Abandon de poste et présomption de démission : guide complet

Estelle Marant
Collaboratrice
3 minutes
Partager

L'abandon de poste et les indemnités chômage - qu'est-ce qui a changé depuis le décret de 2023

En 2023, le Conseil constitutionnel a validé une nouvelle loi travail qui modifie en profondeur les règles concernant l'abandon de poste et les indemnités chômage. Cette réforme introduit des nuances importantes dans l'application de ces nouvelles règles.

Abandon de poste et chômage : quelle était la situation avant 2023 ?

Contexte et définition de l'abandon de poste

Avant le 5 octobre 2022, l'abandon de poste pouvait permettre au salarié d'obtenir des indemnités chômage, une fois licencié. L'abandon de poste était caractérisé par une absence injustifiée et prolongée sans l'accord du supérieur hiérarchique et sans indication de retour.

Procédure de licenciement pour abandon de poste

Lorsqu'un salarié abandonnait son poste, l'employeur devait engager une procédure de licenciement spécifique pour abandon de poste. Cette procédure comprenait plusieurs étapes importantes :

  1. Mise en demeure : L'employeur devait envoyer une mise en demeure au salarié, lui demandant de justifier son absence et de reprendre son poste. Cette mise en demeure était généralement envoyée par courrier recommandé avec accusé de réception.
  2. Convocation à un entretien préalable : Si le salarié ne répondait pas à la mise en demeure, l'employeur devait ensuite convoquer le salarié à un entretien préalable au licenciement. Cette convocation devait également être envoyée par courrier recommandé avec accusé de réception.
  3. Entretien préalable au licenciement : Durant cet entretien, l'employeur et le salarié discutaient des motifs de l'absence et des éventuelles justifications du salarié. Cet entretien était une étape cruciale pour permettre au salarié de s'expliquer avant toute décision de licenciement.
  4. Lettre de licenciement : À l'issue de l'entretien, si l'employeur estimait que les justifications du salarié n'étaient pas suffisantes, il pouvait alors envoyer une lettre de licenciement pour abandon de poste. Cette lettre devait préciser les motifs du licenciement et les droits du salarié.

Droit aux indemnités chômage

Une fois licencié pour abandon de poste, le salarié pouvait demander des indemnités chômage.

En effet, l'article L. 5422-1 du Code du travail permettait à tous les salariés privés involontairement de leur emploi de toucher le chômage, indépendamment du type de licenciement (pour faute grave ou simple). La seule condition pour déclencher le versement de l'ARE (Aide au Retour à l'Emploi) était d'être inscrit comme demandeur d'emploi à Pôle emploi dans les 12 mois suivant la fin du contrat de travail.

L’abandon de poste désormais considéré comme une démission

Dans le cadre de la réforme du chômage, un amendement controversé a été introduit : il considère désormais les salariés en abandon de poste comme "présumés démissionnaires". Cette modification a de fortes conséquences pour les salariés concernés. En effet, une absence prolongée, injustifiée et non validée par le supérieur est maintenant assimilée à une présomption de démission, privant ainsi le salarié des indemnités chômage.

Comme le souligne BFM TV, cette nouvelle application de l'article L. 5422-1 du Code du travail peut priver le salarié de son droit à l'allocation.

La présomption de démission jugée légale… mais contestable

Le Conseil constitutionnel a validé la loi sur l'abandon de poste en 2023, mais a précisé des exceptions et des moyens de contestation. Cette validation légale signifie que, désormais, un salarié peut être présumé démissionnaire en cas d'abandon de poste, mais cette présomption n'est pas sans conditions ni recours.

Conditions de la présomption de démission

Un salarié ne peut être présumé démissionnaire qu'après avoir été mis en demeure par son employeur de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai déterminé. Ce délai minimum est fixé par décret en Conseil d'État.

Cette mise en demeure doit être formalisée par écrit, généralement par courrier recommandé avec accusé de réception, et doit informer le salarié des conséquences de son absence prolongée.

Moyens de contestation pour le salarié

Le salarié dispose de moyens de contestation pour s'opposer à la rupture de son contrat de travail.

En particulier, il peut saisir le conseil de prud'hommes sans conciliation préalable. Le salarié doit engager cette procédure dans un délai d'un mois à compter de la réception de la mise en demeure.

