Travail

Inspection du travail en entreprise : obligations et vérifications

Estelle Marant
Collaboratrice
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Inspection du travail : ce que tout employeur doit savoir

La visite de l’inspection du travail suscite souvent des interrogations, voire des inquiétudes, tant chez les employeurs que chez les salariés. Ce contrôle, qui peut survenir de manière inopinée ou sur demande, s’inscrit dans une démarche de prévention, de vérification et, le cas échéant, de correction des manquements au droit du travail.

L’inspecteur du travail agit en tant que représentant de l’administration, avec pour mission d’assurer l’application stricte du Code du travail et des normes de protection de la santé, de la sécurité et des libertés des travailleurs.

Pour éviter toute non-conformité susceptible d'entraîner des sanctions administratives ou pénales, il est essentiel pour tout employeur de connaître les contours juridiques du contrôle, les droits de l'inspecteur, et les obligations qui pèsent sur l’entreprise. C’est dans cette perspective que defendstesdroits.fr vous présente les informations fondamentales à maîtriser pour aborder sereinement ce type d’intervention.

Sommaire

  1. Introduction
  2. Quand et comment contacter l’inspection du travail
  3. Que contrôle l’inspecteur du travail
  4. Comment se déroule un contrôle et quels sont ses pouvoirs
  5. Quelles suites peut donner l’inspection du travail
  6. Peut-on refuser un contrôle de la dreets
  7. Quels recours contre une décision de l’inspecteur du travail
  8. FAQ

Quand et comment contacter l’inspection du travail ?

Tout salarié ou employeur peut saisir l’inspection du travail, soit pour solliciter des informations, soit pour signaler une situation de non-conformité. Il est obligatoire, pour l’employeur, d’afficher dans les locaux accessibles aux salariés les coordonnées de l’unité territoriale de la DREETS compétente (article D4711-1 du Code du travail).

L’inspecteur peut être sollicité :

  • lors de la rédaction ou modification du règlement intérieur ;
  • en cas de procédure de licenciement d’un salarié protégé (articles L2411-1 et suivants) ;
  • par les représentants du personnel exerçant leur droit d’alerte (articles L2312-59 et suivants) ;
  • ou encore à la suite d’un accident du travail mortel, que l’employeur a désormais l’obligation de signaler sans délai (décret n° 2023-452 du 9 juin 2023).

Que contrôle l’inspecteur du travail ?

L’agent de contrôle vérifie la conformité aux dispositions légales et conventionnelles applicables à l’entreprise. Il s’agit notamment de :

  • la présence des affichages obligatoires (article L1221-13) ;
  • le respect des temps de travail et de repos (articles L3121-1 et suivants) ;
  • la traçabilité des contrats et leur régularité, notamment pour les CDD (articles L1242-1 et suivants) ;
  • l’existence du registre unique du personnel (article L1221-13) ;
  • la prévention des risques professionnels (DUERP – article R4121-1).

L’inspecteur s’intéresse également à des domaines spécifiques comme :

  • la lutte contre les discriminations (articles L1132-1 et suivants) ;
  • la répression du harcèlement moral et sexuel (articles L1152-1 et L1153-1) ;
  • ou encore le respect de l’interdiction de fumer et vapoter dans les lieux de travail (article R3512-2 du Code de la santé publique).

Comment se déroule un contrôle et quels sont les pouvoirs de l’inspecteur ?

Le contrôle peut être inopiné ou annoncé. L’inspecteur dispose d’un droit d’entrée dans l’entreprise à tout moment, de jour comme de nuit, sans autorisation préalable (article L8113-1). Il doit néanmoins signaler sa présence sur les lieux.

Il peut :

  • procéder à la visite des locaux ;
  • interroger les salariés individuellement, avec ou sans témoins (article L8113-5) ;
  • consulter et exiger la communication de documents obligatoires, notamment les bulletins de paie, le registre du personnel ou le DUERP (article L8113-4) ;
  • effectuer des prélèvements de produits ou des analyses, en cas de doute sur des risques chimiques ou biologiques.

Le contrôle peut également s’effectuer à distance, sur pièce, par échange de documents.

Quelles suites peut donner l’inspecteur après le contrôle ?

