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Vendre ses parts sociales en SARL : règles juridiques et obligations fiscales

Jordan Alvarez
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SARL : conditions, agrément et formalités pour céder ses parts sociales

La cession de parts sociales dans une société à responsabilité limitée (SARL) est une opération fréquente dans la vie des affaires : départ d’un associé, entrée d’un nouvel investisseur, transmission familiale ou encore réorganisation interne. Elle permet de transférer la qualité d’associé et les droits qui en découlent, mais elle ne peut pas être réalisée librement sans respecter un cadre juridique précis.

Le Code civil et le Code de commerce encadrent strictement cette opération afin de protéger la société, les associés déjà en place et l’acquéreur. La jurisprudence rappelle régulièrement que la cession de parts doit être réelle, sérieuse et conforme aux conditions légales de validité.

De plus, la cession de parts dans une SARL obéit à une particularité : l’obligation d’agrément du nouvel associé dans certains cas. L’article L223-14 du Code de commerce impose en effet que, lorsqu’un associé souhaite céder ses parts à un tiers étranger à la société, l’autorisation des autres associés soit obtenue. Ce mécanisme vise à préserver l’intuitu personae qui caractérise la SARL, société fondée sur la confiance réciproque entre ses associés.

Trois grandes étapes jalonnent la cession de parts sociales : la détermination du prix, la procédure d’agrément éventuelle et la formalisation de la cession par acte juridique et formalités légales.

Sommaire

  1. Introduction
  2. ÉTAPE 1 : Calculer la valeur des parts sociales de SARL
  3. ÉTAPE 2 : Obtenir l’agrément des associés en cas de cession à un tiers
  4. ÉTAPE 3 : Rédiger l’acte de cession et accomplir les formalités
  5. Conclusion

Étape 1 : calculer la valeur des parts sociales de SARL

La cession d’une part sociale est avant tout un contrat de vente : elle suppose un accord sur la chose (les parts) et sur le prix (article 1583 du Code civil). Ce prix doit être :

  • sérieux, c’est-à-dire qu’il ne peut être symbolique ou fictif ;
  • déterminé ou déterminable selon les règles posées par l’article 1591 du Code civil ;
  • non dérisoire, sous peine de nullité (article 1169 du Code civil).

La valorisation des parts peut se faire par différentes méthodes : valeur patrimoniale (comptes sociaux), valeur de rendement (perspectives financières), ou valeur de marché (comparaison sectorielle). Il est recommandé de recourir à un expert-comptable pour établir une évaluation objective et éviter tout risque de contestation ultérieure, notamment en cas de litige entre cédant et acquéreur.

Étape 2 : obtenir, si nécessaire, l’agrément des autres associés

Principe d’agrément obligatoire pour la cession à un tiers

Lorsqu’un associé souhaite céder ses parts sociales à une personne extérieure à la société, la loi impose que cette cession soit préalablement autorisée par les autres associés (article L223-14 du Code de commerce).

La procédure d’agrément comprend plusieurs étapes :

  • notification du projet de cession à la société et aux associés par acte extrajudiciaire ou lettre recommandée ;
  • convocation d’une assemblée générale par le gérant dans les huit jours suivant la notification ;
  • vote des associés, qui doivent approuver l’acquéreur à la majorité en capital représentant au moins la moitié des parts sociales. Les statuts peuvent prévoir une majorité plus forte, mais jamais plus faible.

Agrément facultatif dans certains cas

Certaines cessions sont en principe libres :

  • les cessions entre associés (article L223-16 du Code de commerce) ;
  • les cessions au profit d’un conjoint, ascendant ou descendant (article L223-13 du Code de commerce).

Toutefois, les statuts peuvent prévoir que même ces opérations nécessitent un agrément, renforçant ainsi le contrôle des associés sur l’identité des futurs membres de la société.

Étape 3 : formaliser la cession de parts sociales et accomplir les formalités

Rédaction de l’acte de cession

La cession doit obligatoirement être constatée par écrit, soit par acte sous seing privé, soit par acte notarié (article 1375 du Code civil). L’acte doit être établi en autant d’exemplaires qu’il y a de parties et contenir :

  • l’identité des parties ;
  • le nombre de parts cédées ;
  • le prix et les modalités de paiement ;
  • la mention de l’agrément obtenu, le cas échéant.

Opposabilité à la société et aux tiers

La cession n’est opposable à la société qu’à condition de respecter l’une des formalités prévues à l’article L221-14 du Code de commerce (applicable à la SARL par renvoi de l’article L223-17) :

  • dépôt d’un original de l’acte au siège social, avec attestation de dépôt délivrée par le gérant ;
  • signification de l’acte à la société par commissaire de justice ;
  • acceptation de la société dans un acte authentique signé par le gérant.

Pour être opposable aux tiers, la cession doit être publiée au Registre du commerce et des sociétés (RCS). Cela implique le dépôt des statuts mis à jour et de l’acte de cession auprès du greffe, via le guichet unique des formalités d’entreprises (article R123-77 du Code de commerce).

Conséquences fiscales de la cession

Le cédant doit également s’acquitter des droits d’enregistrement auprès du service des impôts des entreprises (SIE). En cas de plus-value sur la cession, celle-ci est imposée selon le régime applicable aux particuliers (impôt sur le revenu et prélèvements sociaux) ou aux sociétés, selon la qualité du cédant.