Devant le conseil de prud'hommes, le salarié peut argumenter que l'abandon de poste était justifié par des motifs légitimes, notamment si l'absence est due à des manquements de l'employeur, tels que le harcèlement, des conditions de travail dangereuses ou tout autre manquement grave.

Exceptions à la présomption de démission

Le Conseil constitutionnel a précisé que la présomption de démission peut être annulée si l'abandon de poste est dû à des manquements graves de l'employeur.

Par exemple, si un salarié abandonne son poste à cause de harcèlement moral ou physique, ou en raison de conditions de travail inacceptables, il peut contester la présomption de démission et demander la requalification de la rupture du contrat en licenciement abusif.

Publication du décret d’application

Le 17 avril 2023, le décret n°2023-275 est entré en vigueur, entérinant la présomption de démission en cas d'abandon de poste.

Ce décret précise les règles et procédures que les employeurs doivent suivre pour appliquer cette présomption. Selon le décret, un salarié peut être considéré comme démissionnaire s'il ne justifie pas son absence ou ne reprend pas son poste dans les 15 jours suivant la réception de la mise en demeure.

Conséquences pour le salarié

Si le salarié ne répond pas à la mise en demeure dans le délai imparti, et s'il ne justifie pas son absence par un motif légitime, l'employeur est en droit de mettre fin au contrat de travail sous le régime de la démission par abandon de poste. Cela signifie que le salarié perdra ses droits aux indemnités chômage, puisque la démission est considérée comme une rupture volontaire du contrat de travail.

Pour plus d'informations sur vos droits et des conseils juridiques, visitez www.defendstesdroits.fr.

FAQ sur la présomption de démission en cas d'abandon de poste

Qu'est-ce que la présomption de démission en cas d'abandon de poste ?

La présomption de démission est une disposition introduite par la nouvelle loi travail, permettant à un employeur de considérer un salarié ayant abandonné son poste comme ayant démissionné. Cette mesure vise à prévenir les abus du système d'indemnités chômage.

Quels sont les délais pour la mise en demeure ?

L'employeur doit envoyer une mise en demeure au salarié, lui demandant de justifier son absence et de reprendre son poste. Le délai minimal accordé au salarié est de 15 jours calendaires à partir de la date de présentation de la mise en demeure. Ce délai inclut les jours fériés et les weekends​.

Quelles sont les étapes à respecter pour mettre en œuvre la présomption de démission ?
  1. Mise en demeure : L'employeur envoie une lettre recommandée ou une lettre remise en main propre contre décharge, demandant au salarié de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai minimum de 15 jours.
  2. Justification ou reprise : Le salarié doit soit justifier son absence par un motif légitime soit reprendre son poste dans le délai imparti.
  3. Démission présumée : Si le salarié ne répond pas ou ne reprend pas son poste à la date fixée, il est considéré comme démissionnaire​
Qu'est-ce qu'un motif légitime d'absence ?

Les motifs légitimes pouvant empêcher l'application de la présomption de démission incluent :

  • Raisons médicales (avec justificatif médical)
  • Exercice du droit de grève
  • Exercice du droit de retrait en cas de danger grave et imminent
  • Refus d'exécuter une instruction contraire à une réglementation
  • Modifications unilatérales du contrat de travail par l'employeur​
Que se passe-t-il si le salarié conteste la présomption de démission ?

Le salarié peut contester la présomption de démission devant le conseil de prud'hommes sans passer par une conciliation préalable. Le juge doit statuer sur la contestation dans un délai d'un mois. Si la démission est jugée équivoque, elle peut être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, donnant droit à des indemnités de licenciement​.

Quelles sont les conséquences de la présomption de démission sur les droits au chômage ?

Un salarié considéré comme ayant démissionné ne peut pas bénéficier des allocations chômage, sauf s'il parvient à prouver que sa démission est due à un motif légitime. La démission volontaire prive en effet le salarié des droits à l'assurance chômage​​.

Pour plus d'informations et des conseils juridiques personnalisés, visitez www.defendstesdroits.fr. Abonnez-vous également à la newsletter de Culture RH pour rester informé des dernières actualités RH.

Vous avez un problème juridique ?

Contactez-nous

Retrouvez-nous sur les réseaux !

Retrouvez nos vidéos tous les jours, sur nos réseaux sociaux, pour éviter les arnaques du quotidien ensemble !