Travail

Perte d’un proche : combien de jours d’absence prévus par la loi ?

Estelle Marant
Collaboratrice
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Congé décès : obligations de l’employeur et droits du salarié

La perte d’un proche entraîne des conséquences humaines, familiales et organisationnelles auxquelles aucun salarié ne peut réellement se préparer. Afin d’assurer une protection minimale et de permettre à chacun d’affronter cette période sans être entravé par ses obligations professionnelles, le droit du travail encadre strictement les congés pour décès.

Ce régime, issu des articles L3142-1 et suivants du Code du travail, offre à tout salarié, quel que soit son contrat ou son ancienneté, la possibilité de s’absenter pour accomplir les démarches nécessaires, honorer les obligations familiales ou simplement traverser le choc émotionnel du deuil.

Loin d’être uniforme, ce dispositif distingue les situations en fonction du lien de parenté, prévoit un traitement renforcé en cas de décès d’un enfant, reconnaît la notion particulière de congé de deuil, et s’articule avec des règles conventionnelles parfois plus avantageuses.

L’objectif du législateur est double : garantir la continuité des droits du salarié tout en assurant un encadrement clair des obligations de l’employeur, notamment en matière de rémunération, de justificatifs ou de prise effective des congés.

Dans ce contexte, comprendre les droits attachés au congé pour décès, les modalités de mise en œuvre, les possibilités de recours et les interactions entre loi, conventions collectives et jurisprudence apparaît essentiel pour tout salarié confronté à un évènement familial d’une telle gravité. defentsesdroits.fr vous propose une analyse juridique complète, structurée et actualisée, permettant de maîtriser les règles applicables et d’anticiper les démarches nécessaires.

Sommaire

  1. Le cadre légal des congés pour décès
  2. Qui peut bénéficier d’un congé décès ?
  3. Décès d’un enfant : congés exceptionnels et congé de deuil
  4. Décès d’autres membres de la famille : durées prévues par la loi
  5. Décès non prévus par la loi : rôle des conventions collectives
  6. Démarches du salarié pour obtenir le congé
  7. Prise du congé : délais, obligations et jurisprudence
  8. Refus de l’employeur : quels recours ?
  9. Rémunération pendant le congé décès
  10. Effets sur les congés payés et indemnités sociales

1. Le principe du congé exceptionnel pour évènements familiaux

Le législateur prévoit que certains évènements personnels nécessitent la mise à disposition de jours d’absence rémunérés. Parmi ces évènements figurent le mariage, le PACS, la naissance, mais également le décès d’un proche.

L’article L3142-1 du Code du travail établit la liste des situations ouvrant droit à congés exceptionnels. Cette liste légalement fixée est dite limitative, sauf dispositions conventionnelles plus avantageuses pouvant étendre les motifs d’absence.

1.1. Un droit ouvert à tous les salariés

Le bénéfice du congé pour décès s’applique, sans distinction :
– aux salariés en CDD ou CDI ;
– aux apprentis ;
– à tous les salariés, quel que soit l’effectif de l’entreprise ;
– sans condition d’ancienneté.

Ce caractère universel résulte de la volonté du législateur de garantir à chaque salarié un cadre protecteur en cas de décès familial.

1.2. L’articulation entre loi et conventions collectives

Les jours prévus par la loi représentent un socle minimal. L’article L3142-4 du Code du travail précise que toute convention ou accord collectif peut améliorer ces droits.
Lorsque des dispositions conventionnelles sont plus favorables, elles priment sur la loi. Les salariés doivent donc systématiquement vérifier la convention collective applicable à leur entreprise.

2. Décès d’un enfant : congé exceptionnel et congé de deuil

La perte d’un enfant constitue l’un des évènements les plus graves auxquels le salarié peut être confronté. Le Code du travail prévoit un ensemble de droits renforcés.

2.1. Tableau légal des congés en cas de décès d’un enfant

Selon l’article L3142-4, la durée légale du congé varie selon la situation :

12 jours en cas de décès d’un enfant (cas général) ;
14 jours si l’enfant était âgé de moins de 25 ans ;
14 jours si l’enfant, quel que soit son âge, était lui-même parent ;
14 jours en cas de décès d’une personne de moins de 25 ans à la charge effective et permanente du salarié.

Ces jours sont des jours ouvrables, conformément à la lettre de l’article précité.

2.2. Le congé de deuil : un droit cumulable

En complément, l’article L3142-1-1 du Code du travail ouvre droit à un congé de deuil de 8 jours, lorsque le salarié perd :
– un enfant âgé de moins de 25 ans ;
– ou une personne de moins de 25 ans à sa charge effective et permanente.

Ce congé :
– peut être fractionné en deux périodes d’au moins une journée (article D3142-1-1) ;
– doit être pris dans l’année suivant le décès ;
– se cumule avec les jours de congés exceptionnels.