Conclusion

La cession de parts sociales de SARL est une opération à la fois juridique, comptable et fiscale, dont le déroulement doit être rigoureusement encadré pour éviter toute nullité ou contestation. La détermination du prix, l’éventuelle procédure d’agrément et la formalisation de la cession par écrit constituent des étapes obligatoires. Enfin, l’accomplissement des formalités de publicité conditionne l’opposabilité de l’opération à la société et aux tiers.

La vigilance des associés est donc essentielle, et le recours à un avocat en droit des sociétés ou à un expert-comptable est vivement recommandé afin de sécuriser cette opération stratégique et d’en optimiser les incidences fiscales.

FAQ

1. Comment déterminer le prix des parts sociales de SARL ?
Le prix de cession doit être conforme aux règles de droit commun de la vente. Selon l’article 1583 du Code civil, la vente est parfaite dès accord sur la chose et le prix. L’article 1591 du Code civil exige que ce prix soit déterminé ou déterminable, et l’article 1169 du Code civil sanctionne le prix dérisoire.

Trois méthodes d’évaluation sont utilisées :

  • La valeur comptable : basée sur les capitaux propres inscrits au dernier bilan, ajustés des résultats récents.
  • La valeur de rendement : prenant en compte la rentabilité attendue de la société.
  • La valeur de marché : issue de la comparaison avec des sociétés similaires du même secteur.

Exemple pratique : une SARL affiche des capitaux propres de 200 000 € pour 1 000 parts sociales. La valeur patrimoniale théorique d’une part est de 200 €. Si la société dégage une rentabilité importante, la valeur de marché peut être supérieure, ce qui justifie un prix de cession de 250 € par part.

2. L’agrément des associés est-il toujours obligatoire pour céder ses parts sociales ?
L’article L223-14 du Code de commerce impose l’agrément en cas de cession à un tiers étranger. Le but est de préserver l’intuitu personae, c’est-à-dire le lien de confiance entre associés.

Toutefois, l’agrément n’est pas requis pour :

  • une cession entre associés (article L223-16) ;
  • une cession au profit du conjoint, d’un ascendant ou d’un descendant (article L223-13).

Les statuts peuvent néanmoins prévoir une clause plus stricte et exiger un agrément même pour ces cessions dites « libres ».

Exemple pratique : un associé veut céder 100 parts à son fils. Par principe, aucun agrément n’est requis. Mais si les statuts de la SARL exigent un agrément même pour les transmissions familiales, l’assemblée devra valider la cession.

3. Quelles étapes respecter pour obtenir l’agrément des associés ?
La procédure d’agrément est encadrée par les articles R223-11 et R223-12 du Code de commerce :

  1. Notification du projet au gérant et aux associés par acte extrajudiciaire ou lettre recommandée.
  2. Convocation d’une assemblée générale dans les 8 jours suivant la notification.
  3. Vote des associés : l’agrément est acquis si la majorité des associés représentant au moins la moitié du capital social accepte l’acquéreur.

Les statuts peuvent prévoir une majorité plus forte, par exemple les deux tiers des parts sociales.

Exemple pratique : une SARL compte 5 associés détenant chacun 20 % du capital. L’un d’eux souhaite céder ses parts à un tiers. Si 3 associés représentant 60 % du capital votent pour, l’agrément est accordé.

4. Quelles formalités rendre la cession opposable à la société et aux tiers ?
L’opposabilité à la société est prévue par l’article L221-14 du Code de commerce, applicable à la SARL via l’article L223-17. Trois modes sont possibles :

  • dépôt d’un original de l’acte au siège social contre attestation du gérant ;
  • signification par commissaire de justice ;
  • acceptation par la société dans un acte authentique signé par le gérant.

Pour être opposable aux tiers, la cession doit être publiée au RCS (article R123-77 du Code de commerce). Cela suppose :

  • le dépôt de l’acte de cession et des statuts mis à jour au greffe ;
  • la déclaration via le guichet unique des formalités d’entreprises.

Exemple pratique : si un associé cède ses parts mais ne procède pas à ces formalités, la cession ne sera pas opposable aux créanciers de la société ni aux tiers contractants.

5. Quelles sont les conséquences fiscales d’une cession de parts sociales de SARL ?
La fiscalité de la cession repose sur deux volets :

  • Droits d’enregistrement : le cédant doit acquitter un droit de 3 % du prix de cession, après abattement égal au nombre de parts cédées × 23 000 €, divisé par le nombre total de parts de la société (article 726 du CGI).
  • Plus-value éventuelle : si le prix de cession est supérieur au prix d’acquisition, la différence constitue une plus-value.
    • Pour un particulier, elle est imposée à l’impôt sur le revenu au taux de 12,8 % + prélèvements sociaux de 17,2 % (taux global de 30 %), sauf option pour le barème progressif.
    • Pour une société cédante, la plus-value est intégrée au résultat imposable selon le régime de l’impôt sur les sociétés.

Exemple pratique : un associé a acquis ses parts pour 50 000 € et les revend 80 000 €. La plus-value est de 30 000 €. En tant que particulier, il sera imposé à 30 % soit 9 000 €, sauf application d’abattements pour durée de détention.

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