À l’issue du contrôle, plusieurs situations sont possibles :

  • Aucune observation si tout est conforme.
  • Observation orale ou écrite rappelant les textes applicables.
  • Mise en demeure de se mettre en conformité dans un délai imparti (article L8113-7).
  • Procès-verbal d’infraction, transmis au procureur (article L8113-5), constituant un acte ayant valeur probante jusqu’à preuve contraire.
  • Sanction administrative (article L8115-1) : avertissement ou amende administrative, en cas d’infraction non poursuivie pénalement.
  • En cas de danger grave et imminent, l’inspecteur peut ordonner la suspension immédiate de l’activité (article L4721-8), comme ce fut le cas pour les chantiers des JO 2024 présentant des risques de chute.

Peut-on refuser un contrôle de la DREETS ?

La réponse est clairement négative : il est formellement interdit à un employeur de refuser l’accès de l’inspecteur du travail aux locaux de l’entreprise. Une telle attitude constitue ce que le Code du travail qualifie de délit d’obstacle, prévu à l’article L8114-1.

Ce délit est caractérisé dès lors que l’employeur :

  • empêche matériellement ou volontairement l’accès aux locaux à l’inspecteur du travail,
  • refuse de lui communiquer les documents exigés, comme le registre unique du personnel, les bulletins de paie, le document unique d’évaluation des risques professionnels, etc.,
  • tarde délibérément à répondre aux sollicitations de l’agent de contrôle,
  • ou tente d’intimider ou de dissuader les salariés de collaborer avec l’inspecteur lors de ses investigations.

Les sanctions encourues sont particulièrement lourdes, afin d’assurer l’effectivité des missions de contrôle :

  • une peine d’un an d’emprisonnement,
  • et une amende de 37 500 €, qui peut être doublée en cas de récidive (article 132-10 du Code pénal).

Par ailleurs, l’entrave peut être retenue même sans refus explicite. Une obstruction passive (ne pas fournir les documents, ne pas se présenter malgré convocation) peut suffire à engager la responsabilité pénale de l’employeur.

Refuser un contrôle de la DREETS, ou entraver son bon déroulement, revient donc à s’exposer à une condamnation pénale, en plus des suites administratives que pourrait prendre l’inspection (mise en demeure, arrêt d’activité, amendes, etc.). L’attitude à privilégier reste donc la transparence, la coopération et, si nécessaire, le recours juridique a posteriori en cas de désaccord.

Quels sont les recours contre une décision de l’inspection du travail ?

Lorsqu’un employeur ou un salarié estime qu’une décision prise par un inspecteur du travail porte atteinte à ses droits ou repose sur une erreur d’appréciation, il existe deux voies principales de recours pour en obtenir la modification ou l’annulation : le recours administratif et le recours contentieux.

1. Le recours administratif

Ce recours permet d’exercer un droit de contestation auprès de l’administration elle-même, avant toute saisine du juge. Il se décline en deux formes :

  • Le recours gracieux consiste à adresser une demande directement à l’auteur de la décision, c’est-à-dire à l’inspecteur du travail, en exposant les motifs juridiques ou factuels qui justifient une révision de sa position. Ce recours est libre de forme, mais il est recommandé d’envoyer un courrier recommandé avec accusé de réception, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision.
  • Le recours hiérarchique s’adresse au supérieur hiérarchique de l’inspecteur, à savoir le directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) ou, selon les cas, directement au ministère du Travail. Ce recours peut être introduit en parallèle ou en substitution du recours gracieux. Il est régi par les principes généraux du droit administratif (notamment l’article L2422-3 du Code du travail pour les litiges relatifs aux salariés protégés).

L’un ou l’autre de ces recours suspend, dans certains cas, les délais de recours contentieux.

2. Le recours contentieux

Lorsque le recours administratif n’aboutit pas ou si le requérant préfère s’adresser directement au juge, il est possible d’introduire un recours contentieux devant le tribunal administratif compétent.

Ce recours vise à obtenir l’annulation de la décision administrative, sur la base d’une erreur de droit, d’un vice de procédure, d’un détournement de pouvoir ou d’une erreur manifeste d’appréciation. Il convient de respecter un délai de deux mois à compter de la décision contestée ou de la réponse (explicite ou implicite) au recours administratif.

L’assistance d’un avocat n’est pas obligatoire, mais elle est vivement recommandée en raison de la technicité des règles de procédure administrative.

Ce recours permet au justiciable de défendre ses droits face à une décision qu’il estime injustifiée ou disproportionnée, en s’appuyant sur les principes fondamentaux du droit du travail et du droit administratif.

Conclusion

Le contrôle de l’inspection du travail ne doit pas être perçu uniquement comme un levier de sanction, mais aussi comme une opportunité d’ajuster ses pratiques, de renforcer la conformité réglementaire et de prévenir les risques juridiques liés à la gestion des ressources humaines.

