Tenir un registre unique du personnel (RUP) n’est pas une simple formalité administrative. Il s’agit d’une obligation légale imposée à tout employeur par le Code du travail, visant à garantir la transparence et la traçabilité des relations d’emploi au sein de l’entreprise.
À travers ce document, l’administration peut exercer un contrôle sur les effectifs, les statuts des travailleurs, et le respect des obligations liées à l’embauche.
Trop souvent relégué au second plan, le RUP constitue pourtant un outil de preuve fondamental en cas de litige ou de contrôle. Ignorer cette obligation expose l’employeur à des sanctions pénales et à une potentielle requalification des relations de travail. Il est donc indispensable de maîtriser ses règles de tenue, son contenu, sa mise à jour et les modalités de conservation, afin d’éviter toute défaillance juridique.
Conformément à l'article L1221-13 du Code du travail, tout employeur a l'obligation de tenir à jour un registre unique du personnel (RUP). Cette obligation s'impose dès l'embauche du premier salarié, quel que soit l'effectif ou la forme juridique de l'entreprise.
Cette exigence s’applique à l’ensemble des employeurs, à l’exception notable :
Le registre doit répertorier tous les travailleurs intervenant dans l’entreprise : salariés en CDI, CDD, intérimaires, stagiaires, apprentis, télétravailleurs, ainsi que les personnes en service civique. L’employeur doit ainsi assurer une traçabilité complète des effectifs présents, en respectant les règles précises fixées par les textes.
Le contenu du RUP est strictement encadré par les dispositions de l’article D1221-23 du Code du travail. Chaque entrée doit comporter les informations essentielles suivantes :
Des mentions spécifiques doivent également apparaître en fonction du type de contrat ou de situation particulière :
Concernant les stagiaires, l'article L124-4-5 du Code de l'éducation impose l’inscription :
Les télétravailleurs doivent être identifiés comme tels, conformément à la réglementation issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.
Le registre doit être renseigné immédiatement lors de l’embauche d’un salarié, dans l’ordre chronologique. Tout événement impactant la situation du salarié (modification de poste, changement de qualification, obtention de la nationalité française) doit faire l’objet d’une mise à jour sans délai.
Le support du registre n’est pas imposé par la loi : il peut être papier ou informatique. Toutefois, un usage numérique suppose :
Aucune déclaration à la CNIL n’est requise lorsque le registre est exclusivement utilisé pour des statistiques internes, selon la dispense n° 9 établie par la CNIL. Cela n’exonère pas l’employeur de ses obligations au titre du RGPD.
Les mentions inscrites doivent être conservées durant cinq ans à compter de la date de départ du salarié (article D1221-26).
Le registre unique du personnel doit être présenté à tout moment aux agents de contrôle de l’inspection du travail, conformément aux exigences du Code du travail. Ces agents disposent d’un pouvoir de vérification étendu, leur permettant de contrôler l’existence, la tenue et la conformité du registre au regard des obligations légales.
L’article L8113-4 du Code du travail attribue expressément à l’inspecteur du travail la compétence pour accéder à tout document ou registre lié à la gestion du personnel. Cela comprend le RUP, qui doit être disponible dans l’établissement où sont employés les salariés.
Toute absence de registre, tenue inexacte, ou omission de mentions obligatoires constitue un manquement sanctionné par la loi. En vertu de l’article R1227-7 du Code du travail, l’employeur encourt une amende forfaitaire de 750 euros par salarié concerné. Cette sanction relève d’une contravention de 4ᵉ classe, ce qui signifie qu’elle peut être appliquée autant de fois qu’il y a de salariés pour lesquels une irrégularité est constatée.
Par exemple :
De surcroît, le non-respect de cette obligation peut également être retenu à titre de preuve contre l’employeur devant le conseil de prud’hommes, notamment dans des litiges portant sur la reconnaissance d’une relation de travail dissimulée, ou sur la durée effective d’emploi.
La tenue rigoureuse et actualisée du RUP est donc une garantie juridique majeure pour l’employeur, tant au regard des contrôles administratifs que des contentieux sociaux. Il ne s’agit pas d’un simple document administratif, mais bien d’un instrument de conformité sociale essentiel.