3. Décès d’un autre membre de la famille : durées légales applicables

L’article L3142-4 du Code du travail détermine également les durées minimales pour d’autres décès familiaux.

<h3>3.1. Jours prévus par la loi</h3>

3 jours pour le décès du conjoint, du concubin ou du partenaire de PACS ;
3 jours pour le décès du père ou de la mère ;
3 jours pour le décès du beau-père ou de la belle-mère, au sens défini par la jurisprudence ;
3 jours pour le décès d’un frère ou d’une sœur.

La précision jurisprudentielle concernant le beau-père ou la belle-mère

La Cour de cassation, dans un arrêt du 14 mars 1985 (n°83-43443), indique que la notion de beau-père ou belle-mère doit s’entendre exclusivement des parents du conjoint du salarié, et non du conjoint remarié du père ou de la mère.

Décès non prévus par la loi : rôle des conventions collectives

La loi ne prévoit aucun droit automatique en cas de décès :
– d’un grand-parent ;
– d’un oncle ou d’une tante ;
– d’un neveu ou d’une nièce.

Cependant, une convention collective peut accorder une durée spécifique.
À titre d’exemple, la Convention collective Syntec, dans son annexe 1 article 5-7, ouvre droit à 2 jours ouvrés pour le décès d’un ascendant autre que les parents.

4. Démarches à accomplir pour bénéficier du congé

4.1. Informer l’employeur : modalités et justificatifs

Le salarié doit avertir son employeur et produire un justificatif, conformément à l’article L3142-1.
Il peut s’agir d’un acte de décès. L’employeur ne peut exiger un document excédant ce qui est nécessaire pour vérifier l’évènement.

4.2. Délai pour prendre le congé

La jurisprudence admet une période raisonnable entourant l’évènement (Cass. soc., 16 décembre 1998, n°96-43323).

Le salarié n’a toutefois aucune obligation de prendre les jours auxquels il a droit. En l’absence de demande, aucun rappel d’indemnisation ne peut être exigé (Cass. soc., 22 décembre 1988, n°87-43289).

4.3. Recours en cas de refus de l’employeur

En application de l’article L3142-3, toute contestation peut être portée devant le Conseil de prud’hommes, statuant selon la procédure accélérée au fond.

Ce recours permet au salarié d’obtenir une décision en dernier ressort, selon l’article R3142-1.

5. Effets du congé de décès sur la rémunération et les congés payés

5.1. Assimilation à du temps de travail effectif

Les jours d’absence liés au décès, y compris le congé de deuil, sont considérés comme du temps de travail effectif pour le calcul des congés payés.
Cette règle figure à l’article L3142-2 du Code du travail.

Il est également interdit d’imputer ces jours sur le congé annuel légal.

5.2. Rémunération du salarié

Toujours selon l’article L3142-2, l’absence n’entraîne aucune perte de rémunération.

Particularité du congé de deuil

Durant le congé de deuil, le salarié perçoit :
– des indemnités journalières de Sécurité sociale (article L331-9 du Code de la sécurité sociale) ;
– un maintien de salaire par l’employeur, déduction faite des IJSS, avec subrogation de plein droit au profit de l’employeur.

Les IJSS de deuil ne sont pas cumulables avec d’autres indemnités légales telles que :
– l’indemnité maladie ;
– les IJ de maternité, paternité, adoption ;
– les IJ d’accident du travail ;
– les allocations chômage.

Certaines conventions collectives prévoient par ailleurs une allocation obsèques, sous conditions spécifiques.

Conclusion

Le dispositif légal du congé pour décès constitue un socle protecteur indispensable, destiné à accompagner le salarié dans l’une des périodes les plus éprouvantes de sa vie personnelle. Qu’il s’agisse des jours légalement prévus, des aménagements posés par la jurisprudence, du rôle des conventions collectives, ou encore du congé de deuil spécialement créé pour soutenir les familles touchées par la perte d’un enfant, le cadre juridique offre un ensemble de garanties essentielles.

L’employeur doit respecter strictement ces droits, tant en matière de durée que de rémunération, sous peine de s’exposer à un contentieux prud’homal. De son côté, le salarié doit veiller à informer l’entreprise et à fournir les justificatifs requis afin d’assurer la bonne mise en œuvre de ses droits.

La diversité des situations familiales et professionnelles nécessite toutefois une analyse approfondie de chaque cas, notamment lorsque la convention collective apporte des droits supplémentaires ou lorsque l’évènement n’est pas expressément prévu par la loi.

Dans un tel contexte, connaître précisément le fonctionnement des congés pour décès permet d’agir sereinement, de préserver ses droits et de bénéficier pleinement des protections offertes par le Code du travail et les accords collectifs. Si vous souhaitez approfondir une question particulière ou obtenir un accompagnement adapté à votre situation, defendstesdroits.fr met à disposition ses ressources juridiques et son expertise spécialisée.

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