Comment un Salarié Peut Rapporter la Preuve du Harcèlement Moral au Travail

Francois Hagege
Fondateur
4 minutes
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Le harcèlement moral au travail est un problème sérieux qui nécessite des preuves solides pour être établi. La Cour de cassation en France a clarifié les étapes de l'administration de la preuve et le rôle du juge dans ces cas. Cet article explique ces étapes, référence les articles de loi pertinents, et inclut des exemples pour une meilleure compréhension.

Étape 1 : Collecter des Preuves Tangibles

L'étape cruciale de la collecte de preuves tangibles revêt une importance capitale dans le processus de démonstration du harcèlement moral au travail. Conformément à l'article L1154-1 du Code du travail en France, qui stipule que "la charge de la preuve incombe au demandeur qui doit établir les faits qu'il invoque," le salarié qui se considère comme victime de harcèlement moral doit jouer un rôle actif dans la collecte de preuves solides pour étayer ses allégations. Voici comment cette étape peut être approfondie :

Collecter des Preuves Écrites

Lorsqu'un salarié soupçonne des actes de harcèlement moral, il est essentiel de documenter les incidents de manière méticuleuse. Cela inclut la conservation de tous les documents écrits qui peuvent constituer des preuves. Parmi ces documents, on compte :

  • Les E-mails : Les échanges par e-mail sont souvent une source majeure de preuves. Les salariés doivent conserver tous les e-mails pertinents, y compris ceux contenant des remarques déplacées, des menaces, ou tout autre contenu nuisible.
  • Courriers et SMS : Les courriers postaux et les messages texte sur des téléphones mobiles peuvent également contenir des preuves importantes. Il est recommandé de sauvegarder ces documents de manière sécurisée.

Exemple : Un employé conserve des e-mails insultants reçus de son supérieur hiérarchique. Ces e-mails comprennent des commentaires dénigrants sur son travail et des remarques personnelles offensantes.

Utilisation d'un Journal de Harcèlement

Pour renforcer leurs preuves, les salariés peuvent tenir un journal de harcèlement. Ce journal devrait enregistrer chaque incident, y compris la date, l'heure, le lieu, les personnes impliquées, et une description détaillée des événements. Un tel journal peut servir de référence précise lorsqu'il s'agit de présenter les faits au juge.

Exemple : L'employé maintient un journal de harcèlement où il décrit chaque rencontre avec son supérieur, note les commentaires offensants, et documente les conséquences sur sa santé mentale.

Témoignages de Tiers

Les témoignages de collègues ou de personnes ayant assisté aux actes de harcèlement peuvent renforcer considérablement les preuves. Il est recommandé de parler à des témoins potentiels et de leur demander s'ils sont prêts à témoigner en faveur du salarié.

Exemple : Plusieurs collègues de l'employé ont assisté à des interactions tendues avec le supérieur hiérarchique et sont prêts à témoigner devant le tribunal pour soutenir les allégations de harcèlement.

En somme, la collecte de preuves tangibles est une étape essentielle pour étayer les allégations de harcèlement moral au travail. Elle implique la conservation de documents écrits, la tenue d'un journal de harcèlement, et la recherche de témoignages de tiers. Ces preuves solides constituent la base sur laquelle le salarié peut fonder sa démarche pour faire reconnaître le harcèlement au tribunal.

Étape 2 : Le Rôle du Juge

L'étape 2 du processus, c'est-à-dire le rôle du juge dans la détermination du harcèlement moral, est un élément essentiel pour assurer une évaluation équitable des allégations de harcèlement. L'article L1154-1 du Code du travail en France stipule que "le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles." Voici comment cette étape peut être plus élaborée :

Le Juge en tant qu'Arbitre Impartial

Le juge joue un rôle crucial dans le processus en tant qu'arbitre impartial. Il est chargé d'examiner attentivement les éléments de preuve présentés par le salarié et, si nécessaire, de prendre des mesures d'instruction pour clarifier la situation. Ces mesures d'instruction peuvent inclure l'interrogatoire de témoins, la demande de documents additionnels, ou la consultation d'experts si cela s'avère nécessaire.

Examen des Éléments de Preuve

Le juge analyse minutieusement les preuves fournies par le salarié pour déterminer s'il existe des éléments démontrant le harcèlement moral. Cela implique de passer en revue les documents écrits, tels que les e-mails, les courriers, et les SMS, ainsi que d'examiner les témoignages de tiers.

Interrogatoire de Témoins

Dans certains cas, le juge peut décider d'interroger des témoins pour obtenir leur perspective sur les événements et pour clarifier les circonstances entourant les allégations de harcèlement. Les témoignages de collègues ou de personnes ayant été témoins des actes de harcèlement peuvent être d'une grande valeur pour éclaircir la situation.

Évaluation des Preuves dans un Contexte

Le juge examine les éléments de preuve dans le contexte global de la situation de travail. Il évalue si les preuves présentées par le salarié sont suffisamment solides pour étayer une présomption de harcèlement moral.

Exemple : Imaginons qu'un employé présente des e-mails insultants reçus de son supérieur hiérarchique comme preuve de harcèlement. Le juge examinera ces e-mails en détail, écoutera le témoignage de collègues qui ont été témoins des échanges tendus, et prendra en compte le contexte du lieu de travail pour déterminer si le harcèlement est établi.

En fin de compte, le rôle du juge est de garantir que l'évaluation des allégations de harcèlement est effectuée de manière équitable et impartiale. Il s'appuie sur les éléments de preuve, les témoignages, et son propre jugement pour parvenir à une conclusion sur la présence ou l'absence de harcèlement moral au travail. Cette étape est essentielle pour protéger les droits des salariés et assurer une justice équitable dans ces affaires.

Étape 3 : L'Obstacle pour l'Employeur

Cependant, si la présomption de harcèlement est admise par les juges, la situation change. L'employeur se retrouve dans l'obligation de prouver que les actes en question ne constituent pas du harcèlement moral. Pour cela, l'employeur doit justifier ses actions en apportant des preuves objectives montrant que ses décisions et les mesures litigieuses sont fondées sur des éléments étrangers à tout harcèlement. Cette explication doit être complète, reprenant l'ensemble des faits pour présenter une vision positive de la situation.

Il est important de noter que même si l'employeur a pris des mesures pour mettre fin à la situation de harcèlement, il reste responsable de l'existence même du harcèlement dans son entreprise.

La décision de la Cour de cassation en date du 9 décembre 2020, numéro 19-13.470, rappelle l'importance de ces étapes dans l'administration de la preuve du harcèlement moral au travail.

En résumé, la collecte de preuves tangibles, le rôle du juge, et l'obligation pour l'employeur de justifier ses actions sont des éléments clés dans le processus de démonstration du harcèlement moral au travail. Cette clarification de la Cour de cassation vise à protéger les droits des salariés et à faire en sorte que les actes de harcèlement ne restent pas impunis.

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