Le registre unique du personnel (RUP) n’est pas un document interne à usage exclusif de l’employeur. Il doit être tenu à disposition de plusieurs acteurs légalement habilités, qui peuvent l’examiner dans le cadre de leurs missions de contrôle ou de représentation du personnel.
Parmi ces acteurs, figurent :
Le refus de présentation du registre à l’un de ces agents constitue une violation directe du Code du travail. L’article L8114-1 qualifie ce manquement de délit d’entrave à l’exercice des fonctions de contrôle, passible de sanctions pénales pouvant aller jusqu’à un an d’emprisonnement et 7 500 € d’amende pour la personne physique responsable, voire davantage pour une personne morale (article 131-38 du Code pénal).
Ne pas tenir le registre à disposition dans l’établissement, ou ne pas permettre sa consultation dans les conditions requises, peut donc exposer l’employeur à des poursuites pénales, en plus des sanctions administratives prévues en cas d’anomalies constatées dans le registre lui-même.
Ainsi, la mise à disposition effective du registre constitue une obligation de résultat, et non de moyens, pour l’employeur. Une organisation rigoureuse de la gestion des documents sociaux est donc essentielle à la conformité de l’entreprise.
Le registre unique du personnel ne se résume pas à un simple cahier d’inscription : c’est une pièce obligatoire, contrôlable et sanctionnable, qui reflète fidèlement l’activité sociale de l’entreprise.
Sa bonne tenue participe à la sécurisation des relations de travail et à la conformité de l’employeur face à ses multiples obligations. Qu’il s’agisse de l’inspection du travail, des représentants du personnel ou des organismes sociaux, tous doivent pouvoir y accéder dans des conditions garantissant transparence, fiabilité et actualité des informations. C’est donc un levier stratégique de conformité, trop souvent négligé, qui mérite une attention constante.
1. Le registre unique du personnel est-il obligatoire pour toutes les entreprises ?
Oui, la tenue du registre unique du personnel (RUP) est obligatoire pour tous les employeurs, dès l'embauche du premier salarié, peu importe la taille ou la forme juridique de l'entreprise (article L1221-13 du Code du travail). Il s'applique aux entreprises individuelles, sociétés, associations, et administrations, dès lors qu’elles emploient un ou plusieurs salariés.
Seules exceptions :
2. Quelles sont les mentions obligatoires à inscrire dans le registre unique du personnel ?
Selon l’article D1221-23 du Code du travail, le registre doit comporter, pour chaque salarié :
Des mentions spécifiques sont requises pour certains statuts :
Chaque information doit être tenue à jour, notamment en cas de changement de qualification ou de modification du statut du salarié.
3. Sous quel format peut-on tenir le registre unique du personnel ?
La loi n’impose aucun format spécifique. Le registre peut donc être :
Toutefois, si l’employeur choisit un support informatique, il doit respecter certaines conditions :
Aucune déclaration à la CNIL n’est requise si le registre est utilisé exclusivement pour des finalités statistiques internes, mais les obligations du RGPD restent applicables.
4. Que risque l’employeur en cas d’absence ou de mauvaise tenue du registre ?
En cas de non-présentation, absence, ou tenue irrégulière du registre, l’employeur s’expose à des sanctions pénales.
L’article R1227-7 du Code du travail prévoit une amende de 750 € par salarié concerné, en tant que contravention de 4ᵉ classe. Cette amende est cumulative et peut donc s’élever à plusieurs milliers d’euros selon le nombre de salariés concernés.
De plus, l’obstacle à un contrôle de l’inspection du travail peut constituer un délit d’entrave (article L8114-1), avec des sanctions pénales plus lourdes.
Ces risques montrent l’importance de maintenir un registre à jour, accessible et conforme, à tout moment.
5. Qui peut consulter le registre unique du personnel ?
Le registre ne peut pas être consulté librement par n’importe qui. Il est destiné à certains acteurs précis, habilités par la loi :
Il doit être tenu à disposition dans l’établissement concerné, afin de permettre un contrôle rapide et sans entrave. L’absence de mise à disposition constitue une infraction susceptible d’être requalifiée en délit d’entrave.
La consultation par les représentants du personnel est encadrée : elle doit s’inscrire dans le respect de la confidentialité des données et des finalités prévues par le Code du travail.