La période d’essai constitue un mécanisme central du droit du travail français, permettant à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié et au salarié d’apprécier la réalité du poste proposé. Cette phase initiale, prévue aux articles L1221-19 et suivants du Code du travail, offre une certaine flexibilité aux parties, notamment la possibilité de mettre fin au contrat sans avoir à justifier d’un motif disciplinaire ou économique. Pourtant, derrière cette apparente simplicité juridique, les conséquences en matière d’indemnisation par l’assurance chômage demeurent complexes et sources de nombreuses interrogations pour les travailleurs.
En effet, la rupture d’une période d’essai peut bouleverser immédiatement la situation professionnelle et financière du salarié. Lorsqu’elle intervient à l’initiative de l’employeur, elle s’analyse en principe comme une perte involontaire d’emploi, situation ouvrant potentiellement droit à l’Allocation d’Aide au Retour à l’Emploi (ARE), conformément à l’article 2 §2 du règlement général annexé à la convention d’assurance chômage du 15 novembre 2024. Cependant, ce droit n’est jamais automatique et dépend notamment de la nature du précédent contrat, du nombre de jours travaillés, et des conditions d’affiliation déjà remplies.
À l’inverse, lorsque la rupture est initiée par le salarié, elle est généralement assimilée à une démarche volontaire, excluant, sauf exceptions limitativement prévues, toute indemnisation. Les mécanismes introduits par la réglementation chômage — tels que les dispositifs spécifiques aux 65 premiers jours de travail ou aux 88 premiers jours d’un contrat repris en cours d’indemnisation — imposent une lecture attentive des textes applicables et appellent une analyse précise des situations individuelles.
Les règles issues du règlement général de 2024, applicables depuis 2025, renforcent ces distinctions en encadrant de manière stricte les ouvertures de droits en cas de rupture de période d’essai. Les salariés doivent ainsi comprendre que ce moment charnière, souvent perçu comme une simple formalité contractuelle, peut avoir des conséquences déterminantes sur leur droit à percevoir l’ARE.
À travers cet article, defendstesdroits.fr propose une étude complète, structurée et juridiquement fondée de l’ensemble des cas permettant ou empêchant l’ouverture de droits au chômage à la suite d’une rupture de période d’essai. L’objectif est de donner au justiciable une compréhension claire des règles applicables, en s’appuyant sur les dispositions du Code du travail et du règlement général de l’assurance chômage, afin de lui permettre d’appréhender pleinement ses droits et obligations.
L’ouverture des droits dépend de trois paramètres essentiels :
Ces critères sont directement issus du règlement général annexé à la convention du 15 novembre 2024 relative à l’assurance chômage, notamment ses articles 2 §2, 9 et 26.
Si la fin du contrat précédent ne résulte pas d’une démission (licenciement, rupture conventionnelle, fin de CDD…), alors le salarié peut ouvrir des droits à l’ARE, sous réserve de justifier de ses conditions d’affiliation et d’aptitude à l’emploi (article 2 §2 du règlement général).
Dans ce cas, la rupture de la période d’essai constitue bien une perte involontaire d’emploi.
En principe, une démission n’ouvre pas droit au chômage (article 2 §2 du règlement général).
Cependant, le règlement prévoit une exception dite de la démission légitime dans les conditions suivantes :
Ces conditions proviennent de la réglementation chômage issue de l’UNEDIC, reprise dans l’article 2 §2.
À défaut de réunir les 3 années continues d’emploi avant la démission, le salarié ne peut obtenir l’ARE.
Dès lors que le salarié dépasse les 65 jours travaillés, l’origine de la rupture précédente (démission, licenciement…) n’a plus d’incidence.
Il suffit de remplir les conditions habituelles d’ouverture des droits (affiliation, disponibilité, aptitude) prévues par l’article 9 du règlement général.
Lorsque le salarié met fin à sa période d’essai, la rupture est considérée comme une initiative volontaire, ce qui empêche en principe toute indemnisation (article 2 §2 du règlement général).
Cependant, plusieurs exceptions permettent d’ouvrir ou de réactiver des droits au chômage.
Le règlement général prévoit un cas particulier dans lequel le salarié peut bénéficier de l’ARE :
Ce cas est prévu à l’article 2 §2 du règlement.
Lorsque le salarié percevait déjà l’ARE avant sa reprise d’emploi, il peut rétablir ses droits si :
Ce dispositif permet de réactiver l’ARE sans nouvelle ouverture de droits.
Après 88 jours travaillés, la rupture volontaire ne permet plus d’obtenir le chômage.
Deux exceptions existent toutefois lorsque le salarié était indemnisé avant la reprise d’emploi (article 26 du règlement général) :
Ce mécanisme vise à protéger les allocataires ayant accepté de très courtes missions sans risquer de perdre leurs droits.
Le Code du travail encadre strictement le délai de prévenance.
Le salarié qui met fin à sa période d’essai doit respecter les délais prévus à l’article L1221-26 du Code du travail. Leur durée dépend du temps de présence dans l'entreprise.
