrit, sauf si le fractionnement résulte d’une fermeture obligatoire de l’établissement.