L’inspecteur, investi de pouvoirs étendus par le Code du travail, exerce une mission à la fois de contrôle, de conseil et de prévention. Il appartient à l’employeur d’adopter une attitude transparente, coopérative, et de veiller à la tenue rigoureuse des documents obligatoires.

En cas de désaccord sur une décision prise à l’issue du contrôle, des voies de recours juridiques sont ouvertes afin de garantir le respect des droits fondamentaux de l’entreprise. Pour toute question ou accompagnement personnalisé, les juristes de defendstesdroits.fr sont à votre disposition pour vous aider à sécuriser vos pratiques et anticiper les éventuelles difficultés liées à une inspection.

FAQ

1. L’inspection du travail peut-elle se présenter sans prévenir l’employeur ?

Oui. L’inspecteur du travail dispose d’un droit d’entrée dans les locaux de l’entreprise à tout moment, sans obligation de prévenir à l’avance (article L8113-1 du Code du travail). Cette prérogative s’exerce de jour comme de nuit, que l’établissement soit ouvert ou non, dès lors qu’il y a des indices laissant supposer une infraction ou un risque pour la santé et la sécurité des salariés. Ce caractère inopiné vise à garantir l’efficacité du contrôle et à éviter toute dissimulation. L’employeur est toutefois informé de la présence de l’agent à son arrivée dans les locaux.

2. Quels documents doivent être impérativement tenus à disposition en cas de contrôle ?

L’employeur doit pouvoir remettre immédiatement à l’inspecteur du travail un ensemble de documents légaux et réglementaires, dont notamment :

  • le registre unique du personnel (article L1221-13),
  • les bulletins de paie,
  • le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) (article R4121-1),
  • les contrats de travail,
  • le règlement intérieur, s’il est obligatoire (article L1321-1),
  • les déclarations sociales obligatoires,
  • les preuves du respect des temps de travail (planning, pointage, etc.),
  • la preuve de l’affichage obligatoire dans l’entreprise.

Un défaut de présentation peut être interprété comme un manquement susceptible d'entraîner une mise en demeure ou un procès-verbal d’infraction.

3. Quels sont les pouvoirs réels de l’inspecteur du travail lors d’une visite ?

L’inspecteur du travail dispose de pouvoirs d’enquête étendus, encadrés par les articles L8113-1 et suivants du Code du travail. Il peut :

  • interroger les salariés sans la présence de l’employeur,
  • consulter tout document exigé par la législation sociale,
  • vérifier l’identité des travailleurs, notamment pour détecter le travail dissimulé,
  • effectuer des prélèvements ou analyses sur les produits ou substances utilisés dans l’entreprise,
  • dresser un procès-verbal transmis au procureur de la République en cas d’infraction constatée.

En outre, il peut prescrire des mesures correctrices, voire ordonner l’arrêt immédiat d’une activité dangereuse (article L4721-8).

4. Quelles sanctions encourt l’employeur en cas de manquement constaté ?

Les sanctions dépendent de la gravité et de la nature du manquement :

  • Mise en demeure de se conformer dans un délai précis (article L8113-7),
  • Procès-verbal d’infraction transmis au parquet (article L8113-5),
  • Amende administrative (article L8115-1), prononcée par la DREETS, jusqu’à plusieurs milliers d’euros selon la situation,
  • Suspension temporaire de l’activité, en cas de danger grave et imminent (article L4721-8),
  • Poursuites pénales, notamment en cas de travail dissimulé, harcèlement ou entrave à l’action de l’inspecteur.

À noter que le délit d’obstacle à l’exercice des missions de l’inspecteur est passible d’un an d’emprisonnement et 37 500 € d’amende (article L8114-1).

5. Comment contester une décision de l’inspection du travail après un contrôle ?

L’employeur dispose de deux voies principales pour contester une décision :

  • Recours administratif : il peut s’agir d’un recours gracieux (auprès de l’auteur de la décision) ou d’un recours hiérarchique (auprès du directeur régional du travail ou du ministère du Travail). Ce recours peut permettre une révision amiable de la décision.
  • Recours contentieux : en cas d’échec du recours administratif ou si l’employeur le souhaite directement, il peut saisir le tribunal administratif compétent pour demander l’annulation de la décision (selon les règles générales du contentieux administratif).

Il est recommandé de formaliser toute contestation par écrit, avec des arguments juridiques précis et, si possible, avec l’aide d’un avocat ou d’un juriste spécialisé en droit du travail.

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