L’employeur doit appliquer les délais de l’article L1221-25 du Code du travail.
Ces délais varient en fonction de l’ancienneté et peuvent être précisés par la convention collective.
Même si le salarié est éligible à l’ARE, l’indemnisation ne commence qu’après plusieurs délais réglementaires :
Ces différés visent à harmoniser les périodes d’indemnisation.
Lorsqu’un salarié se retrouve sans emploi et non indemnisé, il peut demander, à l’issue de 121 jours de chômage non indemnisé, le réexamen de sa situation par l’Instance Paritaire Régionale (IPR) (article 46 bis du règlement général).
Ce réexamen exige :
L’IPR peut alors attribuer une indemnisation exceptionnelle.
La rupture d’une période d’essai constitue un moment déterminant dans la relation de travail, tant pour l’employeur que pour le salarié. Si le droit du travail envisage cette phase comme une période d’adaptation réciproque, le droit du chômage, lui, lui confère un statut juridique spécifique, parfois favorable, parfois restrictif. Les textes en vigueur, et particulièrement le règlement général annexé à la convention du 15 novembre 2024, ont renforcé les mécanismes d’ouverture, de maintien ou de réactivation des droits en fonction de la situation du salarié et du contexte de la rupture.
L’analyse révèle que les droits à l’indemnisation varient largement selon que la démarche émane de l’employeur ou du salarié, mais aussi selon le nombre de jours travaillés, la nature du précédent contrat et l’historique d’indemnisation du demandeur. Les règles particulières — notamment celles applicables dans les 65 premiers jours d’un emploi repris, ou dans les 88 premiers jours pour les allocataires reprenant un emploi en cours d’indemnisation — démontrent que la réglementation chômage ne se limite pas à une logique de rupture volontaire ou involontaire, mais qu’elle prend en compte la progression professionnelle du demandeur et la durée effective de travail.
Au regard de ces éléments, la période d’essai ne doit jamais être appréhendée comme une simple formalité d’intégration. Elle constitue un terrain juridique très encadré, où chaque décision peut avoir un impact direct sur les droits sociaux du salarié. La possibilité d’un recours devant l’Instance Paritaire Régionale après 121 jours sans indemnisation illustre d’ailleurs cette vigilance : les institutions doivent être en mesure d’apprécier la situation individuelle du travailleur pour éviter une perte totale de protection sociale.
En éclairant les salariés sur l’ensemble de ces mécanismes, defendstesdroits.fr a pour objectif d’offrir un accès simplifié à une matière juridique complexe mais indispensable à la sécurisation des parcours professionnels. Connaître ces règles permet d’anticiper les conséquences d’une rupture de période d’essai, de préserver ses droits à l’assurance chômage et d’engager, lorsque c’est nécessaire, les démarches adéquates pour obtenir une indemnisation ou un réexamen de situation.
Oui, à condition que la rupture s’analyse comme une perte involontaire d’emploi et que le salarié remplisse les conditions d’affiliation, d’âge et d’aptitude. Les textes prévoient que lorsque l’employeur rompt la période d’essai, le salarié peut percevoir l’ARE si son emploi précédent n’a pas été quitté volontairement ou s’il remplit les critères des démissions dites légitimes. Le nombre de jours travaillés (65 jours notamment) détermine aussi les droits ouverts.
En principe, non : la rupture volontaire est assimilée à une démission. Toutefois, la réglementation prévoit des exceptions, notamment lorsqu’un emploi est repris immédiatement après une perte involontaire d’emploi et que la rupture intervient dans les 65 premiers jours, ou lorsqu’un salarié indemnisé rompt un nouvel emploi dans les 88 premiers jours. Ces exceptions permettent une réactivation ou une ouverture de droits sans nouvelle période d’affiliation.
Ces seuils sont fixés par la réglementation chômage pour distinguer les situations où la rupture relève d’un ajustement professionnel rapide (période courte) ou d’une installation réelle dans un nouvel emploi. Ainsi, dans les 65 jours, la reprise d’activité est considérée comme précaire, ce qui justifie une ouverture plus souple des droits. Les 88 jours, eux, concernent les allocataires reprenant un emploi tout en restant en cours de droits.
Le délai dépend de l’initiative de la rupture. L’article L1221-26 du Code du travail impose au salarié un préavis proportionnel à sa durée de présence. L’article L1221-25 impose à l’employeur un délai variable selon l’ancienneté acquise. Ces délais protègent le salarié en lui donnant un temps d’adaptation avant la rupture définitive du contrat.
Si le salarié remplit toutes les conditions mais n’est pas indemnisé, il peut saisir l’Instance Paritaire Régionale après 121 jours sans allocation. L’IPR examine alors sa situation : efforts de recherche d’emploi, reprises courtes d’activité, cohérence du parcours professionnel. L’instance peut accorder une indemnisation exceptionnellement. Ce recours constitue un dispositif de sécurité pour éviter qu’une rupture d’essai empêche tout accès à la protection chômage.