La cession de parts sociales dans une société à responsabilité limitée (SARL) est une opération fréquente dans la vie des affaires : départ d’un associé, entrée d’un nouvel investisseur, transmission familiale ou encore réorganisation interne. Elle permet de transférer la qualité d’associé et les droits qui en découlent, mais elle ne peut pas être réalisée librement sans respecter un cadre juridique précis.
Le Code civil et le Code de commerce encadrent strictement cette opération afin de protéger la société, les associés déjà en place et l’acquéreur. La jurisprudence rappelle régulièrement que la cession de parts doit être réelle, sérieuse et conforme aux conditions légales de validité.
De plus, la cession de parts dans une SARL obéit à une particularité : l’obligation d’agrément du nouvel associé dans certains cas. L’article L223-14 du Code de commerce impose en effet que, lorsqu’un associé souhaite céder ses parts à un tiers étranger à la société, l’autorisation des autres associés soit obtenue. Ce mécanisme vise à préserver l’intuitu personae qui caractérise la SARL, société fondée sur la confiance réciproque entre ses associés.
Trois grandes étapes jalonnent la cession de parts sociales : la détermination du prix, la procédure d’agrément éventuelle et la formalisation de la cession par acte juridique et formalités légales.
La cession d’une part sociale est avant tout un contrat de vente : elle suppose un accord sur la chose (les parts) et sur le prix (article 1583 du Code civil). Ce prix doit être :
La valorisation des parts peut se faire par différentes méthodes : valeur patrimoniale (comptes sociaux), valeur de rendement (perspectives financières), ou valeur de marché (comparaison sectorielle). Il est recommandé de recourir à un expert-comptable pour établir une évaluation objective et éviter tout risque de contestation ultérieure, notamment en cas de litige entre cédant et acquéreur.
Lorsqu’un associé souhaite céder ses parts sociales à une personne extérieure à la société, la loi impose que cette cession soit préalablement autorisée par les autres associés (article L223-14 du Code de commerce).
La procédure d’agrément comprend plusieurs étapes :
Certaines cessions sont en principe libres :
Toutefois, les statuts peuvent prévoir que même ces opérations nécessitent un agrément, renforçant ainsi le contrôle des associés sur l’identité des futurs membres de la société.
La cession doit obligatoirement être constatée par écrit, soit par acte sous seing privé, soit par acte notarié (article 1375 du Code civil). L’acte doit être établi en autant d’exemplaires qu’il y a de parties et contenir :
La cession n’est opposable à la société qu’à condition de respecter l’une des formalités prévues à l’article L221-14 du Code de commerce (applicable à la SARL par renvoi de l’article L223-17) :
Pour être opposable aux tiers, la cession doit être publiée au Registre du commerce et des sociétés (RCS). Cela implique le dépôt des statuts mis à jour et de l’acte de cession auprès du greffe, via le guichet unique des formalités d’entreprises (article R123-77 du Code de commerce).
Le cédant doit également s’acquitter des droits d’enregistrement auprès du service des impôts des entreprises (SIE). En cas de plus-value sur la cession, celle-ci est imposée selon le régime applicable aux particuliers (impôt sur le revenu et prélèvements sociaux) ou aux sociétés, selon la qualité du cédant.
La cession de parts sociales de SARL est une opération à la fois juridique, comptable et fiscale, dont le déroulement doit être rigoureusement encadré pour éviter toute nullité ou contestation. La détermination du prix, l’éventuelle procédure d’agrément et la formalisation de la cession par écrit constituent des étapes obligatoires. Enfin, l’accomplissement des formalités de publicité conditionne l’opposabilité de l’opération à la société et aux tiers.
La vigilance des associés est donc essentielle, et le recours à un avocat en droit des sociétés ou à un expert-comptable est vivement recommandé afin de sécuriser cette opération stratégique et d’en optimiser les incidences fiscales.
1. Comment déterminer le prix des parts sociales de SARL ?
Le prix de cession doit être conforme aux règles de droit commun de la vente. Selon l’article 1583 du Code civil, la vente est parfaite dès accord sur la chose et le prix. L’article 1591 du Code civil exige que ce prix soit déterminé ou déterminable, et l’article 1169 du Code civil sanctionne le prix dérisoire.
Trois méthodes d’évaluation sont utilisées :
Exemple pratique : une SARL affiche des capitaux propres de 200 000 € pour 1 000 parts sociales. La valeur patrimoniale théorique d’une part est de 200 €. Si la société dégage une rentabilité importante, la valeur de marché peut être supérieure, ce qui justifie un prix de cession de 250 € par part.
2. L’agrément des associés est-il toujours obligatoire pour céder ses parts sociales ?
L’article L223-14 du Code de commerce impose l’agrément en cas de cession à un tiers étranger. Le but est de préserver l’intuitu personae, c’est-à-dire le lien de confiance entre associés.
Toutefois, l’agrément n’est pas requis pour :
Les statuts peuvent néanmoins prévoir une clause plus stricte et exiger un agrément même pour ces cessions dites « libres ».
Exemple pratique : un associé veut céder 100 parts à son fils. Par principe, aucun agrément n’est requis. Mais si les statuts de la SARL exigent un agrément même pour les transmissions familiales, l’assemblée devra valider la cession.
3. Quelles étapes respecter pour obtenir l’agrément des associés ?
La procédure d’agrément est encadrée par les articles R223-11 et R223-12 du Code de commerce :
Les statuts peuvent prévoir une majorité plus forte, par exemple les deux tiers des parts sociales.
Exemple pratique : une SARL compte 5 associés détenant chacun 20 % du capital. L’un d’eux souhaite céder ses parts à un tiers. Si 3 associés représentant 60 % du capital votent pour, l’agrément est accordé.
4. Quelles formalités rendre la cession opposable à la société et aux tiers ?
L’opposabilité à la société est prévue par l’article L221-14 du Code de commerce, applicable à la SARL via l’article L223-17. Trois modes sont possibles :
Pour être opposable aux tiers, la cession doit être publiée au RCS (article R123-77 du Code de commerce). Cela suppose :
Exemple pratique : si un associé cède ses parts mais ne procède pas à ces formalités, la cession ne sera pas opposable aux créanciers de la société ni aux tiers contractants.
5. Quelles sont les conséquences fiscales d’une cession de parts sociales de SARL ?
La fiscalité de la cession repose sur deux volets :
Exemple pratique : un associé a acquis ses parts pour 50 000 € et les revend 80 000 €. La plus-value est de 30 000 €. En tant que particulier, il sera imposé à 30 % soit 9 000 €, sauf application d’abattements pour durée